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Ascension du Seigneur C - 16 mai 2010

 

 

Une mission à poursuivre

Dernières instructions de Jésus : Luc 24, 46-53
Autres lectures : Actes 1, 1-11; Psaume 46(47); Hébreux 9, 24-28 ; 10,19-33

 

Luc possède un réel talent d’écrivain. Entre autres, il sait composer des scènes qui se fixent dans la mémoire des lecteurs. Il peut visualiser des événements qui sont de l’ordre du mystère; qu’on pense, par exemple, à l’annonce de la naissance de Jésus (Lc 1, 26-38). La dernière manifestation de Jésus à ses disciples après sa résurrection entre dans cette catégorie de récits à fort contenu théologique (Lc 24, 30-31; Ac 1, 9-11).

     À l’arrière fond, on trouve une référence à un autre épisode bien connu, celui de l’enlèvement d’Élie (2 Rois 2, 1-13). Le premier point de contact est l’emploi du verbe enlever (Ac 1,2.11.22; cf. 2 R 1, 9.10.11.12). Plus important est le fait, noté par Luc, que les disciples le virent s’élever … (Ac 1,9). On y reconnait le rappel de l’expérience d’Élisée qui a vu Élie enlevé au ciel (cf. 2 R 1, 11.12). Il avait demandé à son maître : Que me revienne une double part de ton esprit (2 R 1,9), c’est-à-dire la part du fils ainé dans l’héritage de son père. Élie lui répond que cela se réalisera s’il peut le voir pendant qu’il sera enlevé d’auprès de lui (2 R 1, 10). Puisque les disciples de Jésus peuvent tous le  voir au moment de son ascension ils seront tous héritiers de son Esprit. Le départ de Jésus est déjà la promesse de la Pentecôte.

Vous allez recevoir une force (Ac 1,8 cf. Lc 24,49)

     Le film La guerre des étoiles a rendu célèbre la formule : Que la force soit avec toi. Je ne sais pas où l’auteur des dialogues du film a puisé son inspiration mais il est indéniable qu’il utilise un langage qui rejoint celui de la Bible. 

     La force est un attribut de Dieu dans toutes les religions. Mais dans l’univers biblique la force de Dieu n’est pas une énergie incontrôlée : En lui résident Sagesse et Puissance, à lui le conseil et le discernement (Job 12, 13). Cette puissance s’exerce en vue du salut : Yahvé, mon Seigneur, force de mon salut (Ps 140, 8. Voir aussi, par exemple : Hébreux 3, 19; Judith 9,14).

     Au début de sa vie publique, après son séjour au désert, Jésus retourna en Galilée avec la puissance de l’Esprit Saint (Lc 4, 14 cf. Ac 10, 38). Le même Esprit qui a guidé Jésus dans l’accomplissement de sa mission viendra maintenant sur ses disciples.

     Jésus fait explicitement ce lien : Vous allez recevoir une force, celle du Saint-Esprit qui viendra sur vous (Ac 1,8), appelée, dans l’évangile, une force venue d’en haut (Lc 24, 49). Il s’agit de l’accomplissement d’une promesse du Père (voir aussi Ac 1,4). On peut rappeler l’engagement du Père à donner l’Esprit Saint à ceux qui le lui demandent (Lc 11,13). On pense aussi à des textes comme Joël 3, 1-5 cité par Pierre dans son discours de la Pentecôte (Ac 2, 17-21).

     La réalisation de cette promesse est liée au fait, pour les apôtres, de demeurer à Jérusalem  (Ac 1,4 cf. Lc 24, 49).Pour Luc, il existe une géographie du salut comme il y a une histoire du salut. Jérusalem est le centre de l’univers; c’est là que se sont déroulés les événements les plus importants de l’histoire : la mort et la résurrection de Jésus (cf. Lc 13, 33). C’est de là que la Bonne Nouvelle doit maintenant rayonner à travers le monde. Les chrétiens ont gardé jusqu’à maintenant un attachement spécial à Jérusalem parce qu’elle est le lieu choisi par Dieu pour accomplir une fois pour toutes sa promesse de salut. 

Vous serez mes témoins

     Voilà l’affirmation centrale des deux récits : l’Esprit Saint est donné aux disciples pour faire d’eux des témoins. Les apôtres vont prendre au sérieux cette responsabilité. À plusieurs reprises Pierre affirmera, au nom du groupe : nous en sommes témoins (Ac 2, 32; 3, 15; 5, 32; 10, 39).

