Toucher
l'intouchable
Jésus
guérit un lépreux (Marc 1, 40-45)
Autres lectures : Lévitique
13, 1-2.45-46; Ps 101 (102)
1
Corinthiens 10, 31 - 11,1
L'Évangile selon saint Marc commence en lion. Ce
félin est d'ailleurs le symbole de l'évangéliste.
Après une brève mention du baptême par Jean
et du séjour au désert, Marc lance Jésus dans
le feu de l'action. La Bonne Nouvelle commence à se déployer
sur le terrain par une succession rapide d'actes libérateurs :
exorcisme, guérison et purification d'un lépreux.
À deux reprises Jésus doit fuir les foules qui le
cherchent. Le comportement surprend et mérite un peu d'explication.
Alors que Jésus parcourt la
Galilée, un lépreux se présente à lui.
Étonnant, car les lépreux étaient mis en quarantaine,
jusqu'à ce que la mort survienne, car la véritable
lèpre ne connaissait pas de guérison. Ce lépreux
transgresse donc l'interdiction de s'approcher des hommes et vient
se prosterner devant Jésus, comme on le fait devant Dieu,
et le supplie de le guérir. Jésus ne se dérobe
pas et touche l'intouchable. Il est ému de compassion. Quelques
manuscrits notent plutôt qu'il fut rempli de colère;
il est difficile de savoir si c'est contre la démarche du
lépreux ou contre la maladie.
La compassion de Jésus, c'est
la miséricorde divine qui envahit tout son être jusque
dans les profondeurs de ses entrailles. La supplication du lépreux
laisse place à la liberté de Jésus. Si tu
le veux, tu peux
La miséricorde oriente la liberté
de Jésus, comme elle est la disposition intérieure
qui pousse Dieu à se tourner vers l'homme pour le libérer
de ses esclavages. Voici que Jésus rétablit le lépreux
dans sa dignité et son intégrité physique,
lui qui était exclu de toute relation avec les hommes et
inapte à rendre un culte à Dieu, car il était
considéré comme un pécheur.
Comme les autres guérisons,
celle du lépreux témoigne de l'irruption des temps
messianiques. Mais pourquoi Jésus, avec une certaine rudesse,
interdit-il au lépreux de faire connaître la nouvelle
de sa guérison? L'évangéliste a un message
important à communiquer à ses lecteurs. Le lépreux
a lui aussi touché l'intouchable, c'est-à-dire le
mystère de la divinité de Jésus. Il ne lui
appartient pas de s'en faire le héraut alors que Jésus
exerce la mission reçue du Père avec humilité
comme un serviteur obéissant. Jésus ne veut pas que
la révélation de son identité lui échappe
avant l'ultime témoignage du don de sa vie et de la victoire
sur la mort. Même si une force puissante émane de lui,
manifestation de sa communion avec le Père, Jésus
ne veut pas être réduit à un thaumaturge. Il
veut plutôt qu'on le suive à cause de l'Évangile,
seul capable de transformer et renouveler en profondeur l'être
humain.
Yves Guillemette, ptre
Source: Le Feuillet biblique,
no 1915. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins
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