Mes Évangiles
Éric-Emmanuel Schmitt
Paris, Albin Michel, 2004, 172 p.

En écrivant L’Évangile selon Pilate (Albin Michel, 2000), le dramaturge pensait déjà à une version théâtrale de son roman. Mes Évangiles est donc une réécriture du roman pour alléger le récit et le rendre plus percutant pour la scène. Cette nouvelle version conserve la structure bipartite du roman, mais l’auteur y ajoute un court avant-propos dans lequel il justifie le titre et explique le cheminement intérieur qui l’a conduit à écrire son « cinquième évangile ».

     Le récit commence au jardin des Oliviers où Jésus se rappelle les moments importants des dernières années, la suite des événements qui l’on mené jusqu’à Jérusalem. Il se remémore quelques événements de son enfance, son aisance à écouter et à réconforter les gens qui venaient se confier à lui dans son atelier de Nazareth, sa rencontre déterminante avec le Plongeur et ses premiers disciples. Il se rappelle ses premières démêlées avec les autorités religieuses, sa sensibilité à l’égard de la souffrance humaine, ses longues discussions avec les femmes car elles parlent plus juste : « elles ont la bouche près du coeur. » Malgré ses miracles et les rumeurs qui croissent, il n’a pas la prétention d’être le Messie. Encouragé par Judas et convaincu d’avoir une importante mission à réaliser, il fait le pari d’avoir fait les bons choix. Malgré la peur, il attend, dans le jardin, l’arrivée des gardes du Sanhédrin.

     Après sa mort, c’est le personnage de Pilate, préfet de Judée, qui entre en scène. Comme dans le roman, il raconte à son frère comment l’événement Jésus est venu bouleverser sa vie. Les lettres destinées à son frère sont souvent dictées à Sextus le scribe, un nouveau personnage par rapport au roman. De la découverte du tombeau ouvert à la rumeur voulant que Jésus soit ressuscité, Pilate se lance dans une vaste enquête pour trouver les auteurs de ce qu’il considère comme une supercherie. Il en arrive à la conclusion que c’est Joseph d’Arimathie qui a monté toute cette histoire et que Jésus n’est pas vraiment mort. Ses certitudes sont pourtant ébranlées par le témoignage de deux personnes de son entourage : son médecin pense qu’on a peu de raison de croire que Jésus ait pu survivre à son supplice ; et son épouse, Claudia, qui a été guérie d’une hémorragie par Jésus, prétend l’avoir vu après sa mort. Bien qu’il n’adhère pas à la foi chrétienne contrairement à son épouse, Pilate demeure perplexe devant cette prétention des disciples de Jésus : sa résurrection. Le récit se termine par une réflexion intéressante sur l’avenir du christianisme et le rôle primordial du témoignage dans la transmission de la foi. En résumé, Mes Évangiles est une réécriture réussie et nous pouvons espérer voir bientôt cette oeuvre dans un théâtre près de chez-nous.

Sylvain Campeau
Bibliste, Laval