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Ascension du Seigneur A - 5 juin 2011

 

 

Le Christ, de proche et de loin

L'envoi en mission : Matthieu 28, 16-20
Autres lectures : Actes 1, 1-11; Ps 46(47); Éphésiens 1, 17-23

 

Le Christ ressuscité est-il proche ou loin de nous? Par principe, beaucoup répondront : « proche », car qui voudrait accuser le Christ de nous avoir abandonnés? Mais force est de reconnaître que nous vivons une toute autre réalité que celle des apôtres, même des apôtres au lendemain de Pâques. Cette différence qualitative du mode de présence du Christ au monde est exprimée par la foi en l’Ascension du Ressuscité au ciel. La première lecture nous dit que Jésus fut enlevé au ciel (Actes 1,2.9-10). La deuxième lecture affirme que Dieu l’a fait asseoir à sa droite dans les cieux (Éphésiens 1,20). Pourtant, l’Évangile selon Matthieu se termine par cette promesse : Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde (Matthieu 28,20). Alors qu’en est-il? Le Christ est-il finalement proche ou loin de nous?

L’Ascension dans ses versions

     Nous devons le récit de l’Ascension du Christ à saint Luc, qui raconte cet événement à la fin du troisième évangile (Luc 24,44-53) et le rappelle au début du livre des Actes des apôtres (Actes 1,1-11). Saint Jean fait une allusion au fait qu’après sa résurrection, Jésus doit monter vers le Père (Jean 20,17), mais il ne raconte pas cette Ascension. Saint Marc termine son évangile devant le tombeau vide (Marc 16,8); un éditeur après lui a mentionné l’Ascension, probablement après avoir lu Luc (Marc 16,19 : les plus anciens manuscrits ne contiennent pas les versets 9-20 du dernier chapitre, qui semblent constituer un résumé de ce qu’on lit dans les autres évangiles). Saint Paul affirme que le Christ est aux cieux, d’où il viendra au jour de sa Parousie glorieuse (1 Thessaloniciens 1,10; 4,16). L’auteur de l’Épître aux Hébreux déclare que le Fils s’est assis à la droite de la Majesté divine dans les hauteurs, après avoir accompli la purification des péchés (Hébreux 1,3). Même si le récit de l’Ascension nous vient de saint Luc, la conviction de l’Ascension du Christ est présente dans plusieurs traditions du Nouveau Testament et fait partie ainsi des toutes premières ébauches de la foi chrétienne.

     Saint Matthieu aussi partage cette conviction que le Fils de l’homme viendra sur les nuées du ciel au jour du jugement universel (Matthieu 24,30; 25,31). Mais à la différence de Luc, Matthieu ne termine pas son évangile en racontant l’Ascension du Christ. Surpris? Relisez l’Évangile d’aujourd’hui (Matthieu 28,16-20). Cherchez le verset où Matthieu décrit le Christ en train de monter au ciel… Les onze disciples ont rendez-vous avec le Ressuscité sur une montagne en Galilée (Matthieu 28,16). Les disciples voient le Ressuscité et se prosternent devant lui, même si certains ont des doutes (Matthieu 28,17). Puis au lieu de s’éloigner d’eux et d’être emporté dans les nuées vers le ciel, Jésus s’approche d’eux (Matthieu 28,18), les charge de la mission d’évangéliser (Matthieu 28,19-20), puis leur promet de ne jamais les quitter, jusqu’à la fin du monde (Matthieu 28,20). Qu’est-ce à dire?

Le Christ partage la souveraineté de Dieu

     Les différents auteurs du Nouveau Testament sont persuadés que, Ressuscité d’entre les morts, Christ ne meurt plus et n’est plus de ce monde, en quelque sorte. Vivant désormais de la vie divine, Christ est passé de ce monde vers Dieu. Mais ils sont persuadés aussi que Dieu a investi Jésus des pouvoirs divins pour régner, juger et sauver le monde. Jésus n’est pas seulement vivant dans l’au-delà, il est assis à la droite de Dieu pour le seconder dans son rôle de diriger la destinée du monde. Désormais, le plan de Dieu est confié à son Messie, qui du haut du ciel doit régner jusqu’à vaincre définitivement toute opposition à la royauté de Dieu (1 Corinthiens 15, 24-28). Parce que le Ressuscité a un rôle important à jouer, il monte au ciel s’asseoir à la droite de Dieu. C’est le mystère de l’Ascension. De par sa proximité avec le Père céleste, le Christ dispose du pouvoir d’intervenir dans les affaires de ce monde et de diriger son Église. Tout pouvoir m’a été donné au ciel et sur la terre (Matthieu 28,18).

     Or, cette position avantageuse comporte le désavantage d’éloigner physiquement le maître de ses disciples. Au moment même où on s’attendrait à voir le Christ glorieux s’éloigner d’eux dans les nuées du ciel, Matthieu raconte en lieu et place que le Seigneur s’est approché d’eux et qu’il leur a promis sa présence indéfectible au cours des âges. Alors que certains ont des doutes (Matthieu 28,17), Matthieu est catégorique : Jésus demeure à jamais l’Emmanuel, « Dieu-avec-nous », jusqu’à la fin des âges. Si le Christ Ressuscité a reçu tout pouvoir au ciel et sur la terre, il n’exerce pas ce pouvoir du haut d’un lointain trône céleste, mais bien logé au cœur de notre réalité quotidienne, à  tous les jours (Matthieu 28,18), plus proche de nous que nous n’oserions le demander, bien qu’invisible à nos yeux de chair. C’est le mystère de l’Ascension selon Matthieu, une Ascension qui élève l’humble maître de Nazareth, sans l’éloigner le moindrement de ses disciples.

Le départ de Jésus et la mission des apôtres (Actes 1, 1-11)

«…jusqu’au jour où il fut enlevé au ciel » (Ac 1,2)

     Dans la version de saint Luc, bien connue de tous, le Christ disparaît dans une nuée, sous le regard ébahi des disciples (Actes 1,9). Ce départ est en vue de l’envoi de la force d’en haut, l’Esprit Saint qui doit descendre sur les disciples et les assister dans leur mission. La distance physique est nécessaire pour l’envoi des renforts! Aux disciples qui fixent le ciel, les figures angéliques rappellent que le Christ reviendra un jour, mais que rien ne sert de rester là à regarder vers le ciel. Dans la perspective de Luc, l’Ascension du Christ crée l’espace nécessaire pour l’œuvre missionnaire des disciples; le départ du Seigneur inaugure le temps où l’Église doit annoncer son retour.

La glorification du Christ (Éphésiens 1, 17-23)    

« Il l’a fait asseoir à sa droite dans les cieux » (Éphésiens 1,20)

     Selon la tradition paulinienne développée par l’Épître aux Éphésiens, la figure du Christ assis à la droite de Dieu sert à rassurer les croyants. Établi au-dessus de toutes les puissances qui pourraient nous dominer, le Christ nous protège même des forces invisibles, aussi bien dans le monde présent que dans le monde à venir (Éphésiens 1,21). Les croyants peuvent ainsi vaquer à leurs occupations et remplir leur mission dans le monde, sans craindre la défaite. De proche ou de loin, le Christ vainqueur de la mort nous assiste, nous guide et nous protège.

 

Rodolfo Felices Luna, bibliste

 

Source: Le Feuillet biblique, no 2276. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

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