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1er dimanche de Carême B - 26 février 2012

 

 

Quarante jours au désert

Baptême et tentation de Jésus : Marc 1, 12-15
Autres lectures : Genèse 9, 8-15; Psaume 24(25); 1 Pierre 3, 18-22

 

Dans l’histoire de l’Église l’évolution du carême s’est faite parallèlement à celle du temps pascal : une période de préparation de cinquante jours, commençant le septième dimanche avant Pâques – dimanche appelé autrefois quinquagésime – et une période de réjouissance de cinquante jours se terminant avec la Pentecôte; le jour même de Pâques se situant au point de rencontre des deux séries de sept semaines. Ce n’est que plus tard que le temps de préparation fut réduit de cinquante à quarante jours en mémoire du séjour de Jésus au désert au début de sa vie publique (cf. Mc 1, 13). Si on fait le total des jours de carême tel qu’on le connait aujourd’hui on arrive à 46 (6 semaines complètes plus les 4 jours à partir du mercredi des cendres). Cette anomalie apparente vient du fait qu’on ne jeûne pas le dimanche, donc les 6 dimanches de Carême ne sont pas comptés dans le total des 40 jours.

L’Esprit le pousse au désert (v. 12)

     L’évangile de ce dimanche comporte deux tableaux bien distincts (vv. 12-13 et vv. 14-15). Le premier fait suite immédiatement au récit du baptême de Jésus (Mc 1, 9-11). L’Esprit qui est descendu sur Jésus le pousse au désert. L’évangéliste ne précise pas de quel désert il s’agit; le désert est le lieu où Israël a vécu une période d’intimité spéciale avec Dieu (cf. Jr 2,2) alors qu’il devait compter uniquement sur sa Providence pour assurer sa survie (cf. Jr 2, 6). L’endroit où Jésus se retire importe peu, ce qui compte c’est l’expérience spirituelle qu’il y connait. Remarquons que Marc ne parle pas de jeûne à l’occasion de cette retraite de Jésus. Évidemment, dans n’importe quel désert du monde, les conditions de vie sont toujours difficiles et l’auteur ne croit pas nécessaire d’ajouter que Jésus jeûnait. Par contre il mentionne la présence des bêtes sauvages. Ce détail a intrigué plusieurs commentateurs. Il est certain que des animaux vivent même dans les déserts les plus arides et les déserts du Proche Orient sont peuplés d’une faune nombreuse et variée. L’évangile ne précise pas quelles étaient les relations de Jésus avec ces animaux. On peut interpréter ce détail comme une allusion à la création restaurée dans l’harmonie aux temps messianiques d’après le texte d’Isaïe (11, 6-8) : le loup habitera avec l’agneau… (cf. aussi Os 2, 20). Par ailleurs les bêtes sauvages peuvent être aussi une image des forces du mal et de tous les dangers qui menacent l’humanité (cf. Is 30, 6). Leur présence peut être la matérialisation de l’action de Satan qui tente Jésus, c’est-à-dire qui le met à l’épreuve. Le désert devient le lieu de confrontation entre le Fils bien-aimé (cf. Mc 1,11) et le Mal qu’il est venu combattre. Le service des anges manifeste que Dieu n’abandonne pas son Fils et qu’il le soutient dans sa lutte.

Les temps sont accomplis (v. 15)

     L’expression est très proche de celle utilisée par saint Paul : lorsque vint la plénitude des temps… (Ga 4, 2), pour indiquer le moment choisi par Dieu pour envoyer son Fils dans le monde. Pour Marc comme pour Paul l’histoire ne se déroule pas au hasard des événements contingents; elle a un sens, elle est dirigée mystérieusement par Dieu qui choisit d’y intervenir de la manière qu’il veut et au moment qu’il a choisi en fonction de son projet de salut. Pourquoi Dieu a-t-il choisi ce moment précis de l’histoire pour envoyer son Fils habiter le temps des humains? Cela reste pour nous mystérieux; la foi nous dit que cela ne s’est pas produit par hasard mais lorsque les temps furent parvenus à leur plénitude selon le sens premier du mot traduit par accomplir (cf. Tb 14, 5).

Jésus partit pour la Galilée (v. 14).

