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3e dimanche de Pâques A - 4 mai 2014

 

Reconnaître celui qui fait route avec nous!

 

L'apparition aux disciples d'Emmaüs : Luc 24, 13-35
Autres lectures : Actes 2, 14.22b-33; Psaume 15(16); 1 P 1, 17-21


Reprendre la route d’Emmaüs
Le même jour, deux disciples faisaient route vers un village appelé Emmaüs, à deux heures de marche de Jérusalem (v. 13). Pourquoi quittent-ils Jérusalem ? Luc ne nous le dit pas. Nous savons seulement qu’ils parlaient ensemble de tout ce qui s’était passé (v. 14), c’est-à-dire de la Passion de leur maître et de la découverte du tombeau vide. Survient alors un troisième marcheur. Nous savons, nous, qu’il s’agit de Jésus lui-même (v. 15). Mais eux ne le savent pas, car leurs yeux étaient aveuglés, et ils ne le reconnaissaient pas (v. 16). C’est donc dire jusqu’à quel point la résurrection avait transformé Jésus !

     On peut aussi admirer l’approche que Jésus utilise avec ses deux disciples. Elle peut nous servir d’exemple quand nous cherchons à annoncer l’Évangile ou à témoigner de notre foi. Jésus agit en véritable pédagogue. Mieux, il fait preuve d’andragogie avant même que l’expression ait été inventée. Pour pouvoir enseigner quelque chose à un adulte, rien de mieux que de faire route avec lui et d’écouter ce qu’il a à dire avant même de chercher à lui inculquer quoi que ce soit. C’est bien ce que fait Jésus : De quoi causiez-vous donc, tout en marchant ? (v. 17).

Une tristesse qui paralyse

     La question les secoue au point où ils arrêtent de marcher : Ils s'arrêtèrent, tout tristes (v. 17). Cette tristesse, que nous révèle saint Luc, explique sans doute pourquoi les deux disciples avaient décidé de quitter Jérusalem pour retourner chez eux à Emmaüs. Un peu comme les disciples au mont des Oliviers le soir du Jeudi Saint, ils sont endormis à force de tristesse (Lc 22,45) ! Ils n’avaient plus rien à faire à Jérusalem. Ils n’avaient plus rien à faire avec les onze apôtres restés à Jérusalem.

     Luc nous révèle alors le nom d’un des deux disciples : Cléophas (v. 18). Qui était l’autre ? On a suggéré que c’était peut-être son épouse. L’hypothèse est intéressante. Mais, plus important encore, ce disciple anonyme représente chacun et chacune de nous. Nous ressemblons beaucoup à ces deux pèlerins. Nous aussi, nous sommes disciples et depuis fort longtemps. Nous aussi, par le biais de la liturgie des quarante jours du carême, nous sommes montés à Jérusalem avec Jésus. Comme eux, il nous arrive de retourner chez nous, endormis à force de tristesse. La situation dans laquelle se trouve l’Église de chez nous risque parfois d’être source de découragement. Peut-être avons-nous aussi la tentation de tout laisser tomber ! Raison de plus pour écouter la suite.

L’évangile selon Cléophas : une histoire qui finit mal !

     Jésus leur avait demandé de quoi ils parlaient. Ils répondent d’abord en manifestant leur étonnement : Tu es bien le seul de tous ceux qui étaient à Jérusalem à ignorer les événements de ces jours-ci (v. 18). Jésus ne se laisse pas arrêter par ce qui ressemble à un refus de répondre. Il insiste : Quels événements ? (v. 19). Encore une fois, nous pouvons admirer les talents andragogiques de Jésus. Quand nous cherchons à évangéliser, à témoigner de notre foi, nous nous laissons facilement arrêter par un premier refus. Jésus nous enseigne à être persistant et ça marche.

     Cléophas raconte alors sa version des faits, mais c’est une histoire qui finit mal. Bien sûr, Jésus était un prophète puissant par ses actes et ses paroles devant Dieu et devant tout le peuple (v. 19). Mais sa mort sur la croix a mis fin au rêve de ceux et celles qui marchaient à sa suite : Et nous qui espérions qu'il serait le libérateur d'Israël ! Si Cléophas était né chez nous, il aurait ajouté : On s’est bien fait avoir ! 

