La religion du malin

Le 15 août 2008, le Time de New York publiait un article signé par Amy Sullivant intitulé « Un test de foi pour Obama et McCain ». La première rencontre de la campagne électorale entre Barack Obama et John McCain avait lieu un dimanche soir, le 17 août, dans le sanctuaire d’une méga-église évangélique animée par un pasteur baptiste du sud dans le rôle du grand interrogateur.

     À l’opposé des autres pays de l’Occident, les Étasuniens demeurent opiniâtrement religieux. 85% de la population considère que la religion est importante dans leur vie et 70% estime que le président doit être un croyant. C’est pourquoi une soirée à discuter des problèmes de croyance avec le pasteur évangélique le plus populaire au pays semblerait être une démarche très rentable pour gagner des votes. Obama ne veut pas laisser la religion aux Républicains; sauf dans le cas des Évangélistes blancs, celui-ci devancerait McCain chez les Protestants, les Catholiques, les Juifs et les Musulmans.

     On trouve sur Internet un site sous le nom de God-o-Meter, qui mesure scientifiquement des facteurs tels que le nombre de fois où les candidats parlent de dieu. Chaque candidat est scruté scrupuleusement sur ses références à la religion durant la campagne électorale!

     Les Évangélistes blancs sont un groupe clé. La pierre d’achoppement semble être la question de l’avortement, même si les questions de pauvreté et d’environnement sont aussi pour ces gens des questions de poids. Les Évangélistes s’attendent à ce que McCain parle de sa propre foi. Il est plus discret sur ce point que les Bush qui en parlaient abondamment. « S’il n’est pas à l’aise pour dire ‘Jésus vit dans mon cœur’ et le crier bien fort, il est mieux de se taire. » Aussi l’image de la fille de Madame Palin, candidate à la vice-présidence pour les Républicains, a été au centre des discussions lors de la Convention. Adolescente de 17 ans, elle était présente à la nomination de sa mère avec son enfant « illégitime » dans les bras, accompagnée de son petit copain. D’où les discussions sur la fornication, la famille, le bon exemple.

     Nous sommes en droit de nous demander de quelle religion parle-t-on? Bush a été un prédicateur de cette religion qui déclare la guerre au nom de son Dieu pour accaparer les ressources de la terre au profit de l’American Way of Life qu’il faut maintenir à tout prix, même la destruction de la planète. N’est-il pas ici question d’une religion qui utilise le nom de Dieu à des fins démoniaques? Faut-il se réjouir, ou au contraire se désoler, qu’une soi-disant religion moralisatrice et hypocrite exige la soumission au dieu argent. In God we trust ou In Gold we trust?

Luc, 4, 1-13

Alors Jésus rempli du souffle saint quitta le Jourdain. Le souffle l’entraîna dans le désert.

Là, durant quarante jours le Provocateur l’éprouve. Il ne mange pas pendant ce temps. Alors que ces jours sont écoulés, il a faim. Le Provocateur lui dit : Si tu es Fils de Dieu, ordonne à cette pierre de se transformer en pain! Jésus lui répond qu’il est écrit : « Le pain ne suffira pas à faire vivre l’homme. »

Il le conduit vers les sommets; le Provocateur lui fait voir en un instant la totalité des royaumes habités et lui dit : Je peux te donner tout le pouvoir et la gloire de ces royaumes, ils m’ont été livrés et je les donne à qui bon me semble. Ils seront à toi, entièrement, si tu te prosternes devant moi. Jésus répond qu’il est écrit : « Tu adoreras le Seigneur ton Dieu et à lui seul tu rendras un culte. »

Puis il l’amène à Jérusalem. Il le place au sommet du Temple et lui dit : « Si tu es fils de Dieu, jette-toi en bas. Ainsi qu’il est écrit : « Il commandera à ses anges de veiller sur toi, et ils te soutiendront dans leur bras pour que ton pied ne heurte pas de pierres. » Jésus répond qu’il a été dit : « Tu n’éprouveras pas le Seigneur, ton Dieu ».

Le Provocateur a épuisé toutes sortes d’épreuves. Il s’est retiré de lui, attendant le moment opportun.

