ÉCOLE DE LA PRIÈRE 5/8

Une prière angoissée de Jésus

Le Christ au jardin des Oliviers
Carl Heinrich Hoffmann (1818-1896)

Lire Luc 22, 39-46

Dans l'Évangile selon saint Luc, il y a la prière joyeuse au cœur des événements heureux et aussi la prière douloureuse aux heures de désolation. Au chapitre 22, l'évangéliste nous présente la prière de Jésus qui, au mont des Oliviers, traverse un combat redoutable. C'est le modèle de toute prière qui vainc les tentations et les difficultés de tous les jours, de la prière qui englobe toutes nos détresses.

Et sortant, ils se rendit comme de coutume au mont des Oliviers, et les disciples le suivirent. Arrivé en ce lieu, il leur dit : Priez, pour ne pas entrer en tentation. Et il se sépara d'eux d'environ un jet de pierre et, s'étant mis à genoux, il priait en disant : Père, si tu veux, écarte de moi cette coupe! Cependant, que ce ne soit pas ma volonté, mais la tienne, qui se fasse (Luc 22, 39-42).

Le récit présente Jésus de façon inhabituelle. Avant et après le moment d'angoisse, il est calme. En outre c'est la seule fois qu'il cherche compagnie et soulagement, qu'il souhaite une proximité avec ses disciples tout en prenant une distance. Cela ne signifierait-il pas que tout ce qu'il va vivre est profondément nôtre tout en étant à lui? En ce soir donc, il sera seul humainement puisque les disciples dormiront (v. 45), alourdis par la tristesse, incapables d'entrer dans ce scandale que représente pour eux la venue d'un Messie souffrant : Jésus, seul, entre en dialogue avec son Père dans une attitude de foi totale. Il laisse paraître, d'une part, le trouble qui l'étreint à une heure décisive et, d'autre part, sa volonté d'être disponible, de se soumettre et de s'abandonner, de faire face à la dure et cruelle réalité du péché, de la mort imminente, de cette coupe imbuvable.

Jésus s'adresse au Père qui l'exauce toujours; or, paradoxalement, à l'agonie, sa prière ne sera pas exaucée selon le désir exprimé. Ce que demande le Fils semble incompatible avec le Père. Le Père et le Fils sont dans un certain désaccord, un écart, mais l'accord de fond n'est pas touché. Le drame est infini; il est de l'ordre du mystère. Et tout se déroule sous le signe de l'amour. De l'amour du Père sans lequel, le Fils n'est plus rien. Et de l'amour de ses disciples et de nous pour qui il va jusqu'au bout dans la fidélité.

Cette invitation insistante — elle encercle la prière de Jésus (vv. 40. 45) — est une des plus touchantes instructions du Seigneur Jésus. Elle nous alerte sur le danger qui nous guette de fuir nos responsabilités. Que de craintes de nous engager et de nous dévouer! Que de procédés pour nous dérober, aux appels et aux besoins de notre entourage! La prière permet de regarder en face notre peur pour agir lucidement, dans la certitude que le Seigneur, par sa victoire nous délivre de ce qui est embûche sur la route de la responsabilité et de l'amour.

Julienne Côté

Suite de la série :
La prière de Jésus (1)

Chronique précédente :
Pour Job, le malheur est-il un don de Dieu?