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Cultiver la confiance 1/5
Pierre Prud’homme | 25 novembre 2019
« Préoccupez-vous du Royaume de Dieu et de sa justice. » (Mt 6, 33)
Le 18 septembre dernier, la Maison de la Parole de Saint-Hyacinthe (Québec) m’invitait à prononcer une conférence sur le thème « Cultiver la confiance : engagement social et Parole de Dieu ». Voici le premier article d’une série de cinq qui en résume l’essentiel.
Une confiance qui a mal à son âme
La confiance a mal à son âme à l’ère du réchauffement climatique et de la perte de la biodiversité qui progressent plus rapidement que les scientifiques ne l’avaient prévu, affectant la confiance en l’avenir et faisant place à l’éco-anxiété comme problème de santé publique.
La confiance est mise en lambeaux par le phénomène des « fake news » fomentées par des gens qui ont un agenda politique pour discréditer les artisans d’une information crédible et fondée, condition de la qualité de nos débats démocratiques nécessaires à notre quête du bien commun.
Dans nos familles, avec nos voisins ou dans nos milieux de travail, la confiance souffre de nos relations marquées par les luttes de pouvoir, les intérêts financiers, la pensée unique, le mensonge et la fourberie, faisant taire les discussions basées sur les valeurs communes, telles l’authenticité, la franchise, la quête de vérité, le courage, la tendresse et la bienveillance.
Or notre espérance est tributaire de cette confiance en l’avenir, dans nos institutions, et entre nous. Mais quand on parle de confiance, de quoi parle-t-on?
Confiance, qui es-tu?
Quel plus beau texte de Matthieu pour parler de la confiance alors que Jésus de Nazareth nous invite à ne pas nous inquiéter de la nourriture, de la boisson ou des vêtements dont nous avons besoin : « Regardez les oiseaux du ciel : ils ne sèment, ni ne moissonnent… Regardez les fleurs des champs : elles ne tissent pas… Ne vous inquiétez donc pas… Votre Père qui est au ciel sait que vous en avez besoin. » (Mt 6,26-32)
Mais comment apporter de la crédibilité à ce texte à l’ère des changements climatiques et ses extrêmes qui engendreront plus de sécheresses, d’inondations, de feux de forêts, multipliant les lieux et moments de disettes alimentaires, de famines, de privation d’eau, à l’origine de déplacements de population, de conflits et de guerres pour l’occupation du territoire?
Ce texte peut facilement devenir une invitation à une confiance qui est illusoire, une confiance qui déresponsabilise et qui justifie l’inconscience, si je ne prends pas soin de rajouter cette phrase de Jésus : « Préoccupez-vous du Royaume de Dieu et de la vie juste qu’il demande, et Dieu vous accordera aussi tout le reste ».
La justice, condition de la confiance
Car c’est cette condition qui rend crédible et qui donne sens à tout ce qui précède. La justice s’avère une condition pour accéder à la confiance. En cela, Jésus est fidèle à l’histoire juive alors que les appels à la justice suintent de partout dans l’Ancien Testament.
Plus, pour Jésus, l’option pour la justice a quelque chose à voir avec le bonheur. « Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice, ils seront rassasiés » (Mt 5,6) et « Heureux ceux qui sont persécutés quand ils agissent en toute droiture, le Royaume des cieux est à eux » (5,10).
La confiance et la justice ne tombent pas du ciel comme par magie. La confiance a ceci de particulier : elle porte dans son ADN une dimension collective. Le mot latin « con » signifie « avec ». La confiance contient dans sa génétique nécessairement un plan d’action qui commence par aller vers les autres et être avec les autres. Elle est foncièrement collective.
Opter pour la confiance, c’est choisir de répondre à l’invitation de Jésus de Nazareth de discerner, avec d’autres, ce qu’implique la vie juste pour aujourd’hui. Car il ne nous a pas donné de recettes magiques pour y arriver. C’est à nous de travailler à mettre en place les conditions de la confiance dans nos rapports entre nous, avec la nature, avec la Planète et avec l’ensemble du Vivant.
Cet appel à la vie juste de Jésus se situe en droite ligne avec l’histoire d’Israël qui foisonne d’appels à la justice par les prophètes, à travers les livres du Deutéronome, des Proverbes, des Psaumes et autres.
Ce n’est pas que théorique tout ça. C’est bien concret. La vie juste, condition de la confiance, demande, appelle et exige l’engagement social.
Pierre Prud’homme est président du conseil d’administration du MTC (Mouvement des travailleuses et travailleurs chrétiens) de Montréal et membre de la Commission Engagement et Foi du MTC national. Il est fortement préoccupé par la défense de droits et la justice sociale et environnementale.
