L'espérance têtue des croyants
La résurrection des morts : Luc
20, 27-38
Autres lectures : 2
Martyrs d'Israël 7, 1-2.9-14;
Psaume
16(17); 2
Thessaloniciens 2, 16 3, 5
« Novembre, mois des morts » disait-on
autrefois... Aujourdhui, avec les martyrs du Premier Testament,
avec le regard de Jésus, nous osons regarder la mort en face.
Elle devient frontière transparente, grande ouverte sur les
larges horizons de lamour de Dieu. Parce que Dieu est fidèle,
parce quil est source de résurrection, de relèvement
dentre les morts, il est la source de toute espérance.
Les textes bibliques de ce jour semblent loin de nos
préoccupations quotidiennes. On passe dune histoire
de jambon, dans la première lecture, à un problème
de mariage à répétition, dans lévangile.
On est bien prêt à renoncer au jambon si cela peut
nous éviter quelques calories, mais de là à
mettre notre main au feu... Quant au mariage à huit ou au
mariage pour léternité, cela ne semble vraiment
pas la préoccupation du jour. La moitié des mariages
nouvellement conclus risque de finir en catastrophe. Pour les couples
qui saiment, cest un choc dapprendre que la relation
sera différente, une fois de lautre bord!
La certitude des Martyrs dIsraël
(2 M 7, 1-2.9-14)
La première lecture nest pas précisément
le genre dhistoire à raconter aux enfants avant le
sommeil. La demande du roi et ses réactions traduisent une
affaire politique grave : les envahisseurs grecs, les successeurs
dAlexandre le Grand, qui avaient essayé damadouer
les Juifs aux coutumes païennes passent soudain à la
confrontation.
Manger ou non du porc est alors plus quun choix
diététique. Cétait un symbole des coutumes
païennes, des sacrifices rendus aux idoles par les peuples
païens qui environnaient les terres du peuple de Dieu... Les
envahisseurs païens sen servaient pour contester les
observances des Juifs, ce que nous appelons « les lois »
de la Torah. Cet enseignement portait sur lidentité
de Dieu, toujours en lien avec son peuple, et la nécessité
pour le peuple davoir des signes immuables de son appartenance.
Cette fermeté portait ombrage aux rois grecs prétentieux.
De bonnes questions
Mourir pour ne pas manger de porc... cela paraît
disproportionné et ridicule! Ce qui est en jeu, cest
lanéantissement de la foi et de la culture juives.
On arrache à sept frères leur langue physique... pour
essayer de leur faire renoncer à leur parole forte et originale.
Lenvahisseur veut imposer une autre façon de voir la
vie et de vivre... sans priorité pour le Dieu des pères,
le Dieu des vivants!
Les jeunes Juifs déclarent ouvertement leurs
convictions. Ils témoignent, ils apportent au sens strict
un « martyre » au sujet de leur perception du rôle
de Dieu, le Roi du monde, source de vie éternelle. Ces jeunes
gens disent leur certitude : le corps continue dexister au-delà
de la mort, ce qui était une grande nouveauté pour
lépoque!
Des questions
pour aujourdhui
Ce témoignage familial pose de bonnes questions.
Par exemple, quand nous pensons à loutre-tombe, sommes-nous
paralysés par la frayeur ou soutenus par la certitude dune
présence qui nous y attend? Quest ce qui passe en premier
dans notre vie? Quels sont nos critères de décision?
Y a-t-il encore des certitudes qui valent le prix de notre vie?
Oui, affirme le témoignage des martyrs du XXe
siècle. Jean-Paul II a béatifié ou canonisé
souvent des martyrs qui ont refusé lillusion nazie
: Maximilien Kolbe qui prit la place dun père de famille
condamné, le journaliste hollandais Titus Brandsma qui résista
en Hollande à la propagande nazie, la juive convertie Édith
Stein...
