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Justice sociale
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chronique du 30 septembre 2005
 

Les pauvres nous habillent !
 

Savez-vous si les vêtements que vous portez ont été fabriqués dans des ateliers de misère? La petite étiquette « fait en Chine », « fait au Mexique » ou « fait au Canada » ne vous dit pas si les droits de travailleuses et des travailleurs ont été respectés.

     Au Québec, les travailleuses et les travailleurs ne sont pas à l'abri des ateliers de misère (sweat shops). Déjà, les conditions de certaines travailleuses à domicile se rapprochent dangereusement de cette forme d'exploitation. Au début des années 1990, les industries du vêtement et du textile ont dû adopter de nouvelles stratégies afin de demeurer compétitives face aux importations des pays à bas salaire. Un des moyens choisis a été de fermer les manufactures et d'octroyer de petits contrats à des femmes pour qu'elles travaillent chez elles.

     Plusieurs milliers de femmes, en majorité des immigrantes, travaillent à domicile et doivent fournir à leur frais leur machine à coudre et leurs outils de couture. Pour remplir leurs quotas, elles doivent travailler de nombreuses heures pour un salaire à la pièce bien en deçà du salaire minimum. Sans sécurité d'emploi ou avantages sociaux, elles sont réduites à la précarité. De plus, l'isolement dans lequel elles se retrouvent rend difficile le regroupement et la solidarité.

     D'autre part, l'industrie du vêtement voit maintenant apparaître un certain nombre de petites entreprises précaires. Les employeurs délinquants installent des usines dans des locaux inappropriés (anciens garages, caves, etc.), engagent des travailleuses " au noir " et ne respectent aucunement les normes du travail. Poussées par la compétition entre sous-traitants, ces entreprises réduisent leurs coûts sur le dos de leurs employées.

Source : Coalition québécoise contre les ateliers de misère (ciso.qc.ca)

Extrait de l’évangile de Matthieu, 20, 1-16


c’est ce maître de maison debout avec l’aube, qui sort recruter des ouvriers pour sa vigne.
« Je vous embauche, leur dit-il, au salaire d’un denier par jour. »
Les ouvriers acceptent. Il les envoie dans sa vigne.
Vers la troisième heure, il sort de nouveau. Des hommes sont là, sur la place, à ne rien faire. Il les aperçoit et leur dit : « Allez, vous aussi, dans ma vigne. Je vous paierai ce qui est juste. » Ils partent donc.
Le maître ressort vers la sixième et la neuvième heure. La scène se répète. Vers la onzième heure, il sort une dernière fois. Des hommes sont là, sur la place, à ne rien faire. Il les aperçoit. Le maître leur demande : « Pourquoi restez-vous là, toute la journée, à ne rien faire ? »
Ils répondent : « Il n’y a pas de travail pour nous. »
Et lui : « Allez vous aussi dans ma vigne »
Le soir venu, le propriétaire de la vigne dit à son régisseur : « Fais venir les ouvriers et donne à chacun son salaire. Tu commenceras par payer les derniers et tu finiras par les premiers. »
Les ouvriers de la onzième heure s’avancent : chacun reçoit un denier. Les ouvriers de la première heure s’avancent à leur tour, sûrs de recevoir davantage : chacun reçoit lui aussi un denier. Ils protestent, se plaignent au maître de la maison : « Regarde, ceux-là n’ont travaillé qu’une heure et tu les traites comme nous qui sommes fourbus après toute une journée de travail, et par cette chaleur ! »
A l’un deux, le maître rétorque : « Ami, en quoi t’ai-je lésé ? Nous étions bien d’accord pour un denier, non ? Prends ton dû et rentre chez toi. Au dernier arrivé, je veux donner autant qu’à toi. N’ai-je pas le droit de faire ce que je veux avec ce qui m’appartient ? Ou est-ce ton cœur qui tourne en mal ma bonté ? » …

Commentaire

     Dans son évangile, Matthieu nous livre cette histoire des ouvriers de la dernière heure. Lorsqu’il écrit, plus de 50 ans ont passé depuis que Jésus l’avait racontée aux paysans et paysannes de Galilée. Matthieu, qui s’adresse à des Juifs qui croient que Jésus est le messie, en fait du royaume des cieux. Le maître de la vigne, c’est Dieu ; les ouvriers sont les Juifs de différentes générations ; les ouvriers de la dernière heure sont les non-Juifs qui ont cru en Jésus. Tous reçoivent le même salaire de la part d’un Seigneur juste. Les derniers arrivés passent en premier dans le Règne de Jésus. Matthieu réinterprète la parabole qu’il a reçue de la tradition.

