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4e dimanche de Carême B - 26 mars 2006
 

Autour du salut

Le fils médiateur et le jugement Jean 3, 14-21
Autres lectures : 2 Chroniques 36, 14-16.19-23; Psaume 136 (137); Éphésiens 2, 4-10


La rencontre de Jésus avec Nicodème, racontée au début de l’Évangile de Jean, s’est produite durant la visite de Jésus à Jérusalem. Nicodème était un membre du Sanhédrin, c’est-à-dire le conseil des notables juifs qui avaient autorité sur les affaires religieuses. Il représentait donc très bien le peuple juif de son époque avec sa foi au Dieu Un, ainsi que son attachement à la loi de Moïse.

Nicodème discute avec Jésus
    Même s’il devait être partculièrement ancré dans le monothéisme, Nicodème a entendu Jésus lui parler des trois personnes divines. De fait, Jésus a commencé en lui révélant l’action de l’Esprit qui est aussi mystérieuse que le vent et qui donne accès au cœur de la vie des trois personnes. Le vent souffle où il veut et tu entends sa voix, mais tu ne sais pas d’où il vient ni où il va. Ainsi en est-il de quiconque est né de l’Esprit (Jean 3, 8). Quand le croyant a reçu l’Esprit en lui pour éclairer son intelligence, la relation mutuelle du Père et du Fils lui devient plus abordable.

   Le passage d’évangile contient une phrase difficile : Celui qui croit en lui (Jésus) échappe au jugement, celui qui ne veut pas croire est déjà jugé (Jean 3, 18). Bien que cette parole ait une valeur éternelle, il faut la situer dans la vie publique de Jésus pour en comprendre le sens. C’est d’abord dans les situations de conflit vécues par Jésus qu’on découvre l’originalité de son message.

Nicodème le Pharisien
    La parole de Jésus s’adresse à Nicodème, un pharisien qui est venu le rencontrer un soir, presque en cachette. Pour les pharisiens qui représentent le groupe juif le plus important de l’époque, la justice de Dieu est claire. Dieu rend juste et saint celui qui se conforme à la Loi. L’homme qui accepte l’enseignement du groupe au sujet de l’intelligence de la Loi a d’autant plus de chance de se justifier. Le bon élève des pharisiens étudie comme il faut. Il méprise les autres : Cette foule qui ne connaît pas la Loi, ce sont des maudits (Jean 7, 49).

    Le jugement des pharisiens envers les pécheurs est probablement caricaturé par les évangélistes mais on retient le trait. Ils appliquent le principe : C’est la stricte justice que tu rechercheras (Deutéronome 16, 19).

La souffrance, châtiment ou épreuve?
    La magnifique lecture du Second livre des Chroniques semble à première vue illustrer ce principe de la stricte justice. La chute de Jérusalem et la destruction du Temple ont été des événements très significatifs pour la pensée religieuse d’Israël. Également, la restauration de la Ville Sainte commençant par le Temple a constitué un signe d’espérance de grande portée.

    Tous les auteurs de la Bible n’ont pas nécessairement interprété la prise de Jérusalem et l’incendie du Temple de la même façon. Par exemple, le Psaume 44 voit la défaite devant Nabuchodonosor et son armée comme une énigme insondable : Tout cela nous advint sans t’avoir oublié, sans avoir trahi ton alliance, sans que nos cœurs soient revenus en arrière, sans que nos pas aient quitté ton sentier (Ps 44, 18-19). Pour sa part, l’auteur du Second livre des Rois, réfléchissant sur tous ces malheurs, en conclut que c’est à cause de l’amoncellement des actes d’idolâtrie : Cela arriva parce que les Israélites avaient péché contre Yahvé leur Dieu, qui les avait fait monter du pays d’Égypte, les soustrayant à l’emprise de Pharaon, roi d’Égypte (2 Rois 17, 7)

