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Comprendre la Bible
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chronique du 22 octobre 2010

 

Animaux purs ou impurs : comment s’y retrouver ?

QuestionQuels ont été les critères pour définir quels animaux étaient purs ou impurs? Quelle est l’origine de ces lois alimentaires? (Roger, Lorraine, France)

RéponseOn fait référence ici aux deux listes qui se trouvent en Lv 11,1-23 et Dt 14,3-21 et qui sont étroitement parallèles. Plusieurs des mots hébreux qui y désignent des espèces sont inconnus des spécialistes ou ne se retrouvent qu’ici dans toute la Bible. C’est pourquoi les traductions sont souvent incertaines ou hypothétiques. La biologie de l’époque est parfois surprenante pour nous, mais il faut se souvenir que l’on a affaire à une société préscientifique. Ainsi, par exemple, le lapin est classifié parmi les ruminants à cause de son nez qui bouge tout le temps (Lv 11,6); la chauve-souris est parmi les oiseaux parce qu’elle a des ailes (Lv 11,19), etc.

Le sacrifice de Jéroboam à Béthel

Le sacrifice de Jéroboam à Béthel
Gerbrandt van den Eeckhout, 1656
Huile sur toile, 203 x 158 cm
Musée de l'Ermitage, Saint-Pétersbourg

     Les animaux purs sont ceux qui peuvent être offerts en sacrifice; les animaux impurs sont donc ceux qui ne peuvent pas être offerts en sacrifice. Parmi les sacrifices pratiqués par les Anciens, l’holocauste (dans lequel la victime était entièrement brûlée) était assez rare. Le sacrifice le plus habituel était le « sacrifice de communion » dans lequel la victime était divisée entre la divinité, les prêtres qui l’avaient sacrifiée et celui qui l’offrait. Tous les intervenants mangeaient : la divinité par le sang versé ou le feu, les prêtres, l’offrant avec ses proches ou sa famille. Le sacrifice des Anciens était le plus souvent considéré comme un événement communautaire, un repas festif. On trouve les instructions pour les sacrifices surtout au début du Lévitique (Lv 1–7). Il fallait donc que les victimes offertes soient comestibles et sans danger. C’est l’expérience qui avait opéré les distinctions que tous connaissent et observent encore aujourd’hui dans leurs grandes lignes.

     Ainsi, les animaux purs sont essentiellement les ruminants comme le mouton ou le bœuf. Il peut être surprenant de voir le chameau ou le lièvre parmi les animaux impurs (Lv 11,4.6), mais, bien que comestibles et sans danger, ce sont des animaux qui n’étaient pas offerts en sacrifice. Quant au porc, on savait bien, dans les siècles passés, qu’une cuisson insuffisante risquait de causer des maladies (parlez-en à votre grand-mère!). C’est donc un animal impur qui ne sera ni offert en sacrifice ni mangé. Quant aux créatures marines, les poissons sont purs, ce que le texte désigne par « tout ce qui a nageoires et écailles » (Lv 11,9b). Le reste est exclu, ce que les amateurs de fruits de mer trouveront regrettable... mais les Israélites ont pêché plus dans le lac de Galilée que dans la mer. Les oiseaux purs sont essentiellement les pigeons et colombes. De façon étonnante, la Bible ne parle à peu près jamais de la poule. Domestiquée déjà à l’ère du Bronze ancien, présent dans l’art israélien ancien, la Bible hébraïque n’en parle tout simplement pas. On croit que l’usage du poulet serait postexilique puisque le mot se trouve plus fréquemment dans le Nouveau Testament seulement. Le récit des cailles lors de la traversée du désert n’aide pas vraiment puisque, malgré la tradition, on n’est pas certain du sens précis du mot hébreu employé. Quoi qu’il en soit, les gallinacés étaient purs : perdrix, cailles, poules. Les oiseaux impurs sont ceux qui se nourrissent de quelque chose de répugnant (les oiseaux de proie, les vautours, les hiboux, les goélands). Quant aux insectes, ils sont tous impurs sauf les sauterelles, fort prisées encore aujourd’hui en Afrique.

     On voit donc que les règles du pur et de l’impur sont d’abord hygiéniques et, par la suite seulement, religieuses. Le judaïsme orthodoxe les observe encore aujourd’hui dans ce qu’on appelle la cashrut (les aliments casher), bien que d’autres règles entrent aussi en ligne de compte. Dès le début, le christianisme ne s’est pas senti concerné, d’autant plus que le culte sacrificiel s’est terminé avec la destruction du temple par les Romains en 70 de notre ère.

Hervé Tremblay

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Rites de deuil, rites de survie