Un
certain tombeau vide
Le
tombeau vide (Jn 20,1-9)
Autres
lectures : Ac 10,34a.37-43; Ps 116 (117); Col 3,1-4
Au temps et au pays de Jésus, le tombeau
était un lieu qu'on disait « impur ».
Non pas au sens moral, bien sûr, mais au sens rituel ou liturgique.
Après avoir été en contact avec la mort, on
ne pouvait participer à une cérémonie ou même
se rendre au Temple sans procéder aux rituels de purification
appropriés.
Cette attitude,
bien enracinée dans le monde biblique, témoignait
d'un sens profond du sacré: il ne fallait pas mêler
la mort et la vie. Dieu, quant à lui, était toujours
invoqué comme le Dieu des vivants. On ne s'attendait pas
à le trouver au séjour des morts, mais bien vivant
au-delà des cieux, trônant au-dessus de toute la création.
Mourir, c'était descendre, donc s'éloigner de Dieu.
Pour aller à Dieu, il fallait d'abord -- pensait-on -- remonter
du séjour des morts, revenir sur la terre des vivants pour
ensuite continuer l'ascension jusqu'à Dieu. Seul les vivants
pouvaient avoir accès au Royaume de Dieu.
Entrer dans un
tombeau, c'était faire un pas vers le séjour des morts.
Symbole de la victoire de la mort sur la vie, le tombeau n'était
pas propice à la rencontre de Dieu, ni à l'annonce
d'une bonne nouvelle.
Ce matin-là
Marie Madeleine contemple sans comprendre l'ouverture béante
du tombeau de Jésus. Pierre, averti par Marie, entre le premier.
Il examine l'intérieur de la tombe, les objets qui y sont.
Le texte ne nous dit rien de ce qui se passait alors dans sa tête,
dans son coeur. Entre enfin « l'autre disciple, celui
que Jésus aimait ». Il vit et il crut!
Comme la nouvelle
vie de Jésus, c'est de la mort que naît la foi du disciple.
Son regard de foi voit au-delà de ce que ses yeux voient.
Extérieurement, rien n'est changé, rien n'est visible.
Pourtant, tout est différent. Ce lieu qui était impur
est devenu lieu de révélation. Ce lieu qui représentait
l'éloignement de Dieu devient l'endroit où on le trouve.
Ce tombeau, pourtant vide, ouvre sur la vie en plénitude.
Quant à
nous, nous sommes toujours devant le tombeau vide. Nos
yeux ne voient encore que le fruit de la mort et du péché.
Le tombeau vide est partout où le mal semble avoir eu le
dessus. Le tombeau vide est là où mon péché
personnel a tout assombri. Le tombeau vide est là où
nos lâchetés et nos égoïsmes collectifs
ont remporté la victoire. Le tombeau vide est là où,
chaque jour, le découragement et le désespoir me guettent.
Mais c'est là , exactement là,
que peut renaître ma foi.
Là où
mes yeux de chair voient un cul-de-sac, une fin sans retour, un
pardon impossible, le regard de la foi peut découvrir les
signes de la victoire du Ressuscité. Le tombeau de mon péché,
de nos trahisons et bassesses, devient lieu de révélation,
de rencontre, d'épiphanie.
Bertrand Ouellet
Source: Le Feuillet biblique,
no 1748. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins
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