    Le Chroniste, pour sa part, fidèle à sa doctrine de la rétribution immédiate, conclut que la tragédie est un châtiment pour le bref règne de Sédécias, le dernier descendant de David à occuper le trône de Jérusalem. Sous le règne de Sédécias, tous les chefs des prêtres et le peuple multipliaient les infidélités. Le péché par excellence, à l’époque du Chroniste, est la violation du sabbat. Un prophète de la même époque déclare : Et si tu t’abstiens de violer le sabbat, de vaquer à tes affaires en mon jour saint, alors tu trouveras tes délices en Yahvé, je te conduirai en triomphe sur les hauteurs du pays (Isaïe 58, 13-14). Le Chroniste rappelle la condamnation prononcée par Jérémie : La terre sera dévastée et elle se reposera durant soixante-dix ans, jusqu’à ce qu’elle ait compensé par ce repos tous les sabbats profanés (2 Ch 36, 21; Jr 25, 11-12).

La libération de la souffrance, espoir du monde
   Par ailleurs, une fois les soixante-dix ans d’exil passés, la fidélité du Seigneur s’est fait sentir par le décret de Cyrus, roi de Perse, accordant la liberté de rebâtir la demeure de Dieu. La faveur octroyée au peuple représente un prélude à l’évangile qui est aussi un acte de miséricorde et de bonté.

    Jésus a fréquenté les pécheurs et a été pour eux l'occasion d'une conversion, d'une démarche de foi et de renouveau.

    Ceux qui avaient reçu des signes d’amitié ont sans doute été plus aptes à voir dans la Passion la preuve que les hommes ne comprennent rien à Dieu. On ne pardonnait pas à Jésus d’avoir aimé les pécheurs. On l’a tué comme blasphémateur. Son comportement a paru opposé à ce que dit la loi : Ne justifie pas le coupable! (Exode 23, 7) La Passion a été mystérieusement préparée par Moïse lorsqu’il a élevé le serpent de bronze au désert. Le serpent dont l’image se trouve aux façades de nos pharmacies a toujours été lié à la guérison.

    L’attitude de Jésus envers les pécheurs a révélé au monde la justice de Dieu. S’en remettre à la justice stricte, c’est attirer sur soi les conséquences de ses œuvres mauvaises. Mais la justice de Dieu va jusqu’au don de la foi. Qui croit en Jésus échappe au jugement!

Justice et miséricorde pour le monde
   La miséricorde divine connaît une extension cosmique dans la vision de saint Paul. Serions-nous déjà ressuscités? Serions-nous déjà dans le ciel avec le Christ? Paul s’exprime comme si c’était dès maintenant le cas : Avec lui, il nous a ressuscités; avec lui, il nous a fait régner aux cieux, dans le Christ Jésus (Ép 2, 6).

    Comme le note la Bible de Jérusalem, « ici et en Colossiens, Paul envisage comme réalité déjà acquise (verbes au passé) la résurrection et le triomphe céleste que l’Épître aux Romains considérait plutôt dans l’avenir (verbes au futur). Cette eschatologie réalisée (fin du monde anticipée) est un trait caractéristique des épîtres de la captivité » (cf. note e sur Ép 2,6).

La miséricorde d’après Jean-Paul II
   L’une des encycliques les plus marquantes de Jean-Paul II demeure Dives in misericordia (Riche en miséricorde). Il disait : « L’amour de Dieu est capable de se faire proche de chaque enfant prodigue, de chaque misère humaine. Celui qui est ainsi objet de sa miséricorde ne se sent pas humilié, mais comme retrouvé et revalorisé, … La conversion à Dieu consiste toujours dans une découverte de sa miséricorde, c’est-à-dire de cet amour patient et doux comme l’est Dieu Créateur et Père ».

Pierre Bougie, PSS
Professeur au Grand Séminaire de Montréal

 

Source: Le Feuillet biblique, no 2050. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

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Des mots qui portent!