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24 e dimanche ordinaire C - 15 septembre 2013

 

Mais, quelle extravagance !

La brebis égarée : Luc 15,1-32
Autres lectures : Exode 32, 7-11.13-14; Psaume 50(51); 1 Timothée 1, 12-17

 

La lecture des évangiles nous conduit à la constatation que par toute sa vie, par son enseignement et, en particulier, par cette forme d’enseignement que sont les paraboles, Jésus est sans cesse occupé à nous révéler l’amour fou de Dieu pour nous. Des 4 évangélistes, Luc est celui qui a davantage utilisé ce langage des images pour nous dire Dieu.  Au seul chapitre 15 de son évangile, il a réuni 3 images merveilleuses pour exprimer l’excessif soin que Dieu prend pour nous chercher, nous trouver, se réjouir de nous avoir trouvé et partager cette joie.

L’extravagance en 3 images

     Ce 24e dimanche ordinaire de l’année C nous place devant un berger, propriétaire de 100 brebis et qui fait l’expérience d’en perdre une 1, devant une ménagère qui possède 10 drachmes et en perd une, devant un père dont le fils cadet décide de quitter définitivement la maison. Qu’y a-t-il de commun dans ces trois histoires?  Une réalité ayant grand prix aux yeux du propriétaire ou du père a été perdue. Ce propriétaire ou ce père est à ce point affecté par la perte expérimentée que ce qui devient essentiel pour lui ou elle, c’est de chercher ce qui est perdu obstinément jusqu’à ce qu’il l’ait trouvé. Suit l’explosion de joie et le besoin de partager la joie avec toutes les personnes qu’on peut réunir 2.  S’il fallait résumer la démarche, on dirait : Expérience d’une perte et détresse; recherche; retrouvailles; joie; partage de la joie dans une fête.

     Les deux premières images, l’une où la personne éprouvée est un homme berger, la seconde où il s’agit d’une femme ménagère, tout à fait à la manière de Luc, semblent là pour nous acheminer progressivement vers le père que le fils cadet a quitté.

Un Père fou d’amour ?

     Le fils cadet correspond parfaitement à celui du jeune tout centré sur sa personne, son plaisir, un souci de recueillir le plus de biens possible et de les faire profiter à sa personne et qui termine son escapade dans une situation de mendicité évoquée par l’image du travail auprès des animaux impies que sont les cochons. C’est le souci de sa propre personne qui l’amène à prendre le chemin du retour à la maison. Contraste entre cette attitude et celle du père qui ne semble vivre que pour ce moment où il verra poindre le fils à l’horizon. L’histoire que Jésus raconte donne à croire que le père n’a qu’un désir : restaurer le fils fautif dans sa dignité de fils (l’anneau au doigt, le plus beau vêtement, les souliers aux pieds). Comme si tout était derrière et qu’il n’y avait de place que pour la joie et la fête : Mon fils que voilà était mort et il est revenu à la vie : il était perdu et il est retrouvé (v. 32).

     Quelle révélation Jésus fait-il de Dieu en ces paraboles?  Dieu est fou d’amour pour nous. Dieu n’accepte pas la logique de mérite dans laquelle le cadet se place : Je ne suis pas digne d’être appelé ton enfant, traite-moi comme ton serviteur (v. 19).

La justice, dans tout cela ?

     Le père n’acceptera pas davantage la logique de mérite du fils aîné. Il a servi toutes ces années, obéissant à tout ordre de son père, mais a-t-il reconnu, goûté, célébré le fait de partager la vie de la maison, d’être toujours en communion avec son père?  Son amour fou pour l’aîné, il l’exprime en sortant à la rencontre de ce fils en colère et en lui rappelant le lien, la relation qui n’a pas de prix.  L’aîné avait dit au Père : Ton fils que voilà et le père, de répondre : Ton frère que voilà (v. 30.32).

