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27e dimanche ordinaire B - 8 octobre 2006

 

Vivre en frères et sœurs du Christ

Mariage et divorce Marc 10, 2-16
Autres lectures : Genèse 2, 18-24; Psaume 127(128); Hébreux 2, 9-11


Tout le monde fait partie d’une famille; même si tout le monde n’est pas époux ou épouse, père ou mère, tout le monde est fils ou fille de quelqu’un. Cette donnée fait partie des expériences fondamentales de l’humanité. Et, de quelque côté qu’on se tourne, le vocabulaire chrétien nous ramène toujours au modèle familial : Dieu est Père, Jésus est le Fils; en lui, nous sommes tous frères et sœurs (cf. Hébreux 2,11). Être chrétien, c’est faire partie d’une famille, celle de Dieu.

Tous deux ne feront plus qu’un (Mc 10, 8)
    La discussion entre Jésus et les Pharisiens prend l’allure d’un concours de connaissances bibliques; c’est à qui pourrait trouver la citation qui va mettre l’adversaire hors-jeu. Pourtant le propos de Jésus ne vise pas à emporter la discussion à tout prix mais à situer la question dans une perspective plus large, celle du projet de Dieu tel que révélé dans son œuvre de création. Les catégories de permis et de défendu ne suffisent pas à rendre compte de ce dont Dieu rêve pour l’humanité. Jésus se fait l’interprète non seulement des prescriptions particulières de la Loi de Moïse mais de la volonté de Dieu : que l’homme s’attache à sa femme et forme, avec elle, une seule chair (v. 8; N.B. la traduction liturgique tous deux ne feront plus qu’un ne rend pas exactement les nuances du texte grec); non pas un seul être, puisque les deux demeurent des personnes autonomes, mais, ensemble, ils forment une réalité nouvelle, un couple. Il ne s’agit pas là d’une convention sociale ni d’un simple arrangement administratif; la réalité du couple humain s’enracine dans la volonté de Dieu lui-même. Avant l’Alliance avec Moïse, avant celle avec Noé, Dieu en établit une avec l’humanité (même si le vocabulaire caractéristique n’est pas présent); l’union de l’homme et de la femme devient le signe privilégié du partenariat de Dieu avec sa création. Briser ce lien porte atteinte au projet de Dieu.

En raison de votre endurcissement… (Mc 10,5)
    Les Pharisiens aussi s’appuient sur un passage de la Loi : Deutéronome 24,1-4. En fait ni ce passage ni aucun autre dans l’Ancien Testament n’autorise explicitement le divorce. La législation en question suppose ce droit de la part du mari et veut réglementer une situation très particulière : le remariage de deux ex-époux alors que la femme aurait été, entre temps, l’épouse d’un autre.

    Jésus affirme que cette dérogation (la possibilité pour le mari de renvoyer sa femme) a été accordée à cause de l’endurcissement (du cœur) de ses interlocuteurs. Dans l’Ancien Testament ce mot désigne l’obstination dans le péché, une sorte de refus chronique des exigences de l’Alliance (cf. Dt 10,16; Jr 4,4; Éz 3,7; Si 3,26-27; 16,9-10). Il ne s’agit donc pas de quelque chose de secondaire ou de banal. Selon Jésus la Loi de Moïse tolérait le divorce, non parce qu’il était permis, mais comme un moindre mal.

    Il est significatif que les mots relatifs à l’adultère soient devenus, dans le langage biblique, synonymes d’infidélité religieuse (voir, par exemple : Mt 12, 39; 16,4; Mc 8,38; Jc 4,4). Lorsque les disciples interrogent Jésus (Marc 10,10), sa réponse se situe dans cette perspective. Le remariage après divorce porte atteinte aux droits de Dieu puisqu’il remet en question l’Alliance. Il ne s’agit pas seulement de la transgression d’une loi mais d’une infidélité au projet de Dieu tel que réalisé dans le couple humain (Mc 10, 11-12).

