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Comprendre la Bible
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chronique du 27 mai 2011

 

La datation des évangiles

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QuestionJ'aimerais avoir des précisions quant aux méthodes de datation des textes bibliques. Par exemple, comment arrive-t-on à dire que l’Évangile selon Marc date de 70 ap. J.-C. et que celui de Jean est plus tardif? (Lando, Antananarivo, Madagascar)

RéponseLa datation d’un livre biblique est habituellement basée sur des indices historiques et théologiques repérables à partir de son contenu, mais aussi basée, à l’occasion, sur des témoignages extérieurs au texte. Pour illustrer mon propos, je me réfèrerai aux évangiles synoptiques (Marc, Matthieu et Luc).

     Dans de l’Évangile de Marc, où la question de la souffrance est très présente, on remarque une insistance sur la nécessité de porter sa croix (8,35). Ce passage laisse croire que la communauté chrétienne est soumise à la persécution, en l’occurrence, celle infligée sous le règne de Néron (au cours des années 64-65). Il peut alors être lu comme un encouragement à la persévérance dans la souffrance. Marc évoque également la destruction du temple de Jérusalem comme une éventualité (ch. 13,2), mais il ne semble cependant pas savoir qu’elle a effectivement eu lieu (en 70). Ces deux balises historiques incitent donc les chercheurs à placer la rédaction de cet évangile entre 65 et 70. Il y a encore les témoignages des pères de l’Église, Clément d’Alexandrie et Irénée de Lyon, donc des indices extérieurs au texte, selon lesquels la rédaction de l’Évangile de Marc advient après la mort de Pierre, laquelle se situe sous la persécution de Néron.

     Quant à l’Évangile de Matthieu, il est écrit après la destruction du Temple et de la ville de Jérusalem, car ces événements sont manifestement connus de l’auteur (23,37-24,3). Par ailleurs, la polémique qui oppose la communauté chrétienne à l’orthodoxie juive des Pharisiens en lien avec la synagogue (Mt 23) doit, elle, être située vers 80. L’assemblée de Jamnia (sorte d’école juive située justement à Jamnia sur la côte ouest de la Judée, après la destruction de Jérusalem) tenait à démarquer clairement le judaïsme de la communauté chrétienne. C’est vers cette époque d’ailleurs que cette dernière se détache définitivement de la synagogue. Les invectives en Mt 23 montrent bien cette rupture. On doit, en conséquence, dater la rédaction de Matthieu après 80, autour de 85 probablement.

     La rédaction de l’Évangile de Luc est habituellement placée, elle aussi, autour de 85. Il semble bien, en effet, que l’auteur connaisse le siège et la chute de Jérusalem (Lc 19,43-44; 21,20-24). La rédaction est donc postérieure à 70. Par contre, d’origine païenne, de la deuxième génération de chrétiens comme il l’indique dans le prologue de son évangile (Lc 1,1-4), cet auteur ne semble pas connaître le corpus paulinien rassemblé autour des années 90). D’où la datation approximative de cet évangile entre 80 et 90.

     Tous ces indices évoqués, parmi bien d’autres, permettent aux spécialistes de proposer des marges de datations plausibles des évangiles. Par ailleurs, si ces datations sont les plus retenues, elles sont aussi régulièrement contestées par les chercheurs. Nous sommes donc en présence de fortes probabilités, mais jamais de certitudes.

Odette Mainville

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