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Faire une relecture de son aventure spirituelle (3/5)
Les deux prochaines chroniques portant sur la relecture sont inspirées d’une causerie de Jean-Luc Brunin, évêque auxiliaire au diocèse de Lille en 2002. J’en ai gardé le ton oral particulièrement bien adapté au sujet. J’ai retravaillé l’exposé en l’adaptant à l’actualisation de la Parole seul ou en petits groupes.
Qu'est-ce que l'actualisation ?
L’actualisation est un processus d’appropriation de la Parole de Dieu. Essentiellement, l’actualisation est une démarche de relecture, une démarche humaine à la fois fondamentale et nécessaire.
Dans la tradition ancienne de l'Église, on parlait de retour sur soi
Il ne s’agit donc pas d’une démarche naturelle mais plutôt d’une donnée culturelle. Nous vivons dans une société hyper médiatisée : avec l’internet et les satellites, on capte le monde. L’image nous fait sortir de nous. On risque d’être happé à l’extérieur, de vivre à la surface de sa vie, d’être livré aux seules émotions, au seul ressenti. Or, on ne peut pas s’humaniser si on reste à ce niveau des émotions. On serait comme une bouteille ballottée sur les flots de la mer.
Se construire une identité, c’est découvrir que nous sommes la même personne dans la diversité des rôles sociaux, des personnages. Pouvoir se définir dans la diversité des appartenances est essentiel à l’identité. L’homme caméléon, en panne d’identité, n’est pas vraiment humain. C’est la relecture qui permet de dire qui on est.
Relire c'est rendre notre environnement humain
Relire c’est faire retour sur soi, c’est dire « je ».
Relire est à l’humain ce que la natation est au nageur. Ce dernier fait des mouvements pour émerger de cet élément liquide qui risque de le submerger. De même, relire les événements permet aux individus d’émerger de leur environnement et de devenir sujets de leur environnement. Relire c’est faire retour sur soi, c’est dire » je ».
Le réel est différent de la réalité. Selon des philosophes : j’ai instinctivement le sens du réel parce que j’y suis plongé, englouti. Pas besoin d’être éduqué pour cela. Ce réel me gratifie, me fait souffrir. Il y a des choses qui me rendent heureux, d’autres qui me mettent de mauvais poil – mais pour que ce réel devienne une réalité maîtrisable, je dois recourir au langage.
Être livré au réel à l’état brut, c’est déshumanisant.
Ouvrir un espace de parole pour relire le réel, plus ou moins mal assumé. Laisser venir à la parole ce qui doit venir.
Écouter : manifester que ce que l’autre a vécu m’intéresse. Une écoute intéressée, pas curieuse mais qui porte intérêt, pour lui permettre de construire son histoire, d’organiser le réel et de lui donner un sens.
C’est participer à l’acte créateur de Dieu qui appelle l’humain à maîtriser son environnement. La relecture est un chemin d’humanisation. Si naturellement je suis aliéné, par la relecture je me réapproprie mon existence, je construis mon histoire et je devins libre. Re-saisir ainsi sa vie, la reprendre en nous, c’est un choix de liberté. Seul quelqu’un de libre peut faire le choix de donner et d’engager son existence à la suite du Christ.
La relecture en lien avec la Parole de Dieu
Pour relire, il faut être éclairé. Nous passons au stade de la narration; on raconte ce qui s’est passé, ce qu’on a éprouvé, ce qu’on a retenu. Quand je raconte, je fais un tri, je trie parce que je ne garde que ce qui a retenu mon attention, ce qui m’a inquiété, réjoui, agacé… On ne peut pas échapper à la dimension subjective de la relecture. Cependant pour relire, on doit faire l’effort de regarder à partir d’un autre lieu, d’un autre point de départ que mon ressenti. C’est tenter d’objectiver notre lecture, de nous laisser éclairer par la Parole de Dieu et par la tradition de l’Église.
À partir de quoi, vais-je relire mon expérience humaine ?
1- La présence de Dieu à l’œuvre dans la vie des humains.
2- L’œuvre de Dieu dans la vie de mes frères et sœurs.
3- La façon d’adopter progressivement l’art de vivre du Christ.
4- Le vécu de l’expérience
Dans la prochaine chronique, nous élaborerons sur ces quatre aspects de la relecture.
Chronique
précédente :
Faire une relecture de son aventure spirituelle (2/5)