Le président Trump qui s’apprête à brandir la Bible (Patrick Semansky/AP).

La Bible en spectacle avec le président Trump

Marie-Claude LalondeMarie-Claude Lalonde | 15 juin 2020

Pendant des jours, les images ont tourné en boucle sur les chaines de nouvelles en continu. Les pages des journaux n’ont pas fait exception. Qui ne connaît pas George Floyd, feu George Floyd? Sans qu’il ne le sache, le racisme est devenu sa cause et a fait exploser d’émotion la planète entière. Des manifestations ont eu lieu dans de nombreux pays. Même en Syrie, des jeunes ont manifesté leur dégout face à cet acte outrageux. Une scène qui se répète aux États-Unis où de nombreux Afro-Américains ont été tués ou battus par la police au fil des ans. Et pendant ce temps…

Donald Trump pense envoyer l’armée dans les états où, selon lui, les gouverneurs n’arrivent pas à ramener le calme. Il ajoute l’insulte à l’injure en faisant disperser à coup de gaz lacrymogènes et de grenades assourdissantes des manifestants pacifiques pour ouvrir le chemin et se rendre devant l’église St. John’s à Washington. S’il est possible d’ajouter l’insulte à l’insulte à l’injure, il nous l’a prouvé posant fièrement devant l’église placardée, Bible à la main bien en évidence. Il n’a pas prié, il n’a pas mentionné la violence et le racisme policier ni même mentionné le nom de George Floyd. Il a posé pour les caméras, pour être certain qu’on le voie. Et pour ça, on l’a vu!

Depuis longtemps, il est clair que Donald Trump brandit la Bible comme s’il s’agissait d’une machine à acheter des votes ou un programme politique et non pas par convictions religieuses. En fait, si la Bible était un véritable programme politique, Trump serait incapable de réaliser la moindre promesse qu’il contient.

Les évangiles nous parlent de l’importance de notre prochain : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même. » (Mt 22,39) Aucune traduction ne dit tu aimeras ton prochain comme toi-même s’il est aussi blanc que toi. Et pour cause! Cela est aux antipodes même du message évangélique qui, au lieu de souligner les différences, tente de les réconcilier. Un fait saisissant à l’époque de Jésus et qui demeure criant d’actualité.

Oui vous tous qui avez été baptisés en Christ, vous avez revêtu Christ. Il n’y a plus ni Juif, ni Grec ; il n’y a plus ni esclave, ni homme libre ; il n’y a plus l’homme et la femme ; car tous, vous n’êtes qu’un en Jésus Christ. Et si vous appartenez au Christ, c’est donc que vous êtes la descendance d’Abraham ; selon la promesse, vous êtes héritiers. (Galates 3,26-27)

Saint Paul nous rappelle que pour Jésus, la nationalité, l’état de liberté ou même le genre importent peu. Malheureusement, en société, ce n’est pas toujours le cas. Le racisme et la discrimination existent toujours, mais heureusement l’indignation aussi existe toujours. L’image frappe dans la triste histoire de George Floyd parce que le policier même chargé de protéger la population est l’agresseur. Toutefois, le racisme n’est pas toujours aussi spectaculaire. Il s’immisce dans les petits événements quotidiens de la vie d’une personne et, au fil du temps, fait d’elle une citoyenne de seconde zone. Même chez nous, il ne faut pas se le cacher, il y a des actes de discrimination et de racisme tous les jours. Les témoignages recueillis par nos médias sont sans équivoques. De plus, nous croyions avoir avancé avec les discussions entourant le profilage racial et voilà que plusieurs personnes expliquent comment, il n’y a pas si longtemps, elles ont été interpellées pour rien.

Les manifestants d’aujourd’hui tout comme ceux qui les ont précédés manifestent haut et fort que toute vie a de l’importance et que les abus ne sont plus tolérés. La singularité des événements des dernières semaines est qu’il semble que de plus en plus de personnes, de toutes origines confondues et de tous les coins de la planète, trouvent qu’assez, c’est assez. La vie des noirs compte (#BlackLivesMatter). En fait, la vie compte, quelle que soit la couleur de la peau. Tous veulent faire avancer les choses et marcher vers l’éradication du racisme dans nos sociétés.

Tous sauf un qui lui, pense à se faire réélire en brandissant une Bible au milieu du chaos qu’il préfère ne pas voir. M. Trump, « Bible matters » parce que si vous l’ouvriez de temps à autre, vous sauriez que la vie des personnes noires compte tout autant que la vôtre quoique votre arrogance ne vous permettrait certainement pas de le concevoir.

Oui, la vie des noirs compte !

Marie-Claude Lalonde est directrice nationale de l’Aide à l’Église en détresse (AÉD Canada).

Hammourabi

Justice sociale

Les textes proposés provoquent et nous font réfléchir sur des enjeux sociaux à la lumière des Écritures. La chronique a été alimentée par Claude Lacaille pendant plusieurs années. Depuis 2017, les textes sont signés par une équipe de collaborateurs.