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L'Évangile selon saint Matthieu (1/5)
 

Matthieu et sa communauté

Nous vous proposons, à partir d’aujourd’hui jusqu’à la fin du mois de juin, une découverte de l’Évangile selon saint Matthieu. Nous voulons aller au-delà des passages retenus par la liturgie dominicale pour vous présenter une vue d’ensemble de cet évangile qui occupe une place d’honneur dans la tradition chrétienne. En effet, Matthieu apparaît en tête du corpus des évangiles même s’il n’est pas le plus ancien, cette place étant occupée par Marc. C’était aussi l’évangile de prédilection jusqu’à la réforme liturgique du Concile Vatican II qui a institué le cycle triennal des lectures bibliques pour la messe dominicale. Selon l’exégète réputé Raymond E. Brown, Matthieu a été considéré dès les premiers siècles comme le « document fondateur » qui enracine l’Église dans l’enseignement de Jésus.  Cet enseignement du maître, Matthieu l’a regroupé en cinq grands discours qui occupent un peu plus de 30% de l’évangile qui compte 28 chapitres et 1 068 versets. Rappelons-nous la fin de l’évangile où le Ressuscité demande aux apôtres de faire des disciples et de leur apprendre à observer tout ce qu’il leur a enseigné. Avant d’aborder les éléments typiques de l’évangile, faisons connaissance avec l’auteur et sa communauté.

     Matthieu est mentionné dans toutes les listes d’Apôtres (Matthieu 10, 3; Marc 3, 18; Luc 6, 15; Actes 1, 13). Son nom en hébreu Mattatyah(u) se traduirait par « Théodore » ou « Dieudonné ». Dans le récit de son appel à devenir disciple, Marc (2, 14) et Luc (5, 27) le nomment Levi tandis que dans l’Évangile selon saint Matthieu il porte le nom de Matthieu. Ce même évangile est aussi le seul à préciser qu’il exerce la profession de publicain, c’est-à-dire de collecteurs des impôts et des douanes pour le compte du gouvernement romain (Mt 10, 3), dans la petite ville de Capharnaüm.

     Origène, saint Jérôme et d’autres Pères attribuent l’évangile à Matthieu et affirment que celui-ci s’adresse à des chrétiens venus du judaïsme. La langue, les procédés littéraires, le vocabulaire, la connaissance approfondie des Écritures et l’habileté à les interpréter à la lumière du Christ révèlent l’érudition de l’auteur de l’évangile. On note par exemple 130 références à l’Ancien Testament, dont 44 citations directes et 86 allusions. Une question se pose : un collecteur d’impôts pouvait-il avoir cette compétence? Se pourrait-il, en revanche, que Matthieu se dissimule derrière la figure du scribe qui, instruit du Royaume des cieux, c’est-à-dire devenu un disciple, sait tirer du neuf et du vieux de son trésor (13, 52)?

     On estime que l’évangile provient de Syrie, et plus particulièrement d’Antioche où vivaient d’importantes communautés juives et chrétiennes. On se rappellera que Paul y a prêché durant deux sabbats consécutifs (Actes 13). Un grand nombre de spécialistes datent l’évangile des années 80-90, soit une dizaine d’années après la prise de Jérusalem et la destruction du Temple par les armées romaines de Titus. Cet événement a eu un impact considérable sur la communauté juive qui, privée désormais de son Temple et de ses institutions religieuses, a dû se redéfinir sur la seule base de la Loi. Les Pharisiens, réfugiés à Jamnia, ont été les artisans de cette réorganisation qui a entraîné des conséquences malheureuses pour la jeune communauté chrétienne.

     En effet d’après l’Évangile de Matthieu, « il ressort que l’opposition était vive entre le judaïsme traditionnel et le christianisme naissant qui faisait figure d’hérésie » (Jean Radermakers, Au fil de l’évangile selon saint Matthieu, tome II : Lecture continue, Institut d'études théologiques, Bruxelles, 1974, page 13). L’évangile s’élabore dans le climat de polémique et de controverse qui s’était installé entre les deux communautés, la ligne de partage étant la confession de foi en Jésus, Fils de Dieu et Messie, en qui s’accomplit l’espérance d’Israël. Le conflit s’est soldé par l’exclusion de la communauté synagogale des chrétiens qui confessent que Jésus est le Christ, comme en fait foi la crainte des parents de l’aveugle-né de se prononcer sur celui qui a donné la vue à leur fils  (Jean 9, 22).

 

Yves Guillemette, ptre

 

Source: Le Feuillet biblique, no 2268. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

Chronique précédente :
Le livre de Job - Les deux autres cycles du discours

 

 

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