INTERBIBLE
Au son de la cithare
célébrer la paroleintuitionspsaumespsaumespsaumes
off Nouveautés
off Cithare
off Source
off Découverte
off Écritures
off Carrefour
off Caravane
off Scriptorium
off Artisans

 

 
Intuitions

 

orant
Imprimer
chronique du 22 mars 2005
 

Triduum pascal

Jeudi saint
Les deux amis

Faites cela en mémoire de moi (1 Corinthiens 11, 24).
 
On raconte qu'un jour deux jeunes étrangers qui s'étaient liés d'amitié, après avoir fait connaissance par le réseau des correspondants, ont eu la chance de se rencontrer durant leurs vacances d'été.

     Luc, qui demeurait à la campagne, dans un petit village, était l'hôte de Thomas qui venait de France. Tout au cours des deux semaines qu'ils passèrent ensemble, ils firent davantage connaissance. Ils s'étaient dit bien des choses dans leurs lettres de correspondants, mais là, en présence l'un de l'autre, la communication était beaucoup plus facile et beaucoup plus profonde. Le temps passa très rapidement.

    Comme c'était déjà la fin de l'été et que les vacances étaient terminées, Thomas devait partir le lendemain. Pour leur dernière activité, ils s'étaient réservé l'exploration d'une grotte, ce qu'ils firent avec une certaine nostalgie puisque c'était la fin d'une expérience extraordinaire pour les deux.

     Et voilà que, sur le chemin de retour, en plein champ, ils se retrouvent devant un arbre fruitier comme ils n'en avaient jamais vu d'aussi beau : un arbre sauvage, aux branches débordant de beaux fruits. Ils regardèrent pendant un bon moment les fruits, les branches bien garnies. Et les yeux remplis d'une fierté et d'un émerveillement qu'ils croyaient ressentir pour la première fois, ils se mirent à rire si fort qu'on aurait pu les entendre de loin tellement leur joie était grande. Ils décidèrent donc d'y goûter. Les fruits étaient d'une saveur qu'on ne pouvait pas nommer. Ils étaient tellement heureux de leur découverte qu'ils en cueillirent pour tout le monde de la maison.

    Luc dit à Thomas : tu vois, tu devras revenir l'an prochain pour manger de ces fruits. Thomas devint tout triste au point que Luc se demandait qu'est-ce qu'il avait bien pu dire pour que Thomas devienne si triste. Avant que Luc ne le questionne, Thomas fixa son ami avec un regard chargé de larmes qu'il ne pouvait retenir. Il commença à lui dire : tu sais, j'avais un secret à te confier et je ne voulais pas te le révéler avant de partir. J'aimerais pouvoir revenir l'an prochain, j'ai passé des vacances formidables, mais je suis victime d'une maladie qui m'emportera un jour ou l'autre avant le retour de l'été. Je te donnerai des nouvelles tant que je le pourrai. Voilà mon secret; je voudrais que cela reste entre nous. On se le promit.

    Quelques mois plus tard, Luc reçut de Thomas une longue lettre qui se terminait comme suit :

   Après cette dure période que je viens de passer, je sens que c'est la dernière lettre que je pourrai t'écrire. Je te redis toute mon amitié. Et comme je ne serai pas là l'an prochain, voilà ce que je te propose : tu sais avec quelle joie et avec quel plaisir nous avons découvert ce bel arbre fruitier et dégusté ses fruits succulents, eh bien! chaque fois que tu retourneras visiter cet arbre fruitier et que tu en dégusteras les fruits je voudrais que tu le fasses en rappel de la joie que nous avons vécue ensemble et pour te souvenir de notre amitié toujours aussi vivante qu'à ce moment-là. Chaque fois que tu feras cela, tu le feras en mémoire de moi, et je serai avec toi. Adieu!

LIEN : Célébrer l'Eucharistie, c'est refaire les gestes de Jésus, redire ses paroles, rendre présent tout son amour. Chaque fois que vous mangerez ce pain et que vous boirez à cette coupe, faites-le en mémoire de moi, dit Jésus. Je suis avec vous jusqu'à la fin des temps.
 
Vendredi saint
Un homme crucifié avec son peuple


La multitude avait été consternée en le voyant, car il était si défiguré qu'il ne ressemblait plus à un homme...»
(Isaïe 42, 14).
 
Quand il était archevêque de San Salvador, monseigneur Romero vivait dans une maisonnette proche d'un hôpital pour cancéreux, tenu par des sœurs carmélites. L'une d'elles, amie intime de monseigneur, participait à la célébration eucharistique dans la chapelle de l'hôpital où on l'a assassiné le 24 mars 1980. Elle donne ici son témoignage.

