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Le livre de Tobie (1/7)
 

Présentation du livre

Contrairement à l’impression que laisse parfois le judaïsme, soit celle d’être une religion enfermée sur elle-même, farouchement attachée à sa Loi et à ses traditions propres, méfiante de ce qui vient de l’extérieur, il ne faut pas croire que le judaïsme de l’Antiquité évoluait en vase clos, totalement imperméable au monde païen qui l’entourait. Au contraire, déjà dans l’Antiquité, plus de juifs vivent au sein des communautés de la diaspora, à travers tout le bassin méditerranéen, qu’en Palestine même. Le judaïsme s’est donc trouvé exposé à d’autres idées, à d’autres sensibilités religieuses, à d’autres sagesses et cultures que celles lui venant de ses racines sémites et monothéistes, et a même été influencé par elles. La littérature biblique nous offre maints exemples d’influences étrangères ayant tracé leur chemin jusque dans la Bible. Le livre de Tobie 1en est un bel exemple.

Sagesse d’Ahikar

    L’auteur du livre de Tobie a certainement connu un roman assyrien très en vogue dans l’Antiquité : Histoire et sagesse d’Ahikar l’Assyrien. C’était l’histoire d’un homme sage, échanson et conseiller à la cour des rois assyriens Sennakerib et Asarhaddon, ayant gagné l’estime de tous par sa sagesse. Il avait adopté son neveu Nadan, à qui il voudra inculquer ses principes de sagesse. Ce neveu se retournera pourtant contre Ahikar et fera condamner à mort son oncle par le biais d’accusations mensongères. Cependant, le bourreau de la cour, attaché à Ahikar, le cachera et le protégera, mettant à mort un autre homme à sa place. La situation d’Ahikar se dénouera lorsque le roi exprimera sa nostalgie d’avoir encore près de lui son ancien conseiller. Ahikar resurgira alors, retrouvant sa place à la cour pour conseiller le roi.

    Le sage qui, injustement, tombe en disgrâce aux yeux du roi. Le sort qui finit par sourire de nouveau à celui qui, malgré ses épreuves, a persévéré dans la droiture. Le sage qui veut transmettre à son fils ses principes, l’instruisant de maximes et de conseils… Tels sont des motifs communs aux deux histoires, celle d’Ahikar et celle de Tobit, à la différence que Tobit connaîtra plus de succès dans l’éducation de son fils Tobie qu’Ahikar avec Nadan. Et si nous n’étions pas encore convaincus que l’histoire d’Ahikar ait inspiré le livre de Tobie, voyons comment son auteur trahit lui-même ses influences de façon non voilée : les deux histoires se passent en Assyrie (Tb 1,2-3.10), sous les règnes des mêmes rois, Sennakérib et Asarhaddon (Tb 1,15.21) et même le nom d’Ahikar l’échanson du roi y est mentionné, alors qu’il devient, dans le livre biblique, le neveu de Tobit (1,21-22; 2,10; 11,19; 14,10). À la fin du livre, juste avant de mourir, Tobit fera ses recommandations à son fils, alludant directement à cette histoire d’Ahikar et au sort réservé à ceux qui agissent de façon ingrate, comme l’a fait Nadan 2 envers son père adoptif (14,10).

Un récit édifiant

    Empruntant sans équivoque à l’œuvre assyrienne, le livre de Tobie n’est pourtant pas un plagiat. D’abord, parce qu’il raconte plus que la simple histoire de Tobit (celui qui peut trouver son pendant en Ahikar). Le roman raconte en parallèle l’histoire d’une autre juste infortunée, Sara, juive elle aussi de la diaspora, parente de Tobit, qui, par le jeu de la providence divine, deviendra finalement sa belle-fille, par un mariage qui résoudra son infortune. Pas un plagiat non plus, parce que, malgré ses emprunts à l’œuvre assyrienne, le livre de Tobie reste très juif dans son contenu. Tobit est dépeint comme un juif exemplaire, sachant garder sa foi et les prescriptions de la Loi juive, même dans un contexte de déportation. Il transmet avec succès à son fils Tobie l’idéal juif : respect des parents, l’importance de l’aumône, de la prière et du service, le mariage conforme à la volonté de Dieu (4,12-13). Un livre édifiant ayant sûrement pour but de solidifier la foi, la piété, le respect de la Loi de Moïse chez les juifs de la diaspora faisant tous les jours face à la menace de l’assimilation aux mœurs païennes.

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1 Le livre de Tobie est nommé d’après le titre que la Vulgate lui donne : Tobia. À noter que, dans certaines bibles, on donne aussi à ce livre le nom de Tobit, héros principal du livre, qu’il ne faut pas confondre avec Tobie, le fils de ce dernier. Quoi qu’il en soit, il s’agit bien du même livre biblique.

2 L’auteur biblique change toutefois le nom de Nadan pour Nadab.

 

Patrice Bergeron, ptre

 

Source: Le Feuillet biblique, no 2230. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

Chronique précédente :
Le livre de Qohélet - La vieillesse et la mort

 

 

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