Bien
plus important d'être agréable
Le
premier des commandements (Mt 23,1-12)
Autres
lectures : Ml 1,14b-2,1.2b.8-10; Ps 130 (131); 1 Th 2,7b-9.13
« C'est agréable d'être
important. Mais c'est bien plus important d'être agréable! »
Vous avez sans doute déjà lu cette savoureuse maxime,
affichée dans un bureau, une boutique ou une salle de réunion.
Si Jésus l'avait connue, il l'aurait peut-être glissée
dans ses remarques à l'endroit des scribes et des pharisiens.
Car elle rejoint l'essentiel des reproches qu'il leur adresse. Les
premières places, les salutations, les titres, c'est agréable.
Mais quand, en contrepartie, on impose des fardeaux aux autres,
est-ce bien mérité?
Les paroles de
Jésus s'enracinent dans la sagesse orientale qui encourage
le respect du rang social et dénonce les attitudes prétentieuses:
« En face du roi, ne prends pas de grands airs, ne te
mets à la place des grands; car mieux vaut qu'on te dise
: "Monte ici!" que d'être abaissé en présence
du prince. » (Pv 25,6-7). Respecter le rang social
ne signifie pas se soumettre aveuglément à l'ordre
établi. La sagesse évoque plutôt l'éventuel
piège de s'élever soi-même dans l'échelle
sociale, sans considération pour la collectivité.
De telles tentatives deviennent parfois manipulation, tyrannie ou
dictature.
Cette sagesse
qui contribue au maintient de l'équilibre social valait aussi
pour la vie de l'Église. Celle-ci prend au sérieux
la recommandation de Jésus: « Ne vous faites pas
donner le titre de Rabbi. » Non pas d'abord parce que
le christianisme n'appelle aucun de ses responsables « Rabbi »
mais plutôt parce que, en théorie, personne en Église
ne peut s'auto-proclamer de quelque titre que ce soit. « Le
plus grand parmi vous sera votre serviteur. » (v. 11)
Voilà une clé intéressante pour apprécier
la valeur des engagements en Église. Une clé qui fonctionne
en deux sens. En premier lieu: plus on occupe un poste élevé
dans la hiérarchie ecclésiale, plus on est appelé
à rendre service. Le second mode de fonctionnement de notre
« clé de lecture » fonctionne, en quelque
sorte, en sens inverse. En Église, plus on se fait serviteur,
plus on grandit. Pensons par exemple à deux grands en matière
de service: Mère Teresa ou Jean Vanier. Peu importe dans
quel sens on manipule cette clé, elle pointe dans la même
direction: le Christ. Parce qu'il s'est montré le serviteur
par excellence, entièrement soumis à la volonté
de son Père, porté jusqu'à la limite de sa
vie par l'amour du prochain, il reçoit ces titres prestigieux
de Seigneur, Messie, Fils de Dieu, Roi, Grand Prêtre, Maître,
etc. S'il s'est parfois montré désagréable
à l'endroit des scribes et des pharisiens, c'est parce qu'il
a reconnu important de se montrer agréable en servant son
Père.
Jean Grou
Source: Le Feuillet biblique,
no 1769. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins
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