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La lampe de ma vie
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chronique du 28 avril 2006
 

« Je ne crois pas en un Jésus qui est mort sur la croix pour nos péchés. »

Question« Je crois en un Jésus qui a été mis à mort à cause des choix qu’il a fait dans sa vie, comme Sacco et Vanzetti, comme Rosa Luxembourg et plusieurs autres, mais je ne crois pas en un Jésus qui est mort sur la croix pour nos péchés. » Que penser de ces paroles prononcées par Bernard Émond, réalisateur du film La Neuvaine, lors d’une conférence au Plateau Mont-Royal, à Montréal, le vendredi 17 février 2006?

RéponseCe n’est pas tout d’être catholique ou d’avoir été élevé dans cette religion, encore faut-il la connaître, ou en connaître du moins ses articulations les plus fondamentales. Il y a, entre les causes politiques de la mort de Jésus et la lecture de foi qu’en ont fait ceux et celles qui croyaient en lui, une distance historique et, dans cette distance, s’est effectivement opéré un changement de paradigme. Pourquoi ce changement? Pourquoi ce renversement? Pourquoi une autre compréhension de ce qui était effectivement advenu? Pourquoi l’émergence d’une lecture différente du même événement?

     Les Évangiles disent très clairement qu’au lendemain de sa mort, les disciples de Jésus étaient dans le même état d’esprit que ceux et celles qui assistèrent, impuissants, à la mort de Sacco et Vanzetti, de Rosa Luxembourg et de tous les autres... Pareil! Jusqu’ici, au niveau du groupe de sympathisants, aucune différence! Même sentiment d’injustice, même désarrois, même peur devant les possibles représailles. Jusqu’ici rien ne différencie la mort de Sacco et Vanzetti, de Rosa Luxembourg ou de Jésus de Nazareth. Ils ont tous été injustement condamnés.

     La différence, c’est que Jésus seul, est ressuscité. Jésus seul, après sa mort, a reçu de Dieu une vie nouvelle pour finir le travail qui n’était pas achevé. Il avait prêché toute sa vie l’arrivée éminente du règne de Dieu et bien il a reçu de Dieu, après sa mort, une nouvelle fonction et cette nouvelle fonction va devenir son nouveau ministère qui perdurera jusqu’à la fin des temps, jusqu’à ce que l’humanité en soit complètement transformée, jusqu’à la fin du monde! Cette nouvelle fonction s’appelle « l’exaltation » et elle consiste à détruire « toute Principauté, toute Domination et Puissance » (1 Co 15,24) à savoir tout mauvais exercice du pouvoir sous toutes ses formes tant au niveau individuel qu’au niveau collectif. Le travail de Jésus est beaucoup plus efficace et va beaucoup plus loin que celui de Sacco et Vanzetti, que Rosa Luxembourg et de tous les autres parce que Dieu lui a permis de traverser la mort en sens inverse pour influencer notre histoire, pour agir en elle. Sa tâche consiste toujours à déraciner le mal à sa source, à savoir là où il apparaît : dans le cœur humain. Jésus continue de faire advenir le règne de Dieu dans les blessures, dans les péchés, dans les limites de chacun, en autant que nous les lui présentions, dans une démarche d’authenticité. Il continue toujours cette œuvre de guérison qu’il avait jadis exercé.

     Dès lors le Jésus historique ne peut se comprendre qu’à la lumière du Christ de la foi, à savoir à la lumière de ce qui lui est arrivé après sa mort. Inversement, le Christ de la foi ne peut se comprendre qu’à la lumière du Jésus historique. Ce qui lui est arrivé après sa mort ne se comprend qu’à partir des choix qu’il a fait dans sa vie, de ses paroles, de ses actions, de son enseignement. L’un et l’autre vont ensemble et s’interpellent mutuellement. Ils sont, en christianisme, indissociables.

     À partir du moment où l’on conçoit la nature divine de Jésus, une relecture de sa vie historique s’opère aussi compte tenu de ce nouveau paramètre. On ne voit plus les choses de la même façon. Le point de vue est différent. Dans cette perspective, on s’aperçoit qu’il a épousé notre condition humaine à fond... jusqu’à la mort. Ces épousailles de notre propre humanité ont été vue, par les premiers chrétiens, comme le plus grand acte d’amour de Dieu pour nous car, à partir de ce moment, pas une de nos souffrances, pas une de nos limites, pas une de nos difficultés ne lui sont inconnues.

     À l’inverse, Jésus de Nazareth n’a pas que subit son supplice. Il y a aussi ajouté son acquiescement. Il y a consenti. Ce fut pour lui non seulement un geste d’obéissance, mais aussi un geste d’amour de toute l’humanité souffrante. Il nous a aimé « jusqu’à l’extrême » (Jn 13,1). Jésus ne fut donc pas que prisonnier des circonstances. Il a aussi affirmé dans ses chaînes son entière liberté. Il nous a aimé dans son humanité et dans sa divinité. Qu’attendons-nous pour nous laisser aimer par Celui qui a traversé le temps et qui est encore aujourd’hui bien Vivant?

     Quand Paul dit que Jésus est mort sur la croix « pour nos péchés » (1 Co 15,3), il confesse ce qu’il a bien sûr appris, mais il confesse aussi en même temps ce qu’il a lui-même vécu. Il confesse qu’il a été, lui aussi, rejoint par Jésus au delà de sa mort, dans son péché, et que cette rencontre a, pour lui, tout transformé. C’est vrai pour Paul (Ac 9,1-19), c’est vrai pour Simon-Pierre (Jn 21), c’est vrai pour Thomas (Jn 20,24-29), c’est vrai pour saint Augustin, c’est vrai pour les Pères de l’Église, c’est vrai pour tous les saints et toutes les saintes et c’est encore vrai pour nous aujourd’hui! Jésus, dans son geste d’abandon à cette mort sacrificielle, dans cette immolation de lui-même, les a rejoint au niveau le plus fondamental de leur être. Celui qui les a rejoint les a aussi, en même temps, transformé. Celui qui les a transformé, leur permet aussi, de reprendre autrement leur vie, et d’agir à leur tour politiquement sur le monde qui leur est confié.

Yolande Girard

Chronique précédente :
Le Carême?

 

 

 

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