(Aussi, pour référence, le Premier livre des Rois, chapitre 19, 10-15)

Méditation sur les tentations

Que fais-tu ici ?

Je suis agité d’une passion furieuse pour mon Dieu, le Dieu de Moïse, le Dieu d’Élie, le Dieu de Jésus. Tous les prophètes ont disparu ; il ne reste que nous et ils veulent notre peau.

Sors et tiens-toi sur la montagne à la disposition de ton Dieu. Il va passer.

Alors survint un ouragan puissant semant mort et désolation. Dans son tourbillon de ténèbres, je fus emporté loin dans le désert, là où se trouve la multitude des affamés. Alors le Malin me montra ces foules décharnées par la misère et la terreur. J’en eus des haut-le-cœur.

« Toi qui as la foi, prie ton dieu de faire tomber le pain du ciel pour ces malheureux. Pourquoi ton dieu laisse-t-il ainsi mourir ses enfants ? N’est-il pas leur providence ? Va voir les riches et demande-leur de faire la charité, touche leur cœur. Ce sont des gens généreux et ils t’aideront à soulager la misère. »

Furieux je rétorquai : « Loin de moi, Provocateur, avec ta religion d’hypocrisie. La vue de ces foules affamées me remue au plus profond et m’indigne à la fois. Notre Père du ciel sait très bien pourquoi ils sont ainsi abandonnés et moribonds. ‘C’est la justice que je veux, dit-il, et non des prières et des rituels. Seule la justice saura calmer les faims et les soifs de l’humanité.’

Seigneur, ne nous mets pas à l’épreuve et garde nous du Malin.

Puis un tremblement de terre secoua la montagne où je me trouvais et pendant un long moment ce ne furent que grondements sourds, nuages de poussières et mouvements violents. Alors le Malin s’approcha et me montra au loin la totalité des pays habités. « C’est moi qui gouverne ici. J’ai le pouvoir, l’argent et la force. Tu ne peux rien contre mes lois ; elles sont incontournables. Le marché est la loi suprême, c’est lui seul qui mènera l’humanité au bonheur. Si tu veux améliorer le sort des pauvres, enseigne-leur à travailler fort, à ne pas revendiquer plus que ce que le marché peut donner, à être patients, car un jour, ils auront du beurre sur leur pain. Associons-nous ! Faisons alliance, toi et moi, car tous deux nous voulons leur bien. »

« Es-tu malade !? Le seul Dieu que je sers libère l’opprimé, lui ouvre les yeux pour qu’il voie, les oreilles pour qu’il entende, le cœur pour qu’il soit solidaire avec ses sœurs et frères. Va au diable, Provocateur. »

Seigneur, ne nous mets pas à l’épreuve et garde nous du Malin.

Alors en songe, je me retrouvai à Saint-Pierre de Rome au sommet de la coupole. Alors le Malin vola vers moi : « Tu vois ces bonnes gens à genoux. Elles viennent ici chercher réconfort dans leurs peines et leurs souffrances. Elles aiment la tranquillité des églises, l’odeur de l’encens et le chant grégorien. Elles prient, récitent des chapelets, font des neuvaines, invoquent les saints de venir les secourir, confessent leurs péchés et vont communier. Voilà de pieuses et bonnes personnes qui vivent saintement. »

Je lui répliquai : « Décampe d’ici, Provocateur. Ta religion est faite de simagrées et de magie. Mon Dieu veut ses enfants debout, libres et responsables. Il ne veut pas les entendre marmotter d’interminables orémus. Il sait ce dont ses enfants ont besoin. Toi, tu utilises le nom de Dieu frauduleusement pour justifier tes guerres, accaparer les richesses des peuples et détruire la terre que j’ai crée. Ta religion me fait vomir de dégoût, bouche de mensonge. »

Alors le diable s’enfuit et une brise légère me caressa le visage. Un fin silence se fit. Dieu passait. Je m’inclinai vers le sol, le cœur en paix.

Seigneur, ne nous mets pas à l’épreuve et garde nous du Malin.

Source: Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

Chronique précédente :
Des promesses sans lendemain?

| Accueil | SOURCE (index) | Justice sociale (index) | Vous avez des questions? |

www.interbible.org