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3e dimanche de l'Avent C - 16 décembre 2012

 

Le chemin du dépassement

La prédication de Jean le Baptiste : Luc 3, 10-18
Autres lectures : Sophonie 3, 14-18a; Psaume (Isaïe 12); Philippiens 4, 4-7

 

On a souvent dit que l’évangile de Luc était l’évangile de la joie du Christ. En effet, le texte de Luc s’ouvre sur un élan de joie : Marie exalte le Seigneur et tressaille de joie en Dieu son Sauveur (Luc 1, 47). Puis les anges annoncent aux bergers une grande joie, joie partagée par tous les peuples (2, 10). Enfin des foules sont dans la joie devant les merveilles accomplies par Jésus (13, 17) sans parler des disciples qui reviennent enchantés et joyeux de leur mission. Mission confiée par leur Maître (10, 17).

L’annonce de Jean le Baptiste

     Après avoir déclaré l’évangile de Luc comme étant marqué du sceau de la joie, d’aucuns objecteront que la prédication de Jean le Baptiste, dont il est question dans le passage de ce dimanche, n’a pas nécessairement des intonations joyeuses. Au contraire, elle peut même nous apparaître austère et sévère. À cet argument je répondrai que les propos de Jean sont quand même une Bonne Nouvelle pour les personnes qui bénéficieront des décisions qui seront prises après la réponse à la question : Que devons-nous faire ? (Luc 3, 10.12.14). Voyons quels seront les impacts sociaux qui découleront de la mise en œuvre des conseils de Jean.

La réalisation de la Bonne Nouvelle

     Les gens de toutes les allégeances religieuses et de toutes les classes sociales venaient recevoir de Jean un baptême de conversion. Et selon ce dernier, cette conversion devait se manifester par des gestes concrets. D’où la question : Que devons-nous faire ? Jean adapte donc sa réponse aux différentes situations. Elle prend en compte le service que ces gens rendent dans la société : bien nantis, fonctionnaires du gouvernement, membres de l’armée. En faveur de ceux qui n’ont ni vêtement ni nourriture, Jean exige des riches, le partage. Pour le bien de ceux qui sont victimes d’usure et d’abus, Jean exige des collecteurs des impôts publics, le respect de la justice. Pour la sécurité de ceux qui bénéficient de la protection militaire, Jean exige des soldats, l’honnêteté dans l’application du droit et surtout de l’accomplir sans partialité et sans violence. La mise en pratique de ces trois exigences a donc pour effet de les transformer en gestes d’amour envers le prochain. Et la joie est au cœur de l’amour.

Une route d’humanité

     Ces gestes donc valent toujours leur pesant d’or car ils rejoignent beaucoup de monde. Leur concrétisation peut même être l’occasion d’un changement de vie radical. Nous l’avons vu d’ailleurs chez des saints comme François d’Assise ou Vincent de Paul pour ne nommer que ceux-là à cause de leur notoriété et de leur influence. Une fois saisis en profondeur, ces trois conseils peuvent également changer le cours de l’existence de personnes ordinaires, comme vous et moi, parce qu’ils ouvrent une route d’humanité au milieu d’un monde où les égoïstes, les abuseurs, les despotes de même acabit font tant de victimes. Cependant une question s’impose à nous aussi comme elle s’imposait aux contemporains de Jean le Baptiste : « Que pouvons-nous faire ici et maintenant ? »

Une décision personnelle

     Combien de prophètes, de prédicateurs, d’éveilleurs de consciences ont voulu nous secouer, nous pousser dans nos retranchements les plus intimes sans pour autant nous faire changer pour la peine. Si quelques-uns ont réussi, ce fut souvent sans lendemain ou encore un feu de paille. Nos vieilles habitudes ont vite pris le dessus. La routine sécurisante a vite repris ses droits. Cela vient prouver que les autres n’ont pas le pouvoir de nous convertir, de nous transformer. Ces mouvements intérieurs relèvent d’une décision personnelle. Le Précurseur le reconnaît lui-même lorsqu’il avance que le témoignage qu’il donne n’est rien par rapport au baptême qui fait plonger dans l’Esprit. L’Esprit, c’est justement cette énergie d’amour qui seule est capable de bouleverser notre propre terreau, de nous atteindre dans nos racines les plus profondes.

Un regard vers l’avenir

     Jean le baptiseur tourne son regard vers l’avenir car « le peuple était en attente » d’un libérateur. Tant et si bien que tous se demandaient si Jean n’était pas celui qui devait venir (v. 15). L’homme, incarnant cet avenir, Jean l’a déjà perçu : il est déjà là. Aussi, affirme-t-il : Il vient, celui qui est plus puissant que moi (v. 16). Jean veut, par ces paroles, dissiper toute ambiguïté et garder intacte la joie de l’attente. Quant à Paul, il ne cesse de redire à ses frères et sœurs combien il désire que ces derniers demeurent toujours dans la joie du Seigneur et qu’ils témoignent d’une sérénité visible et communicative (Ph 4, 5). Et cela toujours pour la même raison : la venue prochaine du Seigneur qui apportera la paix (v. 7).

L’image du Messie

     L’image du Messie, présentée par Jean, était familière et donc connue de son auditoire : celle d’un juge qui, à la fin des temps, viendra séparer le bon grain de la paille. Paille qui subira la destruction par le feu, un feu inextinguible. La même image du feu revient sur les lèvres du Baptiste lorsqu’il décrit le second baptême que ce même Juge, le Messie, administrera dans l’Esprit saint et dans le feu. (v. 16) Vue sous cet angle, l’eau du Jourdain n’est qu’une image provisoire, un simple signe qui renvoie les personnes présentes vers une réalité autrement parlante : celle du Royaume que Jésus viendra instaurer. Jean a une conscience vive de son rôle de précurseur. C’est pourquoi il affirme sans ambages, à propos du Messie, qu’il n’est pas digne de défaire la courroie de ses sandales (v. 16), rôle pourtant réservé aux esclaves.

La grande leçon

     Sans exagérer la portée de ce texte, nous pouvons avancer que ces gens venus interroger Jean sur les bords du Jourdain, n’étaient pas des plus heureux. Ils vivaient dans une inquiétude permanente à cause de leur situation économique et sociale et leur soumission à l'occupant romain. Pourrions-nous en tirer une leçon pour nous, aujourd’hui? Leur questionnement ne pourrait-il pas devenir le nôtre? Si nous ne trouvons pas une joie véritable dans l’accumulation des richesses, est-ce que le partage ne pourrait pas être une solution? Si nous exigeons trop de nos subalternes, de nos enfants, de nos conjoints, est-ce que la tolérance , qui est une forme d'honnêteté relationnelle, ne pourrait pas devenir une grâce pour nous et pour les autres qui nous sont confiés? Si nous sommes partisans de la paix sociale à tout prix, le moyen de la faire advenir ne pourrait-il pas prendre la couleur de la tendresse, de la persuasion, du dialogue? Nos résolutions pourraient alors prendre forme et devenir des gestes fraternels.

La véritable quête

     La route du bonheur, proposée par Jésus dans les évangiles, ne ressemble guère à la quête d’un bien-être individuel. Cette quête, pourtant, séduit un grand nombre de nos contemporains. Elle nous fascine sûrement nous aussi. Cependant, la véritable quête qui apporte la paix intérieure s’accomplit en Celui qui est la Voie, la Vérité et la Vie (Jn 14, 6). Lui seul peut nous mettre en chemin vers un dépassement à la hauteur de notre titre de baptisé.

 

Ghislaine Salvail, SJSH

 

Source: Le Feuillet biblique, no 2338. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

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