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2e dimanche de Carême A - 20 mars 2011

 

 

Relevez-vous et n'ayez pas peur!

La Transfiguration de Jésus : Matthieu 17, 1-9
Autres lectures : Genèse 12, 1-4a; Psaume 32(33); 2 Timothée 1, 8b-10

 

Depuis dix jours déjà, nous sommes entrés en Carême. Depuis le Mercredi des Cendres, nous cheminons vers Pâques en nous efforçant de suivre Jésus de près. Ce faisant, nous voulons suivre le Christ jusqu’à la croix et, par delà la mort, nous voulons entrer avec lui dans la vie éternelle. Dans les deux premières étapes de notre marche vers Pâques, l’évangéliste Matthieu est notre guide. Dimanche dernier, Matthieu nous a montré comment Jésus, après son baptême, fut conduit au désert par l’Esprit pour être tenté par le démon (Mt 4,1). Ce dimanche, Jésus prend avec lui Pierre, Jacques et Jean son frère, et il les emmène à l’écart, sur une haute montagne (17,1).

     Il est dommage que le Lectionnaire ait coupé le début de ce verset : Six jours après, Jésus prend avec lui Pierre, Jacques et Jean son frère… Six jours après quoi? En relisant le chapitre 16 de l’évangile de Matthieu, nous découvrons qu’une semaine avant la transfiguration, Jésus demandait à ses disciples : “Le Fils de l’homme, qui est-il, d’après ce que disent les hommes ? […] Et vous, que dites-vous ? Pour vous, qui suis-je ?” Prenant la parole, Simon-Pierre déclara : “Tu es le Messie, le Fils du Dieu vivant !”  (16,13.15-16). À partir de ce moment, Jésus le Christ commença à montrer à ses disciples qu’il lui fallait partir pour Jérusalem, souffrir beaucoup de la part des anciens, des chefs des prêtres et des scribes, être tué, et le troisième jour ressusciter. Pierre, le prenant à part, se mit à lui faire de vifs reproches : “Dieu t’en garde, Seigneur ! cela ne t’arrivera pas” (16,21-22). Tous connaissent la réplique de Jésus : Passe derrière moi, Satan, tu es un obstacle sur ma route…  (16,23).

Se laisser prendre par Jésus

     Ce dimanche, comme Pierre, Jacques et Jean son frère, nous nous laissons prendre par Jésus qui nous emmène à l’écart, sur une haute montagne (17,1). Il importe que nous nous mettions dans leurs sandales, que nous comprenions ce qu’il y avait dans leurs cœurs ce jour-là. Comme les premiers disciples, à la suite de Simon-Pierre, nous reconnaissons en Jésus le Messie, le Fils du Dieu vivant. Nous le faisons à chaque eucharistie. Mais, comme les disciples des premières heures, nous avons bien du mal à suivre « le Messie » jusqu’à la croix. Nous avons peine à accepter le chemin du serviteur souffrant par lequel Jésus révèle comment il est « le Fils du Dieu vivant ». Si quelqu’un veut marcher derrière moi, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix et qu’il me suive (16,24). Chemin bien difficile où nous marchons souvent à rebours. D’où l’importance du temps de Carême qui nous est donné pour nous retourner, pour nous convertir et relancer notre marche à la suite du Christ.

     Pour relever ce défi, il importe donc de nous laisser prendre par Jésus, comme l’ont fait Pierre, Jacques et Jean son frère. Jésus nous emmène aujourd’hui avec lui à l’écart. Il nous fait gravir « une haute montagne », lieu symbolique qui rappelle les grandes rencontres entre Dieu et son peuple. Comme Abraham dans la première lecture de ce dimanche, nous sommes invités à un détachement important : Pars de ton pays, laisse ta famille et la maison de ton père, va dans le pays que je te montrerai. […] Abraham partit, comme le Seigneur le lui avait dit  (Gn 12,1.4). Si nous voulons contempler ce pays de bénédiction promis à Abraham, comme lui, comme Pierre, Jacques et Jean, il importe que nous laissions au pied de la montagne nos rêves de grandeur et de gloire. Ce n’est qu’ainsi que nous pourrons suivre Jésus sur cette haute montagne. Ce n’est qu’à ce prix que nous pourrons contempler en lui « le Messie, le Fils du Dieu vivant ».

