Qui est notre Défenseur?

La haine du monde pour Jésus et ses disciples : Jean 15, 26-27; 16, 12-15
Autres lectures : Actes 2, 1-11; Psaume 103(104); Galates 5, 16-25

Quel meilleur cadeau pour un gardien de but que d’avoir un défenseur de qualité. Les Canadiens de Montréal en auraient bien besoin. Lorsque P.K. Suban est arrivé avec l’équipe, tout le monde rêvait : non seulement il joue à la défense, mais il est capable de marquer des buts, de préparer des jeux pour ses coéquipiers et distribuer des mises en échec en narguant les adversaires pour les déstabiliser. Avec le temps, on a vu qu’il avait un grand talent certes, mais qu’il était humain et qu’il avait des défauts. Le Défenseur dont parle l’Évangile selon saint Jean n’est évidemment pas dans la même ligue. Essayons de voir qui est ce Défenseur promis par Jésus aux disciples. 

     Ce mystérieux Défenseur qui viendra après Jésus est parfois appelé le Paraclet, le Défenseur ou l’Esprit saint par nos traductions françaises.

     Dans le premier verset de cet extrait de l’évangile, Jésus affirme que ce Défenseur sera envoyé lorsqu’il sera glorifié. Ce Défenseur rendra témoignage du Christ aux disciples pour qu’à leur tour, ils rendent témoignage au monde. On verra que c’est bien ce que le livre des Actes des Apôtres va illustrer lors de la Pentecôte.

Une épreuve : l’exclusion des synagogues

     L’Évangile selon saint Jean mentionne une épreuve : les disciples seront exclus des synagogues et on vous fera périr. Le mot grec pour cette épreuve est skandalon qui dans le langage biblique désigne quelque chose qui met la foi à l’épreuve. Ici, l’évangile fait sans doute allusion à un événement historique. C’est pour aider les disciples dans cette épreuve que Jésus envoie son Défenseur.

     Historiquement, durant les premier et deuxième siècles, les chrétiens d’origine juive continuaient leurs pratiques ancestrales en même temps qu’ils découvraient leur foi chrétienne. Comme le rapporte le livre des Actes des Apôtres, les premiers chrétiens continuaient d’aller au Tempe et de prier les psaumes en plus de se rassembler pour partager le repas du Seigneur en mémoire de Jésus. Mais, assez rapidement, ils ont dû faire un choix. Autour des années 80, les synagogues décident d’exclure ceux qui croient que Jésus est le Christ ¹. L’Évangile johannique a sans doute été rédigé à cette époque puisqu’il porte les marques de ce bouleversement majeur pour la jeune communauté chrétienne. Les premiers lecteurs de l’évangile étaient appelés à choisir : continuer les pratiques juives en affirmant que Jésus n’est pas le Messie, ou abandonner leur religion ancestrale pour se centrer sur les nouveaux liens qui se tissent dans la communauté chrétienne. Le choix était déchirant. On peut facilement s’imaginer une famille divisée sur cette question. La jeune communauté chrétienne avait bien besoin d’un défenseur.

Les persécutions

     En plus, ces premiers chrétiens faisaient l’objet de persécutions. Plus tard, il y aura les persécutions romaines, mais les premières venaient de fanatiques juifs, appelés zélotes, pour qui verser le sang d’un impie était comme offrir un sacrifice à Dieu ². Les lecteurs de Jean vivent cette persécution. Ils ont besoin d’être réconfortés dans l’épreuve. C’est dans ce contexte que l’évangéliste rapporte que Jésus avait dit qu’ils ne seraient pas seuls : par son Esprit, Jésus ressuscité est présent avec eux et prend leur défense.

La Pentecôte selon les Actes des Apôtres

     Le livre des Actes des Apôtres met en récit ce qui était promis par Jésus. Le don de l’Esprit est manifesté par un souffle violent, un bruit du ciel, et des langues de feu. Le résultat : les apôtres se font comprendre par tous dans leurs propres langues. Ils réussissent à témoigner grâce à l’Esprit qui les habite. C’est tout un renversement puisque jusqu’à ce moment ils s’étaient tenus pour ne pas se faire crucifier eux aussi. Ils reçoivent à la foi le courage de proclamer l’Évangile sur la place publique, et les mots pour le dire en parlant directement aux auditeurs dans leurs propres langues. Au-delà de l’aspect merveilleux de cette histoire, symboliquement, on peut retenir que le don des langues évoque la dimension universelle de la mission des apôtres qui sera illustrée par la suite du livre des Actes. En effet, les douze nations énumérées qui entendent le message dans leurs langues symbolisent le monde entier à qui sera annoncé l’Évangile.

De Babel à la Pentecôte

     Pour le lecteur de la Bible, il y a aussi un lien à faire entre le récit de la tour de Babel (Gn 11,1-9) et le récit de la Pentecôte. Le don de l’Esprit de la Pentecôte rétablit l’unité de langage qui avait été perdue lors de la construction de la tour de Babel.

La fête juive de la Pentecôte

L'Esprit est reçu lorsque les apôres sont réunis pour célébrer la Petecôte juive. Qu'est-ce que cette fête? Pentecôte signifie 50 jours. Cette fête est parfois appelée fête de semaines, fête de la moisson ou fête des prémises. Elle marque la fin des 50 jours de la pâque. L'élément caractéristique de cette fête est l'offrande des prémises de la récolte. Par ailleurs, la signification de cette fête évolue dans le temps. Avec le retour de l'Exil, le peuple hébreu changea progressivement la signification de cette fête pour commémorer le don de la Torah au Sinaï. Shavouot est le nom qu'ils donnent à cette fête.

Et aujourd’hui?

     Il y a eu une époque où l’on apprenait par cœur les sept dons de l’Esprit, que l’on codifiait exactement son rôle dans la Sainte Trinité et même qu’on se disputait pour savoir si l’Esprit saint procédait du Père seulement ou du Père et du Fils. Les textes bibliques présentés en ce jour de la Pentecôte ne sont pas centrés sur ces thèmes-là.
L’Évangile selon saint Jean place l’accent sur le Défenseur promis par Jésus qui sera avec les chrétiens lors de leurs difficultés. Des difficultés, il y en a encore beaucoup pour l’Église d’aujourd’hui. Sans faire une liste exhaustive, on pourrait dire qu’elle a des difficultés au niveau de ses finances, de son recrutement pour les ministères, de sa crédibilité dans les médias et dans la fréquentation des sacrements. Pourtant, l’espoir reste au rendez-vous. Tout a commencé avec un groupe d’une douzaine de personnes qui vivaient des persécutions bien pires que les nôtres. Et, grâce à l’Esprit qui leur donnait vie, ils ont littéralement changé le monde! Pour reprendre la métaphore du hockey, c’est à notre tour d’embarquer sur la glace et de le faire sans crainte puisqu’on a le meilleur défenseur avec nous.    

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¹ On applique aux chrétiens la 12e des 18 bénédictions. Cette bénédiction des déviants (birkat-ha-minim) - en fait une malédiction - empêchait les déviants ou « hérétiques » de participer à la vie de la synagogue.

² Une affirmation relayée par le midrash Numeri rabba 21, 4

Source: Le Feuillet biblique, no 2318. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

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