L'agapè de Dieu au cœur de l'existence chrétienne
L'image de la vigne et des branches : Jean 15, 9-17
Autres lectures : Actes 10,25-26.34-35.44-48; Psaume 97(98) ; 1 Jean 4, 7-10
Comment peut-on définir Dieu? Poser la question, c’est dire que Dieu ne s’enferme pas dans une formule. Personne d’ailleurs ne saurait circonscrire son mystère. L’évangéliste Jean parle de Dieu avec des métaphores: Dieu est Esprit -souffle-, Dieu est Lumière, Dieu est Amour. Dans le discours d’adieu de Jésus au soir de la Cène, le théologien inspiré et grand connaisseur de l’expérience spirituelle croyante, insiste sur l’agapè de Dieu manifestée en Jésus. L’amour du Père vers Jésus est reçu et, dans un deuxième temps, offert aux disciples-croyants qui, dans un même mouvement, sont invités à accueillir ce don précieux et à en rayonner.
Avant d’évoquer l’amour de Dieu, ne faut-il pas prendre en compte que ce mot est, aujourd’hui, souvent galvaudé dans les messages publicitaires, les chansons et les médias? Ne faut-il pas aussi constater que si, dans un milieu jadis sociologiquement catholique, le fait de connaître ce qui résume l’essentiel du message chrétien, l’amour de Dieu et l’amour d’autrui, ne garantit pas que cet amour soit authentiquement vécu.
Dieu même est amour
« L’amour est tout qui est Dieu même » : cette expression se retrouve comme réponse à l’office de Vêpres de la fête de saint Bernard. L’hymne du Mercredi 1 de la Liturgie des Heures, chante ainsi Dieu : Ô Toi l’au-delà de tout, n’est-ce pas là tout ce que l’on peut chanter de toi. Quelle hymne te dira, quel langage? Aucun mot ne t’exprime...Seul, tu es indicible... Tu as tous les noms, et comment te nommerai-je, toi le seul qu’on ne peut nommer.
Comment donc nommer et connaître Dieu? Les écrits sacrés dévoilent que Dieu Père est essentiellement pur don, amour, pardon, compassion, tendresse, miséricorde. En son Fils Jésus qui se fait l‘un de nous, il est possible d’approcher le mystère de Dieu. Au cours de son ministère, de rencontre en rencontre, que fait Jésus sinon attester l’amour du Père. On n’approfondira et on ne goûtera jamais assez cet échange d’amour suprême que Dieu partage fondamentalement avec son Fils. On ne contemplera jamais assez le Père qui aime divinement Jésus et celui-ci qui lui rend un amour égal et total. Cette relation unique fonde l’amour de Jésus pour ses disciples (vv. 9-10), et cet amour incarné devient le modèle qui inspire l’attitude des chrétiens entre eux. Définitivement, si le croyant demeure dans l’amour du Fils, il demeure dans l’amour du Père.
Aimer de l’amour même de Dieu
Si vous êtes fidèles à mes commandements, vous demeurez dans mon amour... Mon commandement le voici : Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés (vv. 10.12). L’invitation se veut insistante. Aimer de l’amour même de Dieu, c’est aimer comme le Fils, jusqu‘au bout, jusqu‘à l‘extrême. Et quelle est la condition? Celle de garder le commandement de l’amour de la même manière que le Fils a gardé les commandements de son Père. À ce moment, et à ce moment uniquement, les disciples ne seront plus serviteurs, mais ses amis (v. 15).
Dans cette relation salvifique, cette alliance, le croyant doit se souvenir que l’agapè, à laquelle les chrétiens sont invités, a son origine en Dieu qui rend capable d’aimer sans réserve. Aussi, c’est le Christ qui les a choisis : Ce n’est pas vous qui m’avez choisi, c’est moi qui vous ai choisis... (v. 16). C’est le Christ qui en premier aime ses disciples : Comme le Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés (v. 9). La croix qui s’élèvera manifestera la primauté de l’amour infini, et dévoilera jusqu’où va Jésus dans l’obéissance au commandement de l’amour. Là, nous découvrons que le Père et le Fils n’établissent pas de distinction entre les humains (Actes 10, 34) et que l’amour divin sans condition, qui est premier, ne découle jamais de la valeur de nos actes et de nos mérites.
L’amour du Christ Jésus dans l’amour mutuel
À quelle profondeur nos relations avec ceux que nous rencontrons peuvent-elles se vivre? Peut-on les réduire à une simple et généreuse solidarité ou encore à une philanthropie remarquable? Jean l’évangéliste nous situe à la hauteur de Dieu, où nous sommes reliés à l’amour du Père pour son Fils.
Et quels sont les fruits de l’amour de Dieu offert et reçu? C’est l’amour des frères et sœurs en humanité. Peu importe leur race, leur culture, leurs limites. Un autre fruit est la fidélité au commandement qui, au temps de la communauté johannique, est vécue au cœur des contrariétés, des oppositions, voire des persécutions. À l’époque même de Jésus, les disciples ne se montrèrent-ils pas souvent incrédules? Aussi, un dernier fruit à mentionner est la joie contagieuse : Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous, et que vous soyez comblés de joie (v. 11).
L’étonnement des premiers chrétiens
Actes 10, 25-26.34-35.44-48
Un événement inédit qui constitue même un tournant majeur se passe dans les premiers temps de la communauté chrétienne. Un centurion romain vient vers Pierre alors que celui-ci se rend à Césarée. Les deux hommes, l’un témoin du Ressuscité, l’autre païen mais craignant-Dieu, sont bénéficiaires d’une vision, expression signifiant que les deux hommes se rendent disponibles à l’Esprit. Pierre baptisera le païen en dépassant les lois alimentaires et rituelles qui séparent juifs et païens. Quel grand jour que celui de l’ouverture de l’Église à toutes les nations!
Comment ne pas observer l’émerveillement de Pierre et des chrétiens réunis! Dieu est Dieu des surprises! L’Esprit agit au fond des cœurs et ne cessent d’étonner en créant du neuf au cœur des communautés, comme au cœur de toute vie humaine.
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Le contexte
Le contexte élargi de notre passage d’évangile est celui de la passion de Jésus qui approche. Ses paroles d’adieu (13, 33 - 17, 26) et dont le centre est précisément 15, 1 - 16, 3) se révèlent essentielles et ultimes; elles livrent le cœur de sa vie et de sa mort : il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis (v. 13). Au début du chapitre 15, l’allégorie de la vigne (1-8) fait voir le Christ, la vraie vigne du Père dont nous sommes les sarments. Les versets 9-17, retenus en ce dimanche du temps pascal, apparaissent dès lors comme l’explication de l’image de la vigne. Observons le caractère d’intimité qui se dégage du texte avec l’utilisation du pronom «je» à maintes reprises.
Source: Le Feuillet biblique, no 2187. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins
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Une demeure pleine d'intimité
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