   On sait combien cet enseignement du Christ a suscité, et suscite encore, des débats et des résistances. Les difficultés rencontrées par les couples actuels ne sont certes pas moindres que celles qui avaient amené les législateurs du peuple juif à tolérer le divorce en certaines circonstances. Cependant, pour les couples unis par le mariage chrétien, la situation est radicalement nouvelle. Leur union est un sacrement, un signe efficace de l’amour de Dieu. L’Église a réaffirmé sa foi dans la grâce du mariage dans plusieurs textes du second Concile du Vatican, par exemple celui-ci : C’est pourquoi les époux chrétiens, pour accomplir dignement les devoirs de leur état, sont fortifiés et comme consacrés par un sacrement spécial; en accomplissant leur mission conjugale et familiale avec la force de ce sacrement, pénétrés de l’esprit du Christ qui imprègne toute leur vie de foi, d’espérance et de charité, ils parviennent de plus en plus à leur perfection personnelle et à leur sanctification mutuelle; c’est ainsi qu’ensemble ils contribuent à la glorification de Dieu (Gaudium et Spes #48, 2). Cette foi de l’Église s’enracine dans la parole de Jésus : Ce que Dieu a uni, que l’homme ne le sépare pas! (Mc 10,9)

Laissez les enfants venir à moi…(Mc 10, 14)
   On passe sans aucune transition d’une discussion sur le divorce à une scène mettant en vedette des enfants. Le lien entre les deux épisodes est évidemment thématique. Marc a voulu créer un tableau familial : d’un côté les parents, unis dans le mariage, de l’autre, les enfants, accueillis avec joie et respect.

   Les parents de l’Antiquité aimaient sans doute leurs enfants autant que ceux d’aujourd’hui mais leur affection se manifestait autrement. L’éducation était sévère, brutale même (voir, par exemple : Si 30, 1-13) et les jeunes n’occupaient aucune place dans la vie sociale. L’attitude des disciples est cohérente avec la mentalité de leur temps : pourquoi importuner Jésus avec des enfants? La réponse de Jésus contraste avec cette mentalité : dans la famille de Dieu, tous ont leur place et les plus petits y sont particulièrement les bienvenus.

    Comme cela arrive souvent, Jésus profite de l’occasion pour donner un enseignement concernant le Royaume de Dieu. Les enfants sont élevés au rang de modèles à imiter par ceux qui veulent accéder à ce Royaume. Il ne s’agit pas, bien sûr, de « retomber en enfance » mais de garder son cœur pur et accueillant comme celui d’un petit pour pouvoir recevoir de Dieu les biens de son Royaume.

Il n’a pas honte de les appeler ses frères (He 2,11)
    L’auteur de l’Épître aux Hébreux affirme que Dieu, le créateur et le maître de tout voulait avoir une multitude de fils (He 2,10). L’incarnation du Christ a comme objectif de constituer cette famille. En partageant la destinée de l’humanité, y compris dans la souffrance et dans la mort, il sanctifie les humains (cf. v. 11) c’est-à-dire qu’il les fait partager la vie de Dieu en les rendant saints comme lui-même est saint. Le Christ a été abaissé au-dessous des anges (v. 9) pour permettre à sa famille humaine de partager avec lui la gloire et l’honneur (v. 9).

   Même si le langage de cette épître peut paraître rébarbatif, son message est important. Dans le sacrifice du Christ, dans l’offrande qu’il fait librement de sa vie, les humains sont constitués fils et filles de Dieu.

Voici l’os de mes os… (Gn 2,23)
   Ce texte a été commenté tellement de fois et de tellement de manières qu’on a l’impression qu’il ne contient plus de secrets. À première vue, il semble que Dieu avait oublié de créer pour l’homme une aide qui lui corresponde (v. 18) c’est-à-dire qui soit capable de répondre avec lui, qui puisse être coresponsable de la mise en œuvre de son projet dans la création. Il corrige cette lacune en créant d’abord les animaux et les oiseaux (v. 19), façonnés avec de la terre comme l’homme lui-même, puis la femme, tirée de l’homme. Le premier couple humain a donc une origine unique, il vient de Dieu. Ensemble l’homme et la femme forment une seule chair, une réalité nouvelle qui n’est pas seulement l’addition des deux, encore moins leur fusion. Telle est l’origine de la famille, pierre angulaire de toute société et modèle de la communauté humaine réconciliée avec Dieu dans le Christ.

 

Source: Le Feuillet biblique, no 2069. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

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La formation des disciples