Il fallait que s’accomplisse…

     Dans l’évangile Jésus expose le contenu du message dont les apôtres auront à témoigner (Lc 24, 45-47). Le verbe falloir n’exprime pas une fatalité obscure mais l’acceptation par Jésus de sa mission de Serviteur avec ce qu’elle comporte de souffrance. Il l’exprime lui-même en annonçant sa passion (Lc 9, 22; 17, 25) et plus explicitement encore le jeudi saint alors qu’il fait le lien entre ce qui lui arrive et les Écritures (Lc 22, 37).

     La vie et la mort de Jésus n’étaient pas planifiées selon un scénario fixe. En relisant les textes de la première Alliance, il se reconnaît en particulier dans la figure du Serviteur souffrant (Isaïe 52, 13—53,12). La voie de la fidélité qu’il a choisie l’a amené à accepter d’aller jusqu’au bout dans le don de soi. C’est ainsi qu’il accomplit, c’est-à-dire qu’il porte à son plein achèvement ce qui était esquissé dans les textes anciens (cf. Lc 24, 26-27). La passion et la mort ne sont pas un échec ni une erreur tragique mais le passage nécessaire vers la résurrection.

     Car le but du témoignage est la proclamation de la victoire de Jésus. Pierre l’exprime clairement lors du choix de Mathias comme apôtre : Il faut qu’il y en ait un qui devienne avec nous témoin de sa résurrection (Ac 1, 22). La vie publique de Jésus, sa condamnation et sa mort étaient des événements connus. La résurrection se situe dans le domaine de la foi; elle ne peut être annoncée que par des témoins qui consacrent leur vie à cette nouvelle.

     L’annonce pascale débouche nécessairement sur un appel à la conversion (Lc 24, 47), condition nécessaire pour entrer dans la vie nouvelle (Ac 2, 37-39).

… jusqu’aux extrémités de la terre (Ac 1,8)

     À partir de Jérusalem, la Bonne Nouvelle doit atteindre toutes les nations (Lc 24, 47). Jésus avait annoncé son projet de salut universel dès son premier discours, ce qui avait scandalisé les habitants de Nazareth (Lc 4, 23-30). Dans les Actes l’accent est mis sur l’extension géographique de la mission, de Jérusalem jusqu’aux extrémités de la terre (Ac 1, 8).  Ce programme n’a pas été complété durant la première génération de l’histoire chrétienne mais, à la fin de son œuvre, Luc montre Paul annonçant l’Évangile à Rome (Ac 28, 30-31). La mission n’est toujours pas terminée et l’Église doit continuer la tâche confiée par Jésus lors de l’Ascension.

C’est une fois pour toutes … qu’il s’est manifesté (Hébreux 9, 26)

     L’imagerie de l’Épître aux Hébreux est déroutante. Elle suppose une connaissance du Temple de Jérusalem et de la liturgie qui s’y déroulait. De plus elle utilise un mode d’interprétation allégorique dont la clef se trouve au livre de l’Exode : Tu feras tout selon le modèle de la Demeure … que je vais te montrer (Exode 25, 9 cf. Hébreux 8,5). En donnant à Moïse les instructions concernant le sanctuaire à construire Dieu lui montre le Temple modèle dont le Temple terrestre ne peut être qu’une imitation. Ce Temple idéal ne peut être qu’au ciel, la vraie demeure de Dieu. C’est là que le Christ est entré  après s’être offert lui-même en sacrifice. Alors que le grand prêtre devait entrer à chaque année dans le Saint des Saints pour accomplir les rites prévus par la Loi, Jésus, en s’offrant lui-même une fois pour toutes, a réalisé ce qui était préfiguré dans l’Ancienne Alliance. Le grand prêtre juif ressortait du sanctuaire après avoir complété son service; Jésus, lui, est maintenant établi sur la maison de Dieu. Il nous permet de nous approcher de Dieu en toute confiance puisque, en lui, notre humanité est déjà entrée dans le sanctuaire du ciel. Tel est l’objet de notre foi  et le but de notre espérance.

 

Jérôme Longtin, ptre

 

Source: Le Feuillet biblique, no 2230. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

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