     Ce deuxième tableau se déroule dans un décor tout différent. Du désert on passe à la Galilée fertile et verdoyante. Marc n’explique pas pourquoi Jésus fait ce choix. Est-ce pour se rapprocher de Nazareth d’où il est venu (cf. Mc 1,9)? Ou pour s’éloigner de l’environnement de Jean Baptiste qui vient d’être arrêté? En effet, si le zèle de ceux qui avaient mis Jean en prison s’étendait à tout son entourage, Jésus risquait d’être compromis lui aussi, ce qui mettrait sa mission en péril.

     Ce déplacement, après la sortie de scène de Jean Baptiste, marque le début de l’activité publique de Jésus. Il annonce la Bonne Nouvelle de Dieu (v. 14). On sait que l’œuvre de Marc s’intitule : Commencement de l’évangile de Jésus Christ, Fils de Dieu (Mc 1,1). Dans la bouche de Jésus, il ne s’agit pas de son message personnel mais de celui de Dieu. On peut penser à des textes de l’Ancien Testament qui emploient des expressions voisines, par exemple : qu’ils sont beaux, sur les montagnes, les pieds … du messager de bonnes nouvelles qui annonce le salut, qui dit à Sion « Ton Dieu règne » (Is 52, 7; cf. aussi Ps 96(95), 2; Is 40, 9; 61, 1). La Bonne Nouvelle de Dieu ne peut être qu’une annonce du salut qui viendra avec l’avènement définitif de son Règne.

Convertissez-vous (v. 15)

     Ce verset 15 est sans doute le meilleur résumé de ce qu’a été la prédication de Jésus. On peut dire que le reste de l’évangile, les paraboles, les récits de miracle, la Passion et la Résurrection sont déjà contenus en germe dans cette annonce. La première partie est une déclaration : Les temps sont accomplis; le règne de Dieu est tout proche. Dieu prend l’initiative de réaliser ses promesses de salut. Son projet va advenir quoi qu’il arrive. La deuxième partie est une exhortation; on passe de l’indicatif à l’impératif. Jésus invite à répondre à l’initiative de Dieu en changeant de vie et en adhérant au message du salut. Parce que le règne de Dieu est tout proche il n’y a pas lieu de remettre la décision à plus tard; c’est tout de suite qu’il faut choisir. C’est ce que feront les premiers appelés dont Marc raconte la vocation dans les versets qui suivent (Mc 1, 16-20).

C’était une image du baptême (1 P 3, 18-22)

     Le raisonnement de Pierre n’est pas facile à suivre. Il repose sur un parallèle entre le déluge et le baptême. Lors du déluge seule la famille de Noé a été sauvée grâce à l’arche. Désormais l’eau du baptême devient source de vie pour tous ceux qui s’engagent envers Dieu avec une conscience droite. Le passage de l’un à l’autre se fait dans la mort et la résurrection de Jésus (v. 18) et dans son élévation dans la gloire (vv. 21-22).

     Presque toutes les religions comportent des rites d’ablution plus ou moins développés; le judaïsme ne fait pas exception et on sait qu’au temps de Jésus ces  purifications avaient pris beaucoup d’importance (cf. Mc 7, 1-5). Pierre souligne que le baptême chrétien est d’un autre ordre : Être baptisé ce n’est pas être purifié de souillures extérieures mais s’engager envers Dieu avec une conscience droite et participer ainsi à la résurrection de Jésus Christ (v. 21).

     Au début du carême la liturgie rappelle le sens fondamental du sacrement. S’engager envers Dieu avec une conscience droite suppose une conversion toujours renouvelée. Participer à la résurrection n’est pas qu’une promesse d’avenir mais une mission actuelle : vivre dans le monde en citoyen du Royaume.

Il n’y aura plus de déluge (Gn 9, 8-15)

     Après le retour de l’exil la communauté juive a du mal à donner sens aux événements qui ont failli l’anéantir; elle doit s’organiser pour un nouvel avenir. La promesse de Dieu de ne plus détruire la création prend tout son sens dans ce contexte. L’Alliance avec l’humanité – représentée par la famille de Noé, les seuls survivants après le déluge – et avec la création est un don gratuit de Dieu qui n’exige aucun engagement de la part de ses partenaires. La grâce sera plus forte que le mal et le péché; Dieu interviendra non pour détruire mais pour sauver.

 

Jérôme Longtin, ptre

 

Source: Le Feuillet biblique, no 2305. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

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Tes péchés sont pardonnés