Le martyre est un témoignage nécessaire
en notre époque rongée par langoisse. Tenir
bon peu importe la persévérance requise suscite tôt
ou tard des questions salutaires. Dans la première lecture,
le martyre des jeunes Juifs eut un effet choc sur les politiciens
envahisseurs : Le roi et sa suite furent frappés du courage
de ce jeune homme qui comptait pour rien les souffrances (v.
12).
Un grand cri du cur
Les Sadducéens qui tendent un piège à
Jésus sont membres de lélite des prêtres
de Jérusalem. Ce sont les matérialistes du temps.
Très sûrs deux-mêmes, ils contestent les
efforts des Juifs pour garantir leur descendance. Ils se moquent
de la conception de « la vie comme bénédiction
», qui obligeait une famille à des efforts légaux
pour que la lignée dun croyant juif se continue. À
lépoque de Jésus, les Sadducéens rejetaient
ce qui semblait alors une nouveauté : la foi en une résurrection.
Voilà pourquoi Jésus, dans sa réponse, les
fait remonter bien au-delà de lépoque récente
où les sept frères de la première lecture ont
été massacrés (lépoque des Maccabées)
: Jésus les entraîne jusquaux origines les plus
lointaines du peuple juif.
Les contre-exemples utilisés par Jésus
se nomment Abraham, Isaac, Jacob, trois patriarches qui ont construit
la nation malgré la stérilité de leurs épouses.
Chacun des « fils de limpossible » a donné
naissance à un autre fils de limpossible. Bref, ils
ont reçu leur fécondité de Dieu lui-même.
Cest en rappelant la mémoire de ces trois ancêtres
du peuple juif que Dieu se fera connaître à Moïse
: il est le Dieu de la vie plus forte que tous les obstacles.
Enfin, les anges de la Bible sont les messagers de
la présence de Dieu qui intervient dans le cours des événements.
Dire des enfants du monde quils deviennent comme des anges
revient à dire quils ont un contact direct avec Dieu
et quils collaborent directement aux projets de Dieu.
Un évangile
foisonnant despérance
Trois éléments vont nous aider à
apprécier le message actuel de la Parole de Dieu.
Dabord, examinons la déclaration de Jésus
sur le mariage. En dépassant le point de vue étroit
des Sadducéens, Jésus annonce un autre type de relation
dans la vie éternelle. Ce nest plus en voulant résoudre
soi-même le problème de descendance par des mariages
répétés, afin dassurer une descendance
au moins légale, que la vie va continuer. Cest en faisant
le pari suprême de la recevoir de la part de Dieu. Jésus
parle dune vie totalement renouvelée, dune renaissance
(donc plus quune survie!) qui permet un contact de qualité
supérieure avec Dieu. La relation est vraiment positive,
puisquil sagit dun contact de fils, dhéritiers,
contact semblable à celui dont jouissent déjà
les messagers privilégiés de Dieu, les anges.
Ensuite, examinons le nom donné à Dieu
par Jésus : Dieu nest pas le Dieu des morts, mais des
vivants. Dieu est le protecteur des pères, des ancêtres
de la nation juive, qui ne sont certainement pas en perdition, mais
qui sont au contraire protégés par Dieu au-delà
de toute leur vie aventureuse dans ces pays de sable et de steppe.
Enfin, les derniers mots (en grec) de lextrait
dévangile sont dune riche ambiguïté
: « Tous vivent en effet pour lui » peut signifier «
vivre pour le rejoindre, lui », ou « vivre de lui, au
moyen de lui, grâce à lui... » La vie humaine,
malgré toutes les apparences, nest pas un fouillis
dévénements sans orientation. Tout converge
vers le Dieu de la vie, tout peut conduire vers la rencontre du
Dieu fidèle. Et cette rencontre nest pas laffaire
dun instant; cest une occupation pour la vie, pour la
vie éternelle.
Source: Le Feuillet biblique,
no 2117. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins
autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre
biblique de Montréal.
Chronique
précédente :
Aujourd'hui, le salut pour cette maison
|