Dieu règne : Psaume 93 (92)

Plusieurs psaumes donnent à Yahvé le titre de roi. Ce sont des poèmes religieux qu'on appelle les psaumes du règne. Ce fait parce que quelques-uns de ceux-là commencent par les mots hébreux Yahvé « malake », c'est-à-dire Dieu règne. La royauté du Seigneur est absolue : elle n'est pas limitée par les circonstances de temps et de lieu.

     En fait, lorsqu'on regarde l'histoire d'Israël, c'est le contraire qui est vrai : la royauté de Dieu sur son peuple semble subir de longues éclipses. La domination, tour à tour, des Assyriens, des Babyloniens, des Grecs et des Romains suppose que les divinités de ces peuples étrangers jouissent d'un pouvoir supérieur. Certains des envahisseurs ont même placé impunément des idoles dans le temple de Jérusalem. Dans la maison même du Dieu rédempteur, le Dieu unique de Moïse et des patriarches!

     Regardons de plus près le Psaume 93 le plus beau des psaumes du règne qui aide à affronter ce problème :

¹ Le Seigneur est roi;
il s'est vêtu de magificence,
le Seigneur a revêtu sa force.

Et la terre tient bon, inébranlable;
² dès l'origine ton trône tient bon,
depuis toujours, tu es.

³ les flots s'élèvent, Seigneur,
les flots élèvent leur voix,
les flots élèvent leur fracas.

⁴ Plus que la voix des eaux profondes,
des vagues superbes de la mer,
superbe est le Seigneur dans les hauteurs.

⁵ Tes volontés sont vraiment sûres:
la sainteté emplit ta maison,
Seigneur, pour la suite des temps.

     Le psaume 93 comme psaume du règne est une composition d'une grande beauté qui répond à la perplexité du croyant devant l'état du monde.

     Cette pièce de poésie est brève, cinq versets, mais elle est profonde et pleine de sens, dû à un imaginaire débordant. Sous l'habit d'une louange, les mots transmettent un message fort convaincant. Émile Osty, exégète sulpicien bien connu, paraphrasait en écrivant que Dieu a fixé le monde en enfermant  la mer dans des limites infranchissables (comme en Job 38, 8) et en enfonçant les montagnes au cœur des océans (comme dans le psaume 24, 2). La royauté de Yahvé se démontre par conséquent dans son œuvre de création. Les rythmes des saisons qu'on trouve dans la nature sont éternels et inchangés quels que soient le flux et le reflux des impérators. Rendez à César ce qui est à César, rendez à Dieu ce qui est à Dieu, dit l'Évangile. Le psaume 93 rend à Dieu l'hommage que l'on doit  à Yahvé pour qui  il est.

     Ton trône tient bon, depuis toujours dit le psaume 93, qu'il s'agisse par «trône» du temple de Jérusalem, ou de la nature tout entière dont le temple est l'image en petit! Les flots figurent ceux qui se posent en adversaires de Dieu. Au dessus de tous ceux-là, Superbe est le Seigneur dans les hauteurs. Dieu a manifesté sa royauté dans la nouvelle création. Selon saint Marc, la royauté de Dieu est présente dans les premiers mots que prononce Jésus en un clip qui résume son immense mission : Le Royaume de Dieu est tout proche: repentez-vous et croyez en l'Évangile. Le psaume 93 qui présente le Dieu d'Israël comme un roi, annonce un autre type de royauté que celui de la création. Cela survient dans le Nouveau Testament ou Nouvelle Alliance. Cette fois la royauté de Dieu s'exerce dans les cœurs là où commencent les grandes transformations morales de l'humanité. Les bouleversements de civilisation qu'a apportés l'Évangile (sainteté du mariage, dignité de l'enfant, libération des esclaves) ont leur origine dans l'écoute de la Parole. Le psaume 93 en contient l'ébauche dans le verset qui devient une prophétie : Tes volontés sont vraiment sûres. Les volontés de Dieu (v.5) dont il s'agit sont magnifiquement énoncés dans les commandements : Tu aimeras le Seigneur ton Dieu...Tu aimeras ton prochain. Ces préceptes trouvent un écho dans la liturgie  du Christ-Roi. «Règne d'amour, de justice et de paix dit la préface de la fête». Le psaume 93 invite à l'action pour la réalisation concrète de la royauté de Dieu en nous.