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chronique du 7 avril 2017
 

Jésus contre la prière publique

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(photo : Pixabay)

On a tendance à l’oublier, mais Jésus n’était ni chrétien ni catholique. Il n’a pas été ordonné, n’a pas présidé de messe, de baptême ou de funérailles. Il était un juif laïc, et sa façon de prier n’était pas nécessairement la nôtre. Au cœur du sermon sur la montagne, l’Évangile de Matthieu transmet des paroles-chocs de Jésus sur la prière. En particulier, contre la prière faite en public pour attirer les regards.

5 « Et quand vous priez, ne soyez pas comme les hypocrites qui aiment faire leurs prières debout dans les synagogues et les carrefours, afin d’être vus des hommes. En vérité, je vous le déclare : ils ont reçu leur récompense. 6 Pour toi, quand tu veux prier, entre dans ta chambre la plus retirée, verrouille ta porte et adresse ta prière à ton Père qui est là dans le secret. Et ton Père, qui voit dans le secret, te le rendra. 7 Quand vous priez, ne rabâchez pas comme les païens ; ils s’imaginent que c’est à force de paroles qu’ils se feront exaucer. 8 Ne leur ressemblez donc pas, car votre Père sait ce dont vous avez besoin, avant que vous le lui demandiez. »

9 « Vous donc, priez ainsi : Notre Père qui es aux cieux, fais connaître à tous qui tu es, 10 fais venir ton Règne, fais se réaliser ta volonté sur la terre à l’image du ciel. 11 Donne-nous aujourd’hui le pain dont nous avons besoin, 12 pardonne-nous nos torts envers toi, comme nous-mêmes nous avons pardonné à ceux qui avaient des torts envers nous, 13 et ne nous conduis pas dans la tentation, mais délivre-nous du Tentateur. » (Matthieu 6, 5-13)

Avant de transmettre le « Notre Père », Jésus invite à une prière vraie, authentique. Il dresse un portrait de celui qui prie de façon hypocrite. Celui-ci cherche à se faire voir lorsqu’il prie, il répète des formules, pensant que Dieu va l’exaucer de façon magique. Jésus affirme que Dieu sait déjà ce dont on a besoin. Puis, il donne un exemple de prière par le « Notre Père ». Lorsqu’il invite à prier ainsi, deux interprétations sont possibles : demande-t-il de répéter les mêmes mots ou de prier d’une façon personnelle et créative, en s’inspirant de ses paroles, sans se limiter à une simple répétition?

« Notre Père… »

L’un des éléments distinctifs de la spiritualité de Jésus est d’entrer en relation avec Dieu, comme un fils s’adresse à son père. Ce Père est le même pour tous, c’est notre Père. En priant ainsi, la relation avec Dieu n’est pas individuelle. Celui qui prie fait partie d’une communauté de personnes qui se reconnaissent comme fils et filles de Dieu.

« Que ton nom soit sanctifié… »

Sanctifier Dieu ou son nom est une expression classique qui signifie : reconnaître sa présence agissante. Cette expression nous invite à chercher la présence de Dieu dans notre vie et dans notre monde.

« Que ton Règne vienne, que ta volonté soit faite… »

Dans cette requête, nous demandons à Dieu de réaliser sa volonté. Bien entendu, la volonté de Dieu nous concerne aussi. Jésus nous invite à participer à la construction du monde de justice et de paix qu’il appelle « le royaume de Dieu ». Comment participer dès aujourd’hui à l’élaboration du royaume de Dieu? Comment discerner la volonté de Dieu?

« Donne-nous notre pain quotidien… »

À l’époque de Jésus, l’alimentation était beaucoup moins diversifiée qu’aujourd’hui. Le pain en constituait l’élément de base. Jésus invite à demander directement à Dieu de répondre à nos besoins les plus concrets, au jour le jour, comme pour le peuple hébreu, avec la manne, au désert (Exode 16). De quoi avons-nous besoin pour vivre? Quels sont nos désirs les plus importants? Est-ce que Dieu peut nous aider à les réaliser?

« Remets-nous nos dettes… »

Littéralement, le texte biblique parle de remise de dettes financières. Dans la société de cette époque, les dettes étaient un enjeu de vie ou de mort. Ceux qui ne pouvaient pas payer leurs dettes étaient emprisonnés et, parfois même, leur famille entière était réduite à l’esclavage. Remettre la dette d’une telle personne, c’était, en quelque sorte, lui redonner la liberté et la vie. En priant ainsi, on demande donc à Dieu d’annuler nos dettes contractées envers lui, d’une façon similaire à celle de l’échange des pardons fraternels. Ces dettes représentent nos torts, nos péchés.

« Ne nous conduis pas dans la tentation… »

Dans la culture du Nouveau Testament, ce n’est pas Dieu qui est à l’origine des malheurs qui nous affligent, mais bien le Tentateur, Satan. Le « Notre Père » se termine donc par une demande d’intervention active de Dieu pour qu’il nous libère des forces du mal.

Prier aujourd’hui

La première partie du texte de Matthieu que nous avons cité plus haut montre les critiques de Jésus sur la façon de prier de son époque. Nous pourrions nous demander quelles seraient les façons hypocrites de prier aujourd’hui. Les prières ostentatoires, dont l’objectif est de nous mettre en valeur, semblent être la réponse la plus évidente. Puisque la prière est un geste éminemment personnel, notre objectif ne devrait jamais être de prier comme les autres voudraient que l’on prie, mais plutôt de viser l’authenticité, dans notre prière.

Il y a plusieurs façons de prier : prière de demande, récitation de prières, méditation, louange, chants, etc. Comment priez-vous? Qu’est-ce que la prière pour vous? Personnellement, ma prière est nourrie par les chants de Taizé, une communauté œcuménique établie en France. Elle invite à la méditation par la répétition de courts chants. Ces temps-ci, j’explore aussi d’autres façons de prier, pour approfondir ma vie spirituelle. Par exemple, puisque je cours environ 1000 km par année, je profite de ce temps pour entrer en contact avec la nature qui m’entoure. Il n’y a pas de meilleure façon de découvrir un artiste qu’en contemplant sa création. J’aime aussi m’arrêter, faire silence et me concentrer sur ma respiration. Dans le récit de la Genèse, c’est Dieu qui donne la vie à l’humain, par son souffle. Chaque respiration que je fais peut être l’occasion de me rendre conscient de ce souffle, don de Dieu. Un autre exemple : même des activités aussi mondaines qu’une journée au spa peuvent être des temps de spiritualité. D’abord, le repos me permet de reprendre contact avec moi-même. Puis le silence des spas me permet de prier et de méditer car, lorsque j’y suis, le temps s’arrête et je me rends disponible pour cela. Voilà donc ma façon personnelle de prier. Quelle est la vôtre?

Extrait de : Sébastien Doane, Zombies, licornes, cannibales… Les récits insolites de la Bible, Montréal, Novalis, 2015.

Sébastien Doane

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