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Comprendre la Bible
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chronique du 4 juin 2004
 

L'alliance : un rite très ancien
  

QuestionMa question concerne l'épisode de la vision d'Abraham et Yahvé. Quelle et la portée, le message voulu alors que nous constatons que les animaux, les oiseaux sur le bûcher sont consommés par le feu. Je sais qu'il s'agit de l'alliance. Tous ces éléments d'une théophanie-cosmologonique représentent quoi? Veuillez m'indiquer des pistes d'interprétation. Merci! A. Gervais.

RéponseDeux questions semblables sur Gn 15. Tout le monde a compris qu'il s'agit d'un rite très ancien d'Alliance. Il est important ici de bien distinguer les plans. Il y a d'abord et avant tout ce que signifie le récit en lui-même, son « sens littéral ». Ensuite, et seulement ensuite, il y a ses relectures et ses applications pour nous ici, aujourd'hui.

     Au sens littéral, il faut admettre que le chapitre 15 de la Genèse est assez complexe. Il s'agit d'un des promesses faites par Dieu à Abraham. Abraham croyait qu'il mourrait sans enfant (Gn 15,2) mais Dieu lui réaffirme qu'il aura une descendance nombreuse (15,5), et Abraham le croit (15,6), mais demande que sa foi soir rassurée par un signe (15,8). Parce qu'Abraham a foi en Dieu, Dieu accepte de lui donner ce signe. Ce que Dieu demande de faire (15,9) et qu'Abraham comprend et exécute (15,l0) consiste en la préparation d'un rituel d'alliance, ou de pacte. Le rite avec les parties animaux est un rite très ancien d'Alliance. Les partis impliqués passaient entre les animaux pour garantir qu'ils s'en tiendraient aux closes de leur alliance. Dans un rituel d'alliance bilatérale, les deux contractants passaient entre les morceaux en appelant sur eux le sort fait aux animaux au cas où ils se montreraient infidèles aux engagements du contrat. La vie des animaux sacrifiés étaient la garantie de la vie qui s'engageait dans le pacte. Comme Dieu n'est pas un contractant habituel, il est symbolisé par le feu (v. 17). Dieu passe ainsi entre les animaux partagés. D'ailleurs, l'expression utilisée en hébreu parle de « couper une alliance » sans doute en référence à ce rite ancien.

     Ici, un élément étrange s'ajoute au texte, à savoir les « oiseaux de proie », considérés comme de mauvais augure. Cette mention prépare les versets qui parleront de l'oppression des fils d'Israël en Égypte (v. 13-16).

     L'application de ce texte est délicate. Il est bien évident qu'il ne s'agit pas ici de reproduire matériellement le rituel des animaux partagés en deux. Le thème de l'Alliance est certainement un thème majeur de l'Ancien Testament, repris par le Nouveau Testament, la nouvelle « alliance ». Le problème se situerait plutôt dans le rituel dont le texte parle ici. Le sacrifice qui sanctionne une alliance entre deux contractants est aussi évoqué dans le Nouveau Testament et appliqué, bien que timidement, au sacrifice du Christ (cf. Lc 22,19-20// ; 1 Co 11,24-25 et la Lettre aux Hébreux), l'Agneau de Dieu (cf. Jn 1,29.36 ; 1 Co 5,7 ; 1 P 1,19 ; Ap 5,6-13). Il semble donc préférable de s'attacher ici au sens du texte et du rituel plutôt qu'à sa matérialité ou aux circonstances de l'alliance.

Hervé Tremblay, OP
Professeur au Collège dominicain de philosophie et de théologie (Ottawa)

  

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Jésus et le judaïsme de son époque