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Comprendre la Bible
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chronique du 19 juin 2009

 

Paul, l’énigmatique apôtre

Qui est Paul de Tarse? Converti ou apostat? Missionnaire ou mystique? Révolutionnaire ou traditionaliste? Une réponse un peu rapide, mais quand même exacte, consisterait à dire: tout cela en même temps et dans le même homme!

Qui est Paul de Tarse?

     La complexité de Paul s’explique en bonne partie par le fait qu’il ait les pieds dans trois univers. Son premier univers est celui du monde juif. Paul a été formé par ce monde; il en a épousé les valeurs, les mœurs, l’histoire et les rites. Loin de rejeter cet héritage, Paul a compris et voulu montrer qu’il trouve son accomplissement dans le Christ.

     Paul est aussi bien ancré dans l’univers grec. Tarse, la ville où il est né, possédait une des meilleures universités de l’Asie Mineure. Pas étonnant que l’apôtre s’exprime – par l’écrit comme par la parole – dans un excellent grec. Pas étonnant non plus qu’il utilise des images et des institutions de la culture grecque (le sport, la citoyenneté, la sagesse) pour présenter la foi chrétienne.

     Troisième ancrage de Paul : l’empire romain. À son époque et dans son milieu de vie, Rome est non seulement une puissance militaire et économique, mais aussi une institution religieuse! L’empereur est considéré comme un dieu, et son culte est pratiqué surtout dans l’est de l’empire, là où son implantées les premières communautés chrétiennes de Paul! Devant les prétentions de l’empereur qui se donnait le titre de « Sauveur », Paul affirmera haut et fort qu’il n’y a qu’un vrai sauveur: Jésus de Nazareth, Messie exalté à la droite du Père.

     Conclusion : Paul est donc un homme complexe dans un monde complexe!

Qu’a-t-il fait?

     S’il est un mot qui résume la vie de Paul – du moins après sa conversion – ce serait celui de voyageur. Par monts et par vaux, à pied et par bateau, Paul a parcouru quelques milliers de kilomètres. Il s’est vu investi d’une mission urgente : d’une part révéler aux nations païennes le grand geste de salut accompli par Dieu dans son Fils Jésus. D’autre part, par la folie de la prédication et la puissance de la foi, permettre à l’Esprit de saisir des hommes et des femmes de tout horizon pour les rassembler et les transfigurer à l’image du Christ, nouvelle humanité.

     Mais il y a chez Paul un autre type de « voyagement » tout aussi important et ardu que les déplacements physiques. Paul a parcouru son histoire, c’est-à-dire l’histoire du peuple juif, depuis Adam jusqu’au dernier prophète, en passant par Abraham, Moïse et David. Pourquoi cette longue « revisitation »? C’est que, pour Paul, le Christ dans lequel il a mis sa foi, ne se comprend que de l’intérieur de cette histoire, comme son sens et son aboutissement. « La fin de la loi, c’est le Christ » (Romains 10, 4). Pour Paul, le Christ est non seulement celui en qui la Torah achève son rôle, mais il est le but (télos) de toute la première alliance. Paul cherchera donc à reprendre les éléments fondamentaux de son histoire – le Dieu unique, le peuple choisi et l’alliance entre les deux – pour les recomprendre et les redéfinir à la lumière du Christ et de son œuvre.

Qu’a-t-il dit?

« Lorsque Dieu a jugé bon de révéler en moi son Fils » (Galates 1, 16). Pour Paul, l’expérience de Damas n’en est pas une de conversion mais de révélation. En fait, le fier pharisien y reçut une triple révélation : révélation du Christ, de l’Église et de sa mission. Ce sera le trépied de sa vie et de sa pensée. Voyons d’un peu plus près.

Révélation du Christ. Tout l’effort religieux de la loi judaïque est de permettre à Dieu de saisir notre existence et de l’habiter. Paul découvre que c’est par la foi au Christ qu’on ouvre à Dieu son existence pour qu’il l’habite et la transfigure.

Révélation de l’Église. « Je suis Jésus : c’est moi que tu persécutes » (Actes 9,5; 22,8; 26,15). Paul sera bouleversé par ce lien « organique » entre le Christ et son Église. Toucher à l’Église, c’est toucher au Christ. Persécuter l’Église, c’est persécuter le Christ. Mais aussi, aimer l’Église, c’est aimer le Christ. À la lumière de l’histoire du peuple choisi en alliance avec son Dieu, Paul ne cessera d’approfondir ce « mystère » (Éphésiens 5, 32).

Révélation de sa mission. Paul comprendra qu’en sa source profonde, sa mission consiste à s’identifier au Christ et donc, comme lui, à se mettre entièrement au service de cette humanité appelée à vivre de l’Esprit du Christ.

Dans le Seigneur

S’il est une expression qui résume la pensée et la spiritualité de Paul, c’est bien celle qui revient dans toutes ses lettres : « dans le Christ » (28 fois) ou « dans le Seigneur » (44 fois). Prenons comme exemple l’usage qu’il en fait dans la toute première lettre qu’il a écrite (qui est en fait le premier écrit du Nouveau Testament) adressée aux Thessaloniciens :

– Paul, Silvain et Timothée à l’Église des Thessaloniciens qui est en Dieu le Père et dans le Seigneur Jésus Christ. A vous grâce et paix. (1 Thessaloniciens 1:1)

– et maintenant nous revivons, puisque vous tenez bon dans le Seigneur. (1 Thessaloniciens 3:8)

– Au demeurant, frères, voici nos demandes et nos exhortations dans le Seigneur Jésus : vous avez appris de nous comment vous devez vous conduire pour plaire à Dieu, et c’est ainsi que vous vous conduisez; faites encore de nouveaux progrès. (1 Thessaloniciens 4:1)

– Nous vous demandons, frères, d’avoir des égards pour ceux qui parmi vous se donnent de la peine, veillent sur vous dans le Seigneur et vous reprennent; (1 Thessaloniciens 5:12)

     Nous le voyons bien dans ces quelques citations: tout – la communauté et ses ministères, la mission et l’autorité de Paul et le mystère même de Dieu –  ne se comprend que dans la lumière du Christ. En lui le mystère de Dieu se révèle, la mission de Paul prend son sens et l’Église trouve son accomplissement.

Georges Madore

Source : bulletin Passages vol. 8 no 2 (2009) publié par l’Office de catéchèse du Québec.

Chronique précédente :
Paul, en ville et en route