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3e dimanche de Carême B - 15 mars 2009

 

 

Le Temple de son Corps

La purification du Temple : Jean 2, 13-25
Autres lectures : Exode 20, 1-17; Psaume 18(19) ; 1 Corinthiens 1, 22-25

La foi est affaire de confiance. Dieu est invisible, intouchable, insaisissable. Comment entrer en relation avec Lui? Nous avons besoin d’intermédiaires fiables. Un prêtre, un temple, un livre sacré : autant de signes qui nous interpellent au nom de Dieu. Cependant, un danger nous guette constamment : celui de vouloir posséder ou contrôler les signes de Dieu. Un signe divin dont nous cherchons à nous emparer pour calmer nos insécurités, cela s’appelle une idole. Si la foi est affaire de confiance, elle a besoin à tout prix de signes, mais gare à la tentation de les transformer en idoles!

Le signe du Temple

En Israël, le signe le plus palpable de la présence et de la protection accordée par Yahvé à son peuple, c’était le Temple de Jérusalem. Yahvé est le véritable roi d’Israël et le Temple est son palais. Au centre de ce magnifique palais, dans l’enceinte appelée le « Saint des saints », trône le Seigneur Yahvé, qui dirige la destinée de ses sujets. En allant prier au Temple, les Juifs allaient invoquer les bonnes grâces du Seigneur de Jérusalem.

Parfaitement conscient du danger des idoles, ou fausses représentations de la divinité que l’on peut se faire, Israël n’avait aucune statue de Yahvé trônant au Temple de Jérusalem. Le « Saint des saints » n’était meublé que de l’Arche de l’Alliance, un coffret où avaient été déposées les tables de la Loi données à Moïse sur le mont Sinaï. Ce coffret qu’était l’Arche faisait office de tabouret ou de marchepied. Yahvé – que l’on ne voyait pas et que l’on ne représentait pas – devait avoir les pieds solidement posés sur ce tabernacle. Le lieu le plus saint en tout Israël était donc ce signe du contrat solennel passé entre Dieu et son peuple.

Au temps où Jésus foula le sol du Temple de Jérusalem, celui-ci avait été détruit par les Babyloniens, puis rebâti par les Juifs au retour de leur exil. L’Arche de l’Alliance avait été perdue, mais le « Saint des saints » symbolisait toujours le lieu où siégeait Yahvé en vertu de l’Alliance passée entre lui et Israël.

La déviation du signe

Jésus entre dans l’enceinte du Temple et constate que le palais de Yahvé est envahi par les marchands qui proposent aux pèlerins tout ce dont ils auraient besoin pour faire des sacrifices en règle : bœufs, brebis, colombes, etc. Il y en a pour tous les budgets! Tous se targuent de respecter les consignes de pureté, comme il convient à des spécialistes du marché religieux. Il y a même des changeurs de monnaie, qui achètent les devises étrangères et vous vendent la monnaie appropriée pour vous procurer ensuite les animaux sans tare à sacrifier.

Jésus est furieux. En voulant contrôler la façon dont les gens ont accès à Dieu, les prêtres ont transformé le signe du Temple en une gigantesque idole qui fonctionne comme un supermarché du sacré. Le prophète de Nazareth renverse tout et chasse au fouet ceux qui ont fait de la maison de Dieu une maison de trafic. En s’attaquant à l’institution la plus sacrée d’Israël, Jésus vient de signer son arrêt de mort et il le sait. La véritable pureté ne vient pas du respect de codes liturgiques, mais du respect de la sainteté de Dieu. Si Dieu est le Saint des saints, le Tout-Autre, comment pouvons-nous en faire une marchandise à vendre, fut-ce un office liturgique en bonne et due forme? Jésus veut le dire haut et fort, au prix de sa propre vie.

Le nouveau Temple

Les autorités réagissent somme toute modérément pour l’instant. Elles demandent au prophète enragé un signe divin qu’il est autorisé à agir comme il le fait. Si Dieu conteste la pureté du Temple, il doit avoir fourni à son prophète un moyen d’attester son envoi. Saint Jean met alors les paroles suivantes dans la bouche de Jésus : Détruisez ce Temple et en trois jours je le relèverai (Jean 2,19). Le signe que Yahvé donne pour authentifier la mission de Jésus, c’est qu’il donnera à Israël un nouveau Temple, purifié des souillures de l’ancien. Les prêtres prennent le langage de Jésus à la lettre et se moquent de l’impossibilité de rebâtir un Temple digne de Yahvé en seulement trois jours.
Saint Jean se fait alors l’interprète des propos de son personnage et nous explique qu’il s’agit en fait du corps de Jésus. En ressuscitant le troisième jour, Jésus offre au monde son corps spirituel comme nouveau Temple où rencontrer Dieu. Le geste de renverser les tables de change et de chasser les vendeurs est un signe annonçant la destruction de ce Temple de pierre. La parole de Jésus est un autre signe, annonçant cette fois-ci l’érection d’un Temple indestructible et pur : le corps du Christ Ressuscité!

Tu ne feras aucune idole (Exode 20, 4)

Le tout premier des commandements transmis par Yahvé à Moïse sur le mont Sinaï concerne le culte exclusif et sans représentation matérielle de Dieu. Le Seigneur de l’univers ne saurait être ramené à une image, à une forme ou à un matériel quelconque. Rien de ce qui a été fait par lui ne peut être utilisé comme signe pour le représenter. Si Dieu est Dieu, Il est au-dessus des idées qu’on s’en fait. Lorsque respecté, cet interdit libère les humains de la tyrannie de l’image. Ce commandement prévient la bêtise de s’asservir à des dogmes ou à des codes rituels, voire même de condamner les autres au nom de nos croyances absolues.

Tout ce que nous tenons mordicus à ce qui soit respecté religieusement par les autres, cela risque de devenir une idole, un signe corrompu parce qu’aliénant.      

Alors que les Juifs réclament les signes du Messie... (1 Corinthiens 1, 22)

Saint Paul nous aide à dépasser notre tendance naturelle à l’idolâtrie en nous invitant à une réflexion sur la croix. Cet instrument romain de torture, scandale pour les Juifs, folie pour les Nations ! Pouvait-il être signe de l’amour de Dieu? Pas en lui-même, pas plus en tout cas qu’une potence ou qu’une chaise électrique. C’est parce que Jésus y a donné sa vie pour nous que la croix est devenue pour nous signe de notre salut. La croix nous renvoie à l’événement, tout comme l’Arche renvoyait les Juifs à l’Alliance avec Yahvé. En elle-même, l’Arche n’était qu’un coffret contenant deux tables en pierre.

Il nous faut veiller à ce qu’églises, chapelets, tabernacles demeurent des signes, nous renvoyant aux merveilles réalisées par Dieu, au lieu d’être pris pour des objets sacrés à traiter avec le respect dû au divin, sans quoi ils seront devenus tout simplement des idoles. 

 

Source: Le Feuillet biblique, no 2178. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

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