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La lampe de ma vie
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chronique du 18 mars 2016

 

Amos : l’injustice source de violence

Amos

Le prophète Amos
fragment de fresque des XIIe et XIIIe siècles
Pinacothèque de Paris

 

Un siècle après Élie surgissent de nouveaux prophètes. La force de parole et la lucidité de certains d’entre eux vont éclairer, d’une lumière nouvelle, le visage du Dieu d’Israël. Pour illustrer ce propos, je vous invite à écouter attentivement Amos qui relie la violence avec le non-respect de la solidarité, du droit et de la justice.

     Amos ne mâche pas ses mots. On trouve, dans ses oracles, des outrances difficiles à entendre aujourd’hui. Il est seul face aux « puissants » de son temps et il donne à sa parole une force suffisante pour qu’elle ait une chance d’être entendue. Ce qui me séduit personnellement vient de la responsabilisation de l’humain qui se voit mis en face de ses choix. Rien ne sert de pleurer et d’implorer Dieu dans le malheur qui m’accable, ni d’accuser la destinée. La violence a sa source dans les agissements de chacun et tout particulièrement des responsables. La prière et les grandes déclarations sur Dieu ne servent à rien si le droit et la justice ne trouvent pas leur place dans la société. Pour s’en convaincre, il suffit de revenir à l’actualité de notre temps. Les gouvernements corrompus sont aujourd’hui cause de guerres civiles et de malheurs sans nom. Les réfugiés qui convergent vers l’Europe en flot ininterrompu en savent quelque chose.

Amos, le défenseur du droit et de la justice

     Vers 740 av. J.-C., un homme quitte le petit royaume de Juda et vient proférer ses oracles dans les sanctuaires royaux de Samarie, capitale du royaume d’Israël. Il n’appartient pas à une « famille de prophètes ». Il a été saisi par une Parole qu’il tient à dire ouvertement (Am 6,14-15). Comme il le dit lui-même, Amos a été saisi par le Seigneur. Il a dû vivre une expérience mystique forte de rencontre avec Dieu qui devient, dès lors, la source des paroles qu’il profère.

     Amos reste un homme de son temps et les mots qu’il utilise n’ont rien de diplomatique. Ils peuvent apparaître violents aux personnes peu habituées à ce langage. Par la bouche de son prophète, Dieu exprime sa colère et profère des menaces. Les oracles d’Amos dénoncent des situations insupportables aux yeux de Dieu. Même si ces oracles sont variés, Amos parle en priorité du royaume de Samarie dont il dénonce avec force la corruption qui semble gangrener le pouvoir en place :

Ainsi parle le Seigneur : À cause de trois crimes d’Israël, et même de quatre, je l’ai décidé sans retour! Ils vendent le juste pour de l’argent, le malheureux pour une paire de sandales. Ils écrasent la tête des faibles dans la poussière, aux humbles ils ferment la route. Le fils et le père vont vers la même fille et profanent ainsi mon saint nom. Auprès des autels, ils se couchent sur les vêtements qu’ils ont pris en gage. Dans la maison de leur Dieu, ils boivent le vin de ceux qu’ils ont frappés d’amende. (Am 2,6-8)

     Amos est le défenseur du pauvre et de l’exploité qui n’a plus aucun droit. Les classes aisées de la société sont corrompues et le culte des idoles triomphe. Le prophète explique les raisons de la « colère de Dieu » et annonce les conséquences désastreuses du comportement de la classe dominante de Samarie, les rois, leurs courtisans et les marchands. L’incurie du pouvoir et l’absence du droit et de la justice auront, dit-il, des suites terribles pour toute la population. Le royaume de Samarie court le plus grand danger. De fait, en 721 av. J.-C., Samarie est entièrement détruite par les armées de Sargon II, roi d’Assyrie et une partie de la population est emmenée en exil :

Dites : Assemblez-vous sur les montagnes de Samarie, voyez les grands désordres au milieu d’elle ; en elle, que d’oppressions ! Ils n’ont pas su agir avec droiture – oracle du Seigneur –, ceux qui entassent dans leurs palais violence et rapine. C’est pourquoi – ainsi parle le Seigneur Dieu – l’ennemi encerclera le pays ; il te dépouillera de ta force et tes palais seront pillés. (Am 3,9-11)

     Amos met encore Dieu au centre de tous ces événements comme « maître de l’Histoire ». Il ne peut pas encore imaginer qu’il en aille autrement. Pour lui tout est dans sa main. Pourtant des éléments nouveaux apparaissent; l’homme et ses choix prennent une grande place. Si la guerre se déchaîne et si le malheur frappe le peuple, c’est en raison de la corruption de la classe sociale au pouvoir dont la rapacité détruit le fondement de la société. Là où la solidarité, le droit des plus pauvres et la justice disparaissent, le désordre et la violence s’installent et la cité n’a plus aucune base sur laquelle assurer son avenir. La violence ici n’a rien à voir avec un Dieu punisseur. Avec Amos, l’homme prend peu à peu conscience de sa propre responsabilité dans les malheurs qui le touchent.

     En lisant ces quelques extraits du prophète, je ne peux m’empêcher de faire du retour sur notre temps. L’amour de l’argent ne date visiblement pas d’aujourd’hui. S’il est parfaitement légitime de l’utiliser, il faut rester conscient qu’il peut aussi se transformer en idole qui dévore et détruit tout, sans aucun respect pour celui qui n’en a pas. Amos parle aux hommes et aux femmes de son temps, mais sa parole garde toute sa pertinence pour ceux et celles qui l’entendent aujourd’hui. Deux mots sont essentiels à ses yeux pour retrouver la paix : le droit et la justice.

Je déteste, je méprise vos fêtes, je n’ai aucun goût pour vos assemblées. Quand vous me présentez des holocaustes et des offrandes, je ne les accueille pas ; vos sacrifices de bêtes grasses, je ne les regarde même pas. Éloignez de moi le tapage de vos cantiques ; que je n’entende pas la musique de vos harpes. Mais que le droit jaillisse comme une source ; la justice, comme un torrent qui ne tarit jamais! (Am 5,21-24)

Roland Bugnon

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Bible et violence (série)

 

 

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