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Comprendre la Bible
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chronique du 3 juin 2005
 

Loi naturelle et connaissance de Dieu
 

QuestionComment les personnes qui n'ont pas reçu la révélation de Yahvé par la Loi de Moïse peuvent-elles connaître le Tout-Autre? Comment peuvent-elles être sauvées? En d'autres mots, qu'est-ce la Loi naturelle inscrite au fond de leur coeur? D'où vient-elle? Où puis-je trouver des références pour ensuite l'expliquer?

RéponseIl y a deux questions majeures ici, qui touchent des problèmes difficiles. Premièrement, la connaissance de Dieu, ensuite la relation entre l'observance de la loi et le salut. La connaissance de Dieu ou la révélation est une branche de la théologie (la théologie fondamentale). Je m'en tiens ici au seul domaine biblique qui est le mien. La Bible dit assez peu de chose sur une connaissance « naturelle » de Dieu, et ce sont des textes tardifs (cf. Ps 19; Sg 13,1-9; Si 42,15&endash;43,33; Rm 1,19-21). Aussi, l'existence d'une « loi naturelle » est-elle un enseignement plutôt catholique, appuyé surtout sur Rm 1&endash;3, mais rejeté par les communautés protestantes qui se sont toujours méfiées de l'humain. De l'autre côté, la Bible parle à chaque page de la révélation de Dieu. Dieu crée, il noue des alliances, il donne des lois, il promet, il châtie, il récompense, etc. Mais on ne dit pas comment les hagiographes ont reçu cette révélation. Il ne suffit pas qu'un auteur biblique écrive : « Dieu commanda à Moïse, fais ceci ou fais cela » pour qu'on imagine le Seigneur parlant directement à cet auteur. Aussi, les moyens de la révélation demeurent assez mystérieux. De toute façon, c'est là plus l'objet de la théologie fondamentale ou du traité de l'inspiration scripturaire. Il est évident que les explications ont beaucoup varié au long des siècles, certains insistant plus sur l'élément divin de révélation, alors qu'aujourd'hui on insiste davantage sur l'élément humain d'expérience de Dieu. Ici, on n'entend certainement pas affirmer que la révélation se comprend parfaitement par l'intelligence humaine ou qu'elle en viendrait, mais uniquement que l'élément humain de réflexion, de méditation, d'accumulations d'expériences de la divinité, joue un grand rôle dans la révélation que Dieu a faite de lui-même.

     La relation entre l'observance d'une loi et le salut est plutôt chrétienne. Le judaïsme, à l'origine du moins, considérait la loi comme un moyen pratique pour être heureux sur terre (on sait que l'eschatologie est une doctrine tardive qui n'apparaît que dans des livres comme les Maccabées par exemple). Le judaïsme ne parle donc pas de la révélation ou de la loi en termes de « salut », du moins pas à l'époque biblique. Maintenant, qu'un chrétien parle de salut, rien de plus normal, mais pourquoi la question parle-t-elle d'un salut « par la révélation de la loi de Moïse »? Ne devrait-on pas plutôt parler du salut par Jésus Christ ou par l'évangile? Le fait est que le chrétien n'est certainement pas sauvé par la loi de Moïse, mais par Jésus Christ. Saint Paul a réglé la question de la loi de Moïse pour les chrétiens dans ses lettres aux Galates et aux Romains. Ceux qui connaissent Jésus Christ et accueille l'évangile reçoivent de lui le salut.

     On revient donc à la question du salut de ceux qui n'ont pas connu la révélation. La Bible n'en dit rien. Il faut souligner combien les écrits vétérotestamentaires sont marqués par la doctrine de l'élection. La religion juive a toujours été liée à un peuple et n'a donc jamais été missionnaire. On naissait juif, donc on en suivait la religion. Les autres n'entraient tout simplement pas dans cette religion; ils étaient même une menace de contamination. Le christianisme, évidemment, a dû considérer les choses autrement à cause de son caractère international et missionnaire du début. Le Nouveau Testament n'en dit rien. Au long des siècles, deux écoles théologiques se sont affrontées. L'une, rigoriste, n'admettait de salut qu'en Jésus Christ et par l'Église, strictement. En ce sens, seuls les chrétiens explicites et fidèles seraient sauvés. L'autre s'appuyait sur la bonne foi des hommes, sur la loi naturelle, pour admettre un salut, mais toujours en Jésus Christ et par l'Église. Le dernier concile de Vatican II s'est exprimé à ce sujet dans Lumen Gentium.

Hervé Tremblay, OP
Collège dominicain de philosophie et de théologie, Ottawa

  

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