     Comme si cela n’était pas suffisant, la découverte du tombeau vide est venue jeter encore plus de trouble dans leur cœur. Les femmes revenues du tombeau leur avaient bien annoncé que Jésus était ressuscité. Mais ces propos leur semblèrent délirants, et ils ne les croyaient pas (Lc 24, 11). La course au tombeau de Pierre (24, 12) les avait confirmés dans leur doute : Quelques-uns de nos compagnons sont allés au tombeau, et ils ont trouvé les choses comme les femmes l’avaient dit ; mais lui, ils ne l’ont pas vu (v. 24). Comme tant de nos contemporains à qui nous cherchons à témoigner de notre foi, les disciples d’Emmaüs sont difficiles à convaincre.

Oser donner un coup de tisonnier !

     Jésus a rejoint ses disciples découragés sur la route. Il s’est mis à leur écoute. Il avait devant lui des cœurs endormis de tristesse, où la braise de la foi risquait fort d’être étouffée par les cendres de la mort. Voilà qu’il ose donner un vigoureux coup de tisonnier et qu’il ajoute du bois dans l’âtre du foyer. Il leur dit alors : Vous n’avez donc pas compris ! Comme votre cœur est lent à croire tout ce qu’ont dit les prophètes !Ne fallait-il pas que le Messie souffrît tout cela pour entrer dans sa gloire ? Et, en partant de Moïse et de tous les Prophètes, il leur expliqua, dans toute l’Écriture, ce qui le concernait (v. 25-27).

     Comme les disciples d’Emmaüs, nous avons nous aussi besoin à l’occasion que le Seigneur remue nos cendres pour réveiller les tisons encore brûlants de nos cœurs. La Parole de Dieu nous permettra de laisser rejaillir le feu. Voilà le bois dont nous nous chauffons en tant que croyants, en tant que disciples du Christ qui a vaincu la mort. Quand la tristesse nous envahit, osons-nous laisser la présence du Seigneur nous remuer et nous réchauffer ? Osons-nous ouvrir le livre de la Parole pour laisser la vie de Dieu être plus forte que notre mort ? Pareillement, quand nous cherchons à témoigner de notre foi à nos frères et sœurs, à transmettre foi et espérance à la génération qui monte, nous pouvons nous inspirer de la pédagogie du Christ qui sait être ferme tout en ranimant l’espérance que donne la Parole.

Inviter le Christ à notre table pour que sa présence nous habite

     La présence de cet étranger qui s’était approché, les avait écoutés et leur avait annoncé la Parole avait réchauffé le cœur de Cléophas et de son compagnon. D’où leur invitation : Reste avec nous : le soir approche et déjà le jour baisse (v. 29). Leurs yeux s’ouvrirent à la fraction du pain. Sans le voir, ils le savaient désormais présent, et cela leur a donné le courage de refaire Église, de retourner vers les Onze et leurs compagnons desquels ils avaient pris leur distance le matin même ! Or, ce ne sont pas les disciples d’Emmaüs qui parlent en premier mais les Apôtres qui partagent leur joie : C’est vrai ! le Seigneur est ressuscité : il est apparu à Simon-Pierre (v. 34). Ensuite, ils peuvent à leur tour raconter ce qui s’était passé sur la route, et comment ils l’avaient reconnu quand il avait rompu le pain (v. 35)

     Sur notre route d’Emmaüs, osons dire au Christ ce qui nous habite. Laissons son amour et sa parole secouer nos cendres et raviver notre braise. Ainsi nous pourrons le reconnaître à la fraction du pain et repartir le cœur brûlant. Nous pourrons aussi évangéliser à sa manière. Si nous permettons aux gens de faire l’expérience du Christ ressuscité qui marche sur leur route, ils viendront vers nous et nous pourrons leur annoncer dans la  joie : « C’est vrai ! le Seigneur est ressuscité ! » Quelle Église nous serons !

 

Yvan Mathieu, SM

 

Source: Le Feuillet biblique, no 2402. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

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