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Dimanche de la Sainte-Famille C - 27 décembre 2009

 

 

Ses parents furent stupéfaits

Premières paroles de Jésus au Temple : Luc 2, 41-52
Autres lectures : 1 Samuel 1, 20-22.24-28; Psaume 83(84); 1 Jean 3, 1-2.21-24

 

La fête de la Sainte-Famille trouve ses origines à la fin du 19e siècle. L’Église s’inquiète alors de ce qu’elle considère comme de la décadence morale : le progrès du « naturalisme » en raison des avancées de la science, la percée de l’athéisme et l’autonomie de plus en plus grande du politique et du droit par rapport à l’Église. Certains États se dotent même de législation permettant le mariage civil. On voit de plus en plus aussi de couples composés de catholiques et de non catholiques.

     Il n’en faut pas plus pour inciter les papes à tenter de valoriser la famille comme institution proprement chrétienne, fondée sur l’Évangile. Ainsi, le 26 octobre 1921, le pape Benoît XV institue une fête consacrée spécifiquement à la Sainte-Famille. Sa date est alors située au premier dimanche après l’Épiphanie.

Un déplacement

     Avant la réforme de Vatican II, on lisait chaque année à la fête de la Sainte-Famille le même passage évangélique, à savoir Luc 2, 41-52. Avant l’institution de la fête de la Sainte-Famille, ce même passage était déjà lu au premier dimanche après l’Épiphanie. Il se situait donc dans une continuité. Après la manifestation aux bergers (Noël) puis aux mages (Épiphanie), Jésus se manifestait aux sages, à Jérusalem. En faisant de ce dimanche la fête de la Sainte-Famille, le centre d’attention s’est déplacé. Désormais, on allait célébrer moins la manifestation du Christ au Temple de Jérusalem que la famille de Joseph, Marie et Jésus.

     Avec la réforme du calendrier liturgique à la suite du concile de Vatican II, la fête de la Sainte-Famille s’est retrouvée en plein cœur du temps de Noël. Du point de vue pastoral, on peut y voir un certain intérêt. Noël est une fête étroitement associée à la vie familiale. Traiter un tel thème durant cette période de l’année n’a donc rien d’incongru, bien au contraire. Reste qu’on aborde alors le récit avec un angle spécifique qui ne lui rend peut-être pas justice. Rappelons que le texte porte avant tout sur le Christ qui se révèle comme Fils de Dieu et non sur sa famille humaine.

Un cadre tout simple

     Cela dit, il est toujours possible de réfléchir sur la famille à partir de ce passage sans perdre de vue la question de la manifestation de Jésus. En effet, il est intéressant de noter que l’évangéliste Luc situe cette manifestation dans le cadre d’une scène familiale toute simple. Joseph, Marie et leur enfant participent au pèlerinage annuel, un peu comme nous allons chaque année en visite dans la parenté durant le temps des fêtes. Rien d’extravagant comme événement : c’est presque la routine. Reste que le climat de la fête liturgique constitue sans doute une condition favorable à une forme d’éveil spirituel…

Un dénouement stupéfiant !

     Si le contexte est relativement sobre et pour ainsi dire commun, il en va tout autrement de la manière dont Jésus manifeste son identité profonde. Il disparaît de la vue de ses parents durant trois jours. Lorsqu’ils le retrouvent, il est en train de converser avec des sages au Temple! Jésus vient de bousculer la petite vie tranquille de sa famille : Ses parents furent stupéfaits. Cette scène nous invite à reconnaître que le Seigneur peut se manifester dans toutes les sphères de notre vie, y compris dans notre milieu familial. Et parfois, les effets de sa présence peuvent provoquer de l’étonnement ou de l’incompréhension. Au nom de sa foi, une personne pourra faire des choix ou s’engager en société d’une manière qui troublera la cellule familiale.

     Comment réagir dans une situation semblable ? L’évangéliste Luc propose discrètement la figure de Marie : Sa mère gardait dans son cœur tous ces événements. Cette courte notice comporte un enseignement d’une grande richesse et d’une double portée. Premièrement, l’attitude de Marie est empreinte de sagesse. Elle illustre l’acceptation qu’on ne peut tout saisir et contrôler de ce qui survient dans notre vie, y compris dans notre entourage le plus immédiat. Elle a beau l’avoir porté durant neuf mois, Marie prend conscience que quelque chose de son fils lui échappe. Il en est ainsi non seulement parce qu’il est aussi Fils de Dieu, mais aussi parce qu’il est une être humain à part entière.

     Deuxièmement, Marie a aussi la sagesse de garder dans son cœur ces événements. Elle ne cherche aucunement à les masquer, à s’en débarrasser, à les étouffer. Au contraire, elle leur donne une place privilégiée : « dans son cœur ». Ce qui vient de survenir est loin d’être banal : son enfant a fait une fugue et a répondu à ses parents sur le ton d’un reproche. Il y a là quelque chose de profondément troublant, mais Marie s’y raccroche. Il ne s’agit pas de gratter ses blessures, mais de reconnaître qu’un temps de maturation est souvent nécessaire pour arriver à donner du sens à un événement.

Donné au Seigneur
(1 Samuel 1, 20-22.24-28)

     Le choix du récit de Samuel donné au Seigneur en première lecture s’explique aisément. Tout comme Jésus, Samuel passe de sa famille biologique à la « famille » du Seigneur, à savoir le prêtre Éli. Dans les deux cas, les enfants se retrouvent au temple, celui de Silo pour Samuel et celui de Jérusalem pour Jésus. Celui-ci se distingue de Samuel en ce qu’il manifeste lui-même son appartenance à la maison de son Père. Le futur prophète, pour sa part, se retrouve au service du sanctuaire de Silo en raison d’un choix de sa mère.

Avec assurance devant Dieu
(1 Jean 3, 1-2.21-24)

     L’auteur de la deuxième lecture invite ses destinataires à se reconnaître comme membres d’une même famille. Ils sont, en effet, appelés enfants de Dieu. Deux détails dans le verset 21 permettent de faire un lien avec la lecture évangélique : Si notre cœur ne nous accuse pas, nous nous tenons avec assurance devant Dieu. L’évangéliste Luc conclut son récit en précisant d’abord que Marie gardait dans son cœur tous ces événements. Puis il ajoute que Jésus grandissait […] sous le regard de Dieu (v. 52). Rechercher la paix du cœur, comme Marie, n’est-ce pas grandir aux yeux du Père, à la manière de Jésus ?

 

Jean Grou, bibliste

 

Source: Le Feuillet biblique, no 2210. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

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Par Marie, Dieu vient à la rencontre de son peuple