Le visage de Jésus révélé

     Matthieu nous raconte comment Jésus fut transfiguré devant eux ; son visage devint brillant comme le soleil, et ses vêtements, blancs comme la lumière (17,2). Dans la Bible, le visage est reflet de l’identité profonde d’une personne. « Car le visage est le miroir du cœur » (Vocabulaire de théologie biblique, col. 429). L’image du vêtement est traditionnellement utilisée pour signifier la réalité profonde de l’homme (note de la TOB en Ap 3,4). Pensons à cette femme « souffrant d’hémorragies depuis douze ans [qui] s’approcha [de Jésus] par derrière et toucha la frange de son vêtement. Car elle se disait en elle-même : “Si je parviens seulement à toucher son vêtement, je serai sauvée” (Mt 9,20-21). Pensons aussi aux gens de Génésareth qui suppliaient [Jésus] de leur laisser seulement toucher la frange de son manteau, et tous ceux qui la touchèrent furent sauvés (14,36). Ainsi Pierre, qui avait déjà reconnu l’identité de Jésus comme le Messie, le Fils du Dieu vivant, contemple maintenant avec Jacques et Jean le véritable visage de Jésus. Celui qui m’a vu a vu le Père (Jn 14,9) !

     Voici que leur apparurent Moïse et Élie, qui s’entretenaient avec lui (Mt 17,3). Cet entretien symbolise la recherche de la volonté de Dieu en lien avec les Écritures. En relisant l’Ancien Testament à la lumière de la vie, de la mort et de la résurrection de Jésus, les disciples pourront accepter que « le Messie, le Fils du Dieu vivant » doivent passer par la mort pour entrer dans la vie éternelle. N’est-ce pas ce parcours que suivront les disciples d’Emmaüs? Et, en partant de Moïse et de tous les Prophètes, il leur expliqua, dans toute l’Écriture, ce qui le concernait (Lc 24,27).

La croix sur le chemin

     Mais Pierre, Jacques et Jean n’en sont pas encore là. D’où l’intervention de Pierre : Seigneur, il est heureux que nous soyons ici ! Si tu le veux, je vais dresser ici trois tentes, une pour toi, une pour Moïse et une pour Élie (Mt 17, 4). Contrairement à Marc et à Luc, Matthieu ne précise pas que Pierre ne savait pas ce qu’il disait (Lc 9,33; voir Mc 9,6). Il raconte immédiatement l’arrivée de la nuée qu’il est le seul à qualifier de « lumineuse » (Mt 17,5). La voix de la nuée répète ce que la voix venue des cieux avait proclamé lors du baptême de Jésus : Celui-ci est mon Fils bien-aimé ; en lui j’ai mis tout mon amour (3,17). Elle ajoute pourtant : Écoutez-le ! (17,5). Chez Matthieu, donc, la transfiguration est surtout un signe donné aux disciples pour qu’ils puissent accepter que la révélation de Jésus comme Messie et Fils de Dieu passe nécessairement par la croix.

     Il est consolant de constater que Dieu n’abandonne pas les disciples à leur manque de foi. D’autant plus que, comme eux, nous avons peine à écouter Jésus quand il déclare : Celui qui veut sauver sa vie la perdra, mais qui perd sa vie à cause de moi la gardera (16, 25). Or la délicatesse de Dieu ne s’arrête pas là. Matthieu continue : Jésus s’approcha, les toucha et leur dit : “Relevez-vous et n’ayez pas peur !”  (17,7). À notre tour, laissons Jésus se faire proche de nous. Laissons-nous toucher par lui pour qu’il nous relève au moment où notre foi est mise à rude épreuve. Ainsi nous pourrons reprendre notre route de carême. Ainsi nous pourrons prendre notre part de souffrance pour l’annonce de l’Évangile (2 Tm 1,8).

 

Yvan Mathieu, SM

 

Source: Le Feuillet biblique, no 2265. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

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Gare au mal qui approche