INTERBIBLE
Au son de la cithare
célébrer la paroleintuitionspsaumespsaumespsaumes
off Nouveautés
off Cithare
off Source
off Découverte
off Écritures
off Carrefour
off Caravane
off Scriptorium
off Artisans

 

 
Célébrer la Parole

 

orant
Imprimer
Dimanche des Rameaux B - 9 avril 2006
 

Qui donc est cet homme?

Le complot contre Jésus Marc 14, 1 - 15, 47
Autres lectures : Isaïe 50, 4-7; Psaume 22(21); Philippiens 2, 6-11


Dans la première partie de son évangile Marc raconte la scène de la tempête apaisée (Mc 4, 35-41). On y voit les disciples affolés à cause de la tempête pendant que Jésus dort dans la barque (Mc 4,38). Dans la scène de Gethsémani (Mc 14, 32-42) les disciples dorment (vv. 37.40) pendant que Jésus ressent frayeur et angoisse (v. 33). La scène de la tempête se termine par une question, qui va dominer tout le deuxième évangile : Qui donc est celui-ci? (Mc 4,41). Tout le récit de la passion oriente le lecteur vers la déclaration du centurion : Vraiment, cet homme est fils de Dieu (Mc 15, 39).

    Qui donc est cet homme jugé, condamné, mort comme un criminel, qui révèle le vrai visage de Dieu? Et qui est ce Dieu si démuni, si impuissant qu'il paraît abandonné complètement à la cruauté des humains?

Le Seigneur Dieu vient à mon secours (Is 50, 7)
     Le mystérieux serviteur de Dieu est atteint dans son corps, pas seulement dans ses sentiments. L'auteur énumère la langue (v. 4), l'oreille (v. 5), le dos, les joues, la barbe et le visage (v. 6). Même si nous ne savons pas exactement qui était ce personnage à l'origine, les disciples de Jésus y ont vu une figure du Messie souffrant. Malgré les épreuves (v. 6) il reste ferme car il sait que Dieu est avec lui et qu'en fin de compte, c'est lui qui sera vainqueur (v. 7). L'image de Dieu qui ressort de ce passage est celle d'un Dieu fidèle qui n'abandonne pas son serviteur, c'est aussi celle d'un éducateur dont la Parole instruit son disciple. De son côté, le serviteur se caractérise par sa docilité, sa persévérance et sa confiance.

Béni soit celui qui vient… (Mc 11,10)
     Il n'est pas nécessaire de supposer une forme de prescience pour expliquer la scène de l'ânon. Jésus a très bien pu organiser la chose avec quelqu'un de ses connaissances, comme il a pu aussi planifier le signe de l'homme à la cruche d'eau pour guider les disciples chez le propriétaire de la salle où aurait lieu le dernier repas (Mc 14, 12-16). Cette mise en scène a toutes les apparences d'un geste délibéré de la part de Jésus. En choisissant de vivre la prophétie de Zacharie (9, 9-10), il pose un geste symbolique visant à le faire connaître comme un roi d'un genre nouveau; il est celui qui vient au nom du Seigneur (v. 9; cf. Ps 118(117), 26); son Règne s'inscrit dans la suite de celui de David (v. 10). Même si Jésus n'avait en vue que la dimension spirituelle du Royaume à venir, il est clair que son geste pouvait être interprété dans un sens politique et que les autorités y ont vu une provocation (surtout que, tout de suite après, il va s'attaquer aux usages établis en chassant les marchands du temple - Mc 11, 15-19; cf. Za 14, 21).

Ceci est mon corps…(Mc 14,22)
    Beaucoup de passages du récit de la Passion mériteraient un commentaire détaillé. Si nous voulons comprendre le sens que Jésus lui-même a donné à sa mort, la scène du dernier repas nous fournit les meilleurs indices. Jésus fait plus qu'instituer un nouveau rite, il pose un geste prophétique qui anticipe les événements prochains et en donne déjà la signification. Son corps sera brisé par la mort pour devenir nourriture et source de vie; son sang sera répandu comme signe d'une Alliance nouvelle entre Dieu et la multitude (v. 24), c'est-à-dire toute l'humanité réconciliée dans le Royaume de Dieu. La mort de Jésus et sa représentation sacramentelle dans le partage du pain et de la coupe annoncent la venue des temps nouveaux. Je ne boirai plus du fruit de la vigne, dit Jésus (Mc 14, 25); par ailleurs, il affirmera au Grand Prêtre: Je le suis (le Messie) et vous verrez le Fils de l'homme siéger à la droite du Tout-Puissant et venir sur les nuées du ciel (Mc 14, 62). Il est convaincu que sa mort, librement acceptée malgré la frayeur qu'elle lui cause (Mc 14, 36) sera, mystérieusement, l'événement décisif de l'histoire, celui par lequel le Royaume de Dieu fait irruption dans le temps des humains.

…pourquoi m'as-tu abandonné? (Mc 15,34)
    Le Psaume 22 (21) est l'expression de la prière d'un « Serviteur souffrant »; plusieurs de ses thèmes rejoignent ceux du « Quatrième chant » (Is 52,13-53,12). Certains éléments du récit de la Passion peuvent être mis en parallèle avec des versets du Psaume (par exemple: les moqueries : Mc 15, 29-32 et vv. 8-9; le partage des vêtements : Mc 15, 24 et v. 19). Au moment où Jésus va mourir, l'évangéliste met dans sa bouche le début de ce Psaume : Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné? (Mc 15,34; cf. Ps 22(21), 2). Jésus meurt seul, abandonné de tous, y compris de ses amis les plus proches (cf. Mc 14, 50) et même, semble-t-il, de Dieu. Mais son cri est moins l'expression du désespoir que l'appel ultime à son Père, celui qui peut le sauver malgré toutes les apparences contraires (cf. Ps 22(21),20-22). Le Psaume s'achève par une action de grâce (Ps 22(21), 25-30); en dépit de tout, le Serviteur a été justifié. La prière de Jésus, enracinée dans la tradition de son peuple, est, en fin de compte, l'expression d'une espérance plus forte même que la mort.

Jésus Christ est Seigneur (Ph 2,11)
     Les premiers chrétiens ont su ramasser en quelques versets tout le mystère du Christ mort et ressuscité. Devenu Serviteur, solidaire de toute la condition humaine (Ph 2, 7), obéissant jusqu'à accepter la mort (Ph 2,8), il est exalté par Dieu qui lui donne de partager avec lui le nom de Seigneur (Ph 2,11) et de recevoir avec lui l'adoration de toute la création (Ph 2, 10). Merci à Paul de nous avoir transmis ce petit chef-d'œuvre!

     Ainsi se révèle la véritable identité de cet homme mystérieux à qui même la mer et le vent obéissent (cf. Mc 4,41). Ainsi se dévoile aussi le vrai visage de Dieu qui se fait proche de l'être humain au point de partager sa faiblesse extrême, celle de la mort, pour le faire entrer avec lui dans la Vie.

Jérôme Longtin, ptre, bibliste
Saint-Jean-Longueuil

 

Source: Le Feuillet biblique, no 2052. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

Chronique précédente :
C'était son Heure!