Inscription mentionnant Jérusalem. (photo © Yonatan Sindel / Flash90)

Yeroushalaïm gravée sur une ancienne colonne

Sylvain CampeauSylvain Campeau | 19 novembre 2018

Le 9 octobre dernier, lors d’une conférence de presse au Musée d’Israël, des archéologues de l’Autorité des antiquités israéliennes (AAI) ont dévoilé une courte inscription mentionnant le nom de la ville sainte. L’inscription en langue araméenne est écrite en lettres hébraïques sur le fût d’une colonne datant de la période du Second Temple. Le bâtiment originel qu’elle soutenait a été construit sous le règne du roi Hérode le Grand mais on ne peut pas préciser davantage car le bloc de calcaire a été réutilisé dans une construction romaine.

L’intérêt principal de cette découverte est l’orthographe complète du nom de la ville qui a été écrit il y a 2000 ans comme les Juifs l’écrivent encore aujourd’hui. Yuval Baruch, archéologue de l’AAI, ajoute : « Nous avons à présent l’assurance que durant la période du Second Temple, certaines personnes dans le secteur de Jérusalem utilisaient le même nom que nous aujourd’hui, Yeroushalaïm, quand elles prononçaient, lisaient ou épelaient le nom de la ville. Nous nous rendons compte que le nom a une racine très profonde, ce n’est pas une création moderne, il n’a pas été forgé par la diaspora. » 

Généralement abrégée, même dans la Bible hébraïque, l’orthographe complète du nom de Jérusalem est très rare. On la retrouve sur ce nouvel artefact, sur des pièces de monnaie de la première révolte juive [1] et à quatre reprises seulement dans la Bible : Jérémie 26,18 ; Esther 2,6 ; 1 Chroniques 3,5 et 2 Chroniques 25,1.

L’inscription de trois lignes peut être traduite comme suit : « Hanania, fils de Dodalos de Jérusalem ». L’identité de Hanania et les raisons pour lesquelles il a gravé son nom ne peuvent pas encore être expliquées. Les archéologues pensent toutefois que le personnage était juif et qu’il était potier ou artiste car la colonne a été retrouvée au cœur d’un important village de potiers juifs remontant au 2e siècle avant notre ère. Et selon le conservateur du Musée, Dodalos n’était probablement pas le père du potier. Il faut plutôt comprendre la présence de ce nom comme une référence ou même un hommage au sculpteur et architecte Dédale, une figure emblématique de la mythologie grecque. Cela démontre, encore une fois, l’influence de la culture hellénique sur les Juifs de cette époque.

La découverte a été faite l’hiver dernier lors de travaux de voirie près de Binyenei Hauma, le site du Centre des congrès internationaux de Jérusalem, non loin de la gare des autobus. Le sol de cette ville très ancienne regorge de surprises qui font le bonheur des archéologues et qui nous aide à préciser des pages de l’histoire de Jérusalem.

Diplômé en études bibliques (Université de Montréal, 1996), Sylvain Campeau est responsable de la rédaction.

[1] Ces pièces en argent de différentes valeurs monétaires (shekel ou demi-shekel) portent l’inscription « Jérusalem la sainte ». L’inscription est écrite en paléo-hébreu et le nom de la ville sainte est complet (sauf sur les pièces de la première année de la révolte), comme sur l’inscription gravée sur la colonne. Ces monnaies ont été émises entre 67 et 70 de notre ère. Elles sont toutes du même type et reproduisent un calice rituel sur l’avers et des bourgeons de grenade sur le revers.

Le furet biblique

Le furet biblique

Initiée en 2001 par Gérard Blais, du Centre biblique Ha’rel (Saint-Augustin), cette rubrique s’inspire souvent de l’actualité pour poser un regard sur le judaïsme, le christianisme ou l’univers culturel de la Bible.

Shekel

Pièce de monnaie de la Première révolte juive
Shekel en argent (Hendin 1361)
Avers : Shekel d’Israël ; année 3 (c. 68 de notre ère) est inscrit au-dessus d’un calice rituel. Revers : Jérusalem (la) sainte ; bourgeons de grenade.
(photo : Wikipedia)