Avers et revers d'une monnaie frappée par Alexandre Jannée

Pile ou face?

Sylvain CampeauSylvain Campeau | 2 juin 2017

N’essayez pas de jouer à pile ou face avec une pièce de monnaie juive ancienne : l’avers (le côté face) ne comporte aucune effigie du souverain contrairement aux monnaies des États voisins. Même après la révolte des Maccabées qui s’est conclue, au milieu du IIe siècle avant notre ère, par la création du État juif indépendant, on ne voit aucune représentation des souverains hasmonéens sur leurs monnaies de bronze. Cette pratique sera maintenue sous le règne d’Hérode le Grand et même par les procurateurs romains qui gouvernèrent en Judée à l’époque de Jésus.

Comment expliquer cette particularité du monnayage juif? C’est une interprétation rigoureuse du deuxième commandement qui explique cette absence de représentation humaine : « Tu ne te forgeras pas d’image… » (Ex 20,4 ; repris par Dt 5,8). À partir de la révolte des Maccabées, les images furent bannies de la Judée pendant environ trois siècles. On peut y voir un rejet de l’hellénisme, surtout pendant la période hasmonéenne, ou de la domination étrangère pendant la période romaine.

Les motifs qu’on retrouve sur les monnaies de cette époque sont donc essentiellement des représentations inanimées empruntées au monde végétal ou au monnayage des monarchies hellénistiques. Dans le deuxième cas toutefois, les images sont réinterprétées à la lumière des traditions bibliques. On retrouve par exemple une étoile à huit branches et un diadéma (un bandeau en tissu) sur une pièce frappée sous le règne d’Alexandre Jannée. Sur les monnaies hellénistiques, cette étoile évoque la nature divine du roi et le diadéma est le bandeau royal porté par le souverain en signe de victoire. Sur les monnaies du prince hasmonéen, ces emprunts ont une signification différente : l’étoile évoque l’onction divine du roi considéré comme l’« oint du Seigneur » (Nb 24,17) et le diadéma rappelle le diadème (nézer en hébreu) porté par le roi d’Israël. On voit bien que ces motifs sont pleinement compatibles avec la foi des Israélites.

Sylvain Campeau est bibliste et webmestre du site interBible.

Le furet biblique

Le furet biblique

Initiée en 2001 par Gérard Blais, du Centre biblique Ha’rel (Saint-Augustin), cette rubrique s’inspire souvent de l’actualité pour poser un regard sur le judaïsme, le christianisme ou l’univers culturel de la Bible.