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Vingt-sixième dimanche ordinaire A - 25 septembre 2005
 

L'humilité de l'obéissant

Parabole des deux fils (Matthieu 21, 28-32)
Autres lectures : Ézéchiel 18, 25-28; Ps 24(25); Philippiens 2, 1-11

La parabole des deux fils au comportement inconstant rappelle une autre parabole comme sous le nom de l'enfant prodigue, que l'on trouve dans l'évangile de Luc. Dans les deux cas, le message porte sur la conversion et il est mis en lumière par l'agir contrasté des deux fils.

   Le thème du père et des deux fils dans le cas de l'enfant prodigue (Luc 15, 11-32) servait surtout à illustrer l'attitude de Dieu vis-à-vis des pécheurs. Jésus en était l'image : Celui-ci accueille des pécheurs et mange avec eux (Luc 15, 2). Jésus exprimait la bonté du père, ému de tendresse pour son fils repentant qui revenait à la maison. Le fils aîné montrait de la jalousie pour le cadet et la fête qu'on lui faisait. L'attitude du père était contestée.

Obéissance à retardement
    La parabole des deux fils met l'accent non plus sur le père mais sur les fils. On ne souligne pas l'attitude de Dieu, puisque le père ne réagit pas à la vraie disponibilité de l'un et à la fausse obéissance de l'autre. Les chefs des prêtres et les anciens à qui s'adresse la parabole sont comme le deuxième fils. Ils disent être obéissants, ils appellent le père « Seigneur » mais ils ne font pas ce que le père demande. Ils se consièrent justes mais ils ne le sont pas. Ils ont interdit l'accès du temple aux païens et ils en ont fait « un repaire de brigands » : leur péché sera bientôt dévoilé (Matthieu 21, 12-17).

    La résistance des chefs des prêtres et des anciens à la parole de Jean le Baptiste prouve leur mauvaise volonté. La prédication de Jean avait inauguré le royaume (Mt 3, 2). Les chefs spirituels d'Israël avaient eu l'occasion de se convertir, mais ils s'étaient enfermés dans leur suffisance. Les publicains et les prostituées, au contraire, après un premier temps où ils ont dit : « Je ne veux pas», se sont reconnus pécheurs, se sont repentis, et ont cru en la parole. Ceux qu'on excluait juridiquement du peuple choisi à cause de leur péché sont ceux qui se sont montrés ouverts à la conversion.

On ne fait pas ce qu'on veut avec les enfants...
    Le livre de la Genèse raconte l'histoire des deux fils : Ésaü et Jacob. Les deux attendaient la bénédiction de leur père Isaac. Jacob a demandé la bénédiction qui devait aller à son frère aîné, en trompant son père par un déguisement. Ésaü a demandé la bénédiction d'Isaac lui aussi, mais trop tard. Isaac n'a pu que lui faire une prophétie de bonheur.

   Malgré son mensonge, Jacob s'est racheté par la suite en obéissant à son père et en se mariant avec sa cousine. Ésaü, au contraire, s'est laissé séduire par la beauté des femmes cananéennes, au grand chagrin de ses parents et au péril de sa foi (Gn 28, 6). À cette époque épouser une femme étrangère était s'exposer soi-même à l'idolâtrie.

    « On ne fait pas ce qu'on veut avec nos enfants », disent les parents des adolescents. C'est normal, et même souhaitable au moins pour le temps qu'ils affirment leur personnalité. Pour les parents, il faut beaucoup de patience. C'est l'attitude de Dieu jusqu'à ce que notre oui soit oui et notre non soit non.

    N'oublions pas que cette parabole comme toutes les autres est une abstraction logique. La vie est différente car les disciples de Jésus sont tantôt comme l'un ou l'autre des fils. Il y a le fils qui dit : « J'y vais » pour ensuite ne pas aller. Comment ne pas se reconnaître dans ce personnage? La foi morte, l'assentiment sans l'action, le christianisme de façade, c'est trop souvent le nôtre.

L'humilité du Fils
    Lui qui était dans la condition de Dieu, il n'a pas jugé bon de revendiquer son droit d'être traité à l'égal de Dieu; mais au contraire, il se dépouilla lui-même prenant la condition de serviteur.

   Par ailleurs, on peut admirer l'humilité du fils qui a reconnu son tort. Oserios-nous attribuer cette humilité à celle de Jésus? Au Christ humilié et exalté (Ph 2, 6-11) saint Paul (deuxième lecture) parle justement de cette humilité qui nous vaut la rédemption : Lui qui était dans la condition de Dieu, il n'a pas jugé bon de revendiquer son droit d'être traité à l'égal de Dieu; mais au contraire, il se dépouilla lui-même en prenant la condition de serviteur. Le mystère de l'Incarnation qui prépare celui du salut par la croix est un mystère d'obéissance. Jésus est le Fils totalement donné à la rédemption voulue par le Père.

L'État changeant de l'être humain
    Avouons que nous sommes instables dans notre vie de foi. Les publicains et les prostituées ont peut-être été de ceux et celles qui ont cru en Jean Baptiste, puis en Jésus et enfin sont retombés dans leurs ornières. Ils ont peut-être fait partie de la foule qui criait : Crucifiez-le! L'évangile ne nous en dit rien. Ayons cependant confiance dans la grâce de Dieu. La parabole ne nous dit que trop peu de choses sur le Père. Il était à la tête d'une maison chaleureuse, peuplée de nombreuses personnes qui l'aimaient et se réconfortaient les uns les autres dans une vie d'amour fraternel. La maison de l'enfant prodigue était elle aussi une maison où l'on mangeait et chantait avec un sens de la fête. C'est la joie de la liturgie. La célébration constitue souvent le lieu du pardon. Le moment charnière dans la parabole des deux fils est celui du repentir : « s'étant repenti » (en grec « metamélèteis »).

L'état permanent de la conversion
Ezéchiel 18, 25-28

Parce qu'il a ouvert les yeux, parce qu'il s'est détourné de ses fautes, il ne mourra pas, il vivra.

     Un sujet de conversion qui demeure permanent est celui de nos jugements sur les autres. La conversion est nécessaire. L'appel à la conversion s'explique pour le méchant comme pour le juste. Qui peut se prétendre juste en fin de compte? Ézékiel vient inquiéter les bien-pensants sur des jugements tout faits. Dieu aime chacun des membres de l'Alliance et il veut la conversion de tous. Je ne prends pas plaisir à la mort de qui que ce soit, oracle du Seigneur Yahvé. Convertissez-vous et vivez (Ézékiel 18, 32).

    Nous divisons encore l'humanité en bons et en méchants. Et Dieu devrait agir pour récompenser et pour punir selon les jugements « éclairés » des êtres humains! Modestement, admettons la faiblesse de notre jugement. N'ayons pas la prétention de donner un avis définitif sur qui que ce soit. Aussi longtemps que dure la vie ici-bas, la conversion et la marche en avant
demeurent possibles.

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La responsabilité personnelle
    Une originalité du prophète Ézéchiel, tout à fait typique de la prophétie sur la Nouvelle Alliance est son insistance sur la responsabilité individuelle. Chacun est libre et responsable de sa conduite. Il est faux de dire : Les pères ont mangé les raisins verts et les dents de fils ont été agacées (Ézéchiel 18, 2). Nous appartenons à une communauté humaine mais c'est chacun qui est responsable devant le jugement du Seigneur, quels que soient les péchés de ses ancêtres.

Pierre Bougie, PSS, bibliste
Professeur au Grand Séminaire de Montréal

Source: Le Feuillet biblique, no 2024. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

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La conversion du regard