     C’est toute la mission, tout le service de Jésus que cette parabole a mis en image. Quand Jésus faisait bon accueil aux publicains et aux pécheurs, quand il mangeait avec eux 3, il incarnait l’amour fou de ce Père qui, voyant poindre son fils à l’horizon, est pris de pitié, accourt vers lui, se jette à son cou et le couvre de baisers. Quand Jésus s’identifie avec tous les perdus de ce monde que nous sommes, chacun(e) à notre façon, en cette incroyable passion, crucifixion et mort, n’est-ce pas le Fils Bien-aimé qui exprime à notre égard ce même amour fou du Père pour les filles et fils cadets mais aussi pour les filles et fils aînés de l’humanité ?

Dieu sensible à l’intercesseur

     La première lecture, tirée du livre de l’Exode (32, 7-14) nous offre, en contraste avec la parabole, le Dieu en colère décidé à punir sévèrement son peuple qui s’est éloigné, mais qui en vient à renoncer à punir les siens lorsque Moïse lui rappelle le souci qu’il s’est donné en libérant ce peuple de l’esclavage d’Égypte et, antérieurement à cet événement libérateur, la promesse qu’Il a faite aux Patriarche d’être avec eux. Peut-on parler d’un pas important vers l’attitude du Père de la parabole ?

En Jésus, Paul reconnaît Dieu

     La seconde lecture a la forme d’un témoignage de Paul (1 Tm 1, 12-17). En Jésus Christ, le Dieu qu’il a rencontré, qui l’a séduit, c’est quelqu’un qui lui a manifesté la plus grande confiance, qui lui a pardonné ses péchés qui lui a fait une grâce très forte, alors que lui ne savait que blasphémer, persécuter, insulter. À son tour, il répond par une foi et un amour du Christ, par une confession que Jésus est venu dans le monde pour sauver les pécheurs, dont il se dit être le premier;  l’évangéliste disait : pour sauver ce qui était perdu, rendre la vie à ce qui était mort.

     Il semble bien s’identifier au cadet de la parabole lorsqu’il ajoute qu’il se voit comme le premier en qui toute la générosité du Christ se manifeste; mais aussi comme le premier exemplaire des personnes qui s’en remettent totalement au Christ pour la vie éternelle.

________________

1 Cette première image utilisée par Jésus pour traduire la passion avec laquelle Dieu est à notre recherche, il n’y a pas que l’évangile de Luc à nous la transmettre. Mt 18, 12-14 nous offre un texte parallèle où il est aussi question de quête obstinée, de retrouvailles, de joie. Mais une merveilleuse déclaration de Jésus conclut sa parabole : « Aussi, on ne veut pas, chez votre Père qui est aux cieux, qu’un seul de ces petits se perde. » Le 4e évangile développe autrement l’image du berger, mettant à l’avant-plan son amour pour chacune de ses brebis, sa connaissance de chacune, son désir d’amener dans son enclos d’autres brebis qui lui appartiennent; et il contraste l’attitude du bon berger avec celle du mercenaire (Jn 10 , 11-16). Les prophètes du premier testament connaissaient la tradition d’appeler bergers les chefs du peuple, les rois. Le texte d’Ez 34 est particulièrement puissant dans sa façon de présenter Dieu-Pasteur comme merveilleux guide de son peuple alors que tant de pasteurs du peuple se sont montrés irresponsables.

2 La joie est un thème qui apparaît dès le début de l’évangile de Luc, avec cette promesse de joie et d’allégresse faite par Gabriel à Zacharie (1, 14) et ce début de la salutation de Gabriel lors de l’Annonciation à Marie (1,  28). Il y a cette joie de Jésus, heureux que son Père ait révélé le mystère aux tout-petits (10, 21) et cette joie des 72 devant ce qu’ils réalisent au nom de Jésus (10, 17-20). Joie de Zachée d’accueillir Jésus dans sa maison (19,  6); joie de la multitude des disciples pour tous les miracles qu’ils ont vus (19, 37). Joie des disciples après l’Ascension de Jésus (24, 52).

3 À noter que l’évangile de Luc comporte des repas de Jésus chez des Pharisiens (7, 36ss11, 37ss14, 1ss). En chaque occasion, un enseignement de Jésus les appelle à une conversion. Et, il y a cette fameuse parabole du pharisien et du publicain (18, 9-14) où l’orgueil du pharisien est condamné et l’humilité du pharisien, louée par Jésus.

 

Lorraine Caza, CND

 

Source: Le Feuillet biblique, no 2369. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

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