     La dernière homélie de monseigneur était belle. Il parlait comme s'il avait su qu'il allait se faire tuer. Il a souvent répété que si le grain ne meurt, il ne peut porter de fruit. À la fin de son homélie, il s'est dirigé vers l'autel. L'instant d'après, on entendait le coup de feu.

    Je remercie Dieu pour ce grand prophète du El Salvador. Il est mort comme Jésus et, aujourd'hui, il intercède pour tous les pauvres et pour tout son peuple. Un journaliste a un jour demandé à monseigneur Romero s'il avait peur quand il dénonçait les injustices et les abus. Il a répondu qu'en effet il avait peur et qu'il savait ce qui allait lui arriver. Il a rajouté qu'il pardonnait à ses assassins. Il savait qu'il ressusciterait dans son peuple (El Salvador, Un peuple crucifié, témoin de sa foi).

LIEN : La défiguration de Jésus est le symbole de la souffrance des êtres humains d'hier et d'aujourd'hui. Symbole des échecs et des deuils, symbole de l'exploitation, de l'injustice et du mensonge, symbole de tout ce qui brise et ravage un visage humain.

    Et quand la pierre du tombeau se referme sur ces visages meurtris et anéantis et que le silence apparent de Dieu semble la seule réponse à ce non-sens, la récréation, la réparation est déjà à l'oeuvre et un monde nouveau est en train de naître.

    Alors les nuits de nos souffrances, qu'elles soient d'ordre moral, physique ou spirituel, sont éclairées par cette vie nouvelle déjà présente sur la croix de Jésus.


* * * * *

Prière


Mon Père,
Je m'abandonne à toi,
Fais de moi ce qu'il te plaira.
Quoi que tu fasses de moi, je te remercie.
Je suis prêt à tout,
j'accepte tout pourvu que ta volonté se fasse en moi.
En toutes tes créatures, je ne désire rien d'autre, mon Dieu.
Je remets mon âme entre tes mains,
je te la donne, mon Dieu,
avec tout l'amour de mon cœur, parce que je t'aime,
Et que ce m'est un besoin d'amour de me donner,
de me remettre entre tes mains sans mesure,
Avec une infinie confiance, car tu es mon Père.

Charles de Foucauld
 

Pâques
Antonio

    Jean Vanier raconte comment un jeune handicapé de l'Arche a été une source de libération pour de nombreuses personnes.

    « Antonio est arrivé dans notre communauté de Trosly à l'âge de vingt ans, après avoir passé plusieurs années dans un hôpital. Il ne pouvait ni marcher ni utiliser ses mains; il ne parlait pas; il avait besoin d'un masque à oxygène pour mieux respirer. Il était très faible et très fragile, mais il avait un sourire et des yeux d'une grande beauté. Il n'y avait en lui aucune colère, aucune tristesse, aucune ombre. Ce qui ne veut pas dire qu'il ne se fâchait jamais, surtout lorsque l'eau de son bain était trop chaude ou trop froide, ou que les assistants l'oubliaient! Mais il avait accepté ses limites et ses handicaps, il s'acceptait tel qu'il était. Il ne pouvait pas être généreux, donner ou faire des choses pour les autres; il avait trop de besoins lui-même. Mais il aimait avec un amour particulier, l'amour­confiance. Quand on est généreux, on donne des choses. Mais quand on aime avec confiance, on se donne, on donne son coeur; on appelle l'autre à la communion.

    Antonio a touché et réveillé le coeur de plusieurs assistants qui sont venus vivre avec lui. Il leur a enseigné la voie du coeur. Ces assistants me disaient souvent" Antonio a changé ma vie. Il m'a fait sortir d'une société de compétition, où il faut être fort et agressif, pour me faire entrer dans un monde de tendresse et de réciprocité, où chacun, fort et faible, peut être et exercer ses dons".»

(Jean Vanier, Accueillir notre humanité, Éditions Bellarmin, 1999, p. 106)

LIEN: Le Christ ressuscité tourne nos regards vers une vie qui ne finit pas et vers des valeurs qui sont éternelles, comme l'amour, la paix et la joie. Il en allait de même pour Antonio qui, dans sa vulnérabilité et sa faiblesse, a ouvert le coeur des gens sur des dimensions plus simples et plus vraies de la vie.

 

Chronique précédente :
Le plus grand pouvoir