(Milada Vigerova / Unsplash)

Heureux les pauvres en esprit : réception d’un récitatif

AuteurAuteurHélène Pinard et Hélène Boudreau | 30 mars 2020

NDLR : Cet article donne une bonne idée de la démarche proposée autour d’un récitatif biblique. On y trouve toutes les étapes d’une rencontre. Le texte choisi est le texte des Béatitudes dans l’Évangile selon Matthieu.

Accueil

La transmetteure propose au groupe de réfléchir sur deux petits bonheurs vécus dernièrement. Intérieurement, je retrouve avec joie des moments de rencontre avec ma petite-fille de huit semaines. Après avoir noté par écrit, le groupe partage les petits bonheurs identifiés.

Réception initiale

Avant de recevoir, je suis invitée à prendre conscience de ma posture physique. J’observe ma respiration. Je me détends puis, peu à peu, à l’intérieur de moi, je retrouve le lien avec le Christ.

Tout en restant dans cet état de détente, j’ouvre les yeux pour accueillir le récitatif de Mt 5,3-12. Certains gestes ou paroles me touchent davantage. Ainsi, quand j’entends « heureux les miséricordieux », je me sens profondément remuée par le geste et le mot « miséricordieux ». Je le note afin de pouvoir relire et poursuivre mon cheminement au cours de l’apprentissage.

En petit groupe, nous partageons ce qui nous a touchées dans le récitatif. Je suis émerveillée de constater qu’à partir d’un même récitatif, des réactions personnelles peuvent être aussi profondes et variées.

Préparation du corps

Nous nous levons et nous marchons autour de la salle, en prenant conscience du contact entre le sol et nos pieds. Ensuite, l’animatrice nous propose de prendre un court temps d’arrêt entre chaque pas pour bien anticiper le mouvement à venir. Je deviens plus consciente dans mon corps du mouvement entre chaque pas, je sens l’élan. Pour accentuer cet effet d’élan, nous ajoutons un mouvement des deux bras pour marquer davantage la propulsion vers l’avant. Alors, le fait de marcher prend une densité nouvelle.

Début d’apprentissage

Après cet exercice, nous apprenons le premier geste du récitatif : « Heureux [1] ». J’apprécie le lien entre ce geste et l’exercice de marche fait auparavant. L’animatrice nous présente le sens du mot « heureux », traduit parfois par « en marche » (sens hébreu) ou par « Félicitations! Bravo! » (sens grec). En effet, le français rend mal le sens littéral de ce mot grec du texte d’origine et encore moins bien celui de l’hébreu. Quand je refais le geste de « heureux », intérieurement, je vis plus intensément le geste et le mot. Je réalise qu’à partir d’une situation difficile, je peux me redresser et aller de l’avant.

                                                                                                                            

L’apprentissage se poursuit, par bouchées de souffle [2]. L’animatrice chante et fait les gestes que nous répétons à quelques reprises. On apprendra ainsi tout le récitatif durant la session.

Activité d’intégration : arrêt sur geste

Lorsque le groupe devient confortable avec les paroles, les gestes et la mélodie d’un verset, nous vivons un arrêt sur geste. On refait alors le récitatif et on arrête sur un geste, dans ce cas-ci le geste correspondant au mot « miséricordieux ». Dans ce geste (voir la vidéo), une main est posée sur le cœur et l’autre semble aller à la rencontre de deux personnes. En maintenant cette position quelques instants, je descends à l’intérieur de moi. Quelles sont les sensations qui m’habitent? Après un moment de silence, certaines participantes nomment leur ressenti en un mot : douceur, compassion, compréhension, proximité. En entendant ces mots, de nouvelles sensations se manifestent en moi : fraternité, solidarité. En récitant de nouveau cette bouchée de souffle, je sens que la signification, ou plutôt les significations du verset s’imprègnent en moi.  La vie de cette Parole s’ancre encore plus profondément dans mon vécu.

Vitamine biblique

Vient ensuite un moment où l’on examine la structure du texte. Dans le cas de la péricope de Mt 5,3-12, la connaissance de la structure favorise la mémorisation du texte. La musique respecte la structure en trois parties : en effet, la mélodie de base est reprise trois fois, avec quelques variantes pour accommoder le nombre de syllabes.

L’étude du vocabulaire est aussi nécessaire puisque plusieurs mots portent un sens qui se perd lors de la traduction du grec au français. Ainsi en-est-il pour le mot « heureux » déjà cité, mais aussi « pauvre en esprit », « doux », « purs de cœur »… Le geste suggère souvent un complément de sens que le mot français n’exprime pas.

Activité d’intégration

La soirée se termine par une question à porter : Qu’est-ce qui me met « en marche »? Dans quelle situation vécue je peux entendre « Félicitations » ou « Bravo »? Ainsi, au cours de ces deux heures, la transmetteure a fait vivre des moments de savoir-faire (apprentissage du texte), de savoir (structure du texte, vocabulaire) et de savoir-être (arrêts sur geste, question à porter).

À la fin de ce premier bloc, je sens que j’aime déjà ce récitatif, qu’il me touche et me fait bouger intérieurement. Je reconnais l’Esprit qui habite cette Parole en moi. J’ai hâte d’apprendre la suite!

Hélène Boudreau et Hélène Pinard sont membres de l’Association canadienne du récitatif biblique.

[1] Le geste de « heureux » les mains qui partent du bas, près du corps pour s’élever vers l’avant à la hauteur au moins des épaules (voir la vidéo qui accompagne ce texte).
[2] Une bouchée de souffle correspond à quelques mots chantés et gestués.

Jousse

Récitatif biblique

L'Association canadienne du récitatif biblique propose une chronique mensuelle pour comprendre la discipline spirituelle qui rassemble ses membres. Axée sur la Parole et sur son effet sur l'ensemble de la personne, le récitatif biblique est une forme de méditation où tous les sens sont sollicités.