     Mais dans quel contexte Jésus a-t-il raconté cette histoire et dans quel but. Il décrit une situation bien connue des gens de Galilée. Le maître de la vigne est un propriétaire terrien qui appartient à la classe dirigeante et qui opprime les paysans. Il possède un vignoble, une entreprise qui élabore un produit de luxe, le vin, destiné aux élites du pays et à l’exportation vers les grands centres. C’est un investissement à long terme puisqu’il faut au moins quatre ans de travaux avant que la vigne puisse produire. Ces propriétaires, qui avaient l’habitude d’avancer de l’argent aux petits paysans coincés, saisissaient leurs terres lorsque ceux-ci ne pouvaient honorer leurs dettes.
     Dans cette histoire, la vendange est tellement bonne et abondante que le propriétaire n’arrive pas à calculer combien de main-d’œuvre il aura besoin. Le temps presse. Remarquons que les relations du maître sont unilatérales. Il offre un salaire minimum : un denier, le prix de 12 heures de travail pour un journalier précaire. C’est lui qui détermine ce qui est juste ! Aux derniers ouvriers, il ordonne tout simplement d’aller travailler.

     La place du village est pleine de chômeurs qui attendent jusqu’au soir que quelqu’un les engage. à l’époque de Jésus, la Galilée a connu un développement dramatique de grandes propriétés terriennes :beaucoup de petits paysans avaient perdu leurs terres et étaient réduits à mendier un travail journalier pour survivre. Ces « corvéables à merci », ces « jetables après usage », formaient une classe de pauvres mal nourris et malades, dans une position de faiblesse. La stratégie des maîtres était de n’engager ces hommes que pour une journée à la fois, les maintenant dans une position de dépendance et d’exploitation.

     Dans la deuxième partie de l’histoire, l’heure de la paie, nous assistons à une scène d’humiliation : le maître fait payer les derniers en premier. C’est un affront pour ces hommes qui ont trimé dur sous le soleil durant 12 heures. Ils sont insultés avec raison et l’un d’eux ose réclamer au nom de ses compagnons. « C’est honteux ! Quoi ? Notre journée de travail ne vaut rien ? » Eux qui n’ont que leurs bras et leur sueur à vendre pour survivre, on les traite comme des moins que rien ! Humilier un travailleur pauvre, c’est une façon de le maintenir dans la dépendance. Si celui-ci proteste, il est congédié : « Prend ton denier et va-t-en ! » Il terrorise les autres par ce geste. Pour comble, le maître considère qu’il leur fait la charité : « Tu me critiques parce que je suis bon. Après tout, je peux faire ce que je veux avec ce qui m’appartient. » Voilà un blasphème aux yeux de Jésus. Comment cet homme s’est-il enrichi ? Avec le travail exploité des plus pauvres, en les privant de leur subsistance ! La terre a été donnée par Dieu au peuple d’Israël qui en est l’administrateur. La terre appartient à Dieu et doit être répartie à tous. Jésus raconte cette histoire aux paysans de son pays pour leur ouvrir les yeux sur les causes de leur pauvreté. Le royaume de Dieu vient mettre fin à une telle situation, Dieu intervient pour défendre le pauvre. « En marche les pauvres ! Le règne des cieux est à vous »

     Cette parabole est d’une actualité impressionnante ; dans la mouvance de la mondialisation, les compagnies cherchent la main d’œuvre la plus vulnérable possible pour devenir compétitives sur le marché. La campagne mondiale pour l’élimination de la pauvreté est un appel dans ce sens : en finir avec l’exploitation des classes pauvres de la terre. 1,2 milliards de personnes vivent encore avec moins d’un dollar par jour ! L’élimination de la pauvreté et de ses causes est une priorité incontournable les disciples de Jésus.

Claude Lacaille

(voir : Parables as Subversive Speech : Jesus as Pedagogue of the Oppressed, de William R. Herzog II, Westminster/John Knox Press, 1994, chapter 5)

Source: Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

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