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chronique du 5 juin 2015

 

Khan al-Ahmar, le monastère de saint Euthyme le Grand

Vue d’ensemble des ruines de Khan al-Ahmar, le monastère de saint Euthyme le Grand

Vue d’ensemble des ruines de Khan al-Ahmar, le monastère de saint Euthyme le Grand.
(photos © Rosario Pierri)


Il y a peu de chance pour que vous connaissiez saint Euthyme, expert de la christologie au concile de Chalcédoine en 451, qui se retira dans le désert à l’Est de Jérusalem. Les professeurs du Studium Biblicum Franciscanum (SBF), la Faculté des sciences bibliques et d’archéologie des Franciscains de Jérusalem, vous conduisent sur ses pas.

     Le dimanche 7 mai 2000 a eu lieu l’inauguration solennelle du site archéologique de Khan al-Ahmar, identifié avec l’ancien monastère de saint Euthyme le Grand. Les autorités académiques étaient présentes, ainsi que les autorités religieuses, en qualité de représentantes des Églises locales. Le monastère de saint Euthyme, situé au centre de l’installation industrielle de Mishor Adumim, fut ainsi ouvert au public.

     Les ruines du Khan al-Ahmar se trouvent à 14 km de Jérusalem et à 3 km du monastère de Martyrius (Khirbet Murassas). Euthyme était originaire de Mélitène, en Géorgie Mineure, l’actuelle Arménie. Il s’installa d’abord dans la laure de Fara, dans les années 405-410. Puis il se rendit au Wadi Mukellik, au monastère de son ami Théoctiste. Il séjourna ensuite en Hyrcanie (Khirbet el-Mird) et passa quelques années dans le désert de Ziph (cité en 1 S 23,14), où il fonda le monastère de Kfar Baricha (Aristobule, Khirbet Istabul).

     Enfin, Euthyme retourna dans les plaines du Sahel et fonda la laure qui porte son nom (Khan al-Ahmar, le rouge). Le premier noyau du complexe monastique était constitué d’une église, d’une citerne et de quelques cellules. La première église a été consacrée par le patriarche de Jérusalem, Juvénal, le 7 mai 429.

     Vers la fin de sa longue vie, Euthyme demanda au diacre Fido de transformer sa laure en monastère. Les travaux s’achevèrent après la mort du saint. La grotte dans laquelle il vécut a été transformée en chapelle funéraire, et la crypte de l’église a été agrandie. En l’an 482, le patriarche Martyrius consacra l’église le 7 mai, date anniversaire de la mort de saint Euthyme.

     Une coutume propre à Euthyme était de convoquer tous ses moines pour un carême communautaire. Tous se retiraient dans la plaine de la Buqeia, à trois heures de marche à l’est, de la fête de l’Epiphanie au dimanche des Rameaux, période de la saison des pluies ; les moines avaient alors la possibilité de trouver des herbes amères et des chardons pour se nourrir.

     De nombreux moines à toutes les époques sont passés par la laure d’Euthyme. En 456, le jeune Martyrius s’installa au Khan al-Ahmar. Après son expérience monastique, il fonda la laure de Maalé Adumim, avant d’être élu patriarche de Jérusalem. L’historien de l’Église ancienne Cyrille de Scythopolis vécut dix ans à Khan al-Ahmar. Il écrivit la Vie de saint Euthyme en 557. Saint Jean Damascène (730-740) et saint Théodore le Studite (817) correspondaient avec les moines du monastère pendant la crise iconoclaste et autres querelles théologiques. Les témoignages de l’histoire du monastère d’Euthyme se prolongent avec les pèlerins de l’époque croisée, parmi lesquels ceux de l’abbé russe Daniel et du moine grec Jean Phocas. Le site a été abandonné par les moines aux alentours de 1250 et fut ensuite utilisé comme caravansérail par les caravanes arabes qui se dirigeaient vers Nabi Moussa.

Plan de Khan al-Ahmar

Fouilles et recherches à Khan al-Ahmar

     Le site de Khan al-Ahmar a été fouillé par trois  archéologues successivement : D.J. Chitty (1928-1929), Y.E. Meimaris (1976-1979) et Y. Hirschfeld (1987). Le complexe forme un rectangle irrégulier de 55 m x 65 m. À l’extérieur, du côté est, on trouve la grande citerne (12 m x 18 m), depuis longtemps recouverte, dont l’eau servit non seulement aux moines mais aussi aux bédouins et aux voyageurs passant sur la route de Jéricho. Au sud du monastère, la communauté monastique cultivait des jardins et des vergers lui appartenant.

Intérieur du monastère de Khan al-Ahmar

Intérieur du monastère reconstruit pendant la période des Croisades, vers l’entrée nord.

     Le monastère a été reconstruit à plusieurs reprises : après sa destruction par les Perses en 614, après le tremblement de terre de 659, et enfin à l’époque des Croisades. Certaines des mosaïques datent des VIIe et VIIIe siècle.

     La crypte funéraire de saint Euthyme se trouve au centre du monastère, tandis que la grande église à mosaïques est bâtie au sud. La crypte, la partie la plus ancienne du monastère, remonte à l’époque byzantine et mesure 4,7 m x 5,8 m. Elle a été identifiée par D.J. Chitty en 1928. Elle contenait le tombeau de saint Euthyme, entouré de ceux de ses abbés successeurs, dont Domitien et Passarion. À l’époque des Croisades, une chapelle de 8 m x 8 m fut édifiée sur la tombe du saint.

Mosaïque à proximité de l’ouverture d’une citerne

Mosaïque à proximité de l’ouverture d’une citerne. Les dernières mosaïques byzantines ont été insérées après le tremblement de terre de 659.

     L’église (13,8 m x 25,4 m) adossée au mur présente un sol recouvert de mosaïques et de marbres polychromes. Seule la nef sud est restée presque intacte, tandis que la septentrionale a disparu. Les décors sont variés : motifs géométriques, fleurs, tresses, animaux, etc.

     Le sol de marbre de la nef date de la période des Croisades (XIIe siècle). Autour de l’église se trouvent plusieurs cellules monastiques, ainsi que le réfectoire. En-dessous du sol de l’église, des vestiges de l’église primitive ont été retrouvés, notamment des céramiques byzantines et arabes. Cette découverte atteste que l’église au sol mosaïqué a été construite après le tremblement de terre de 659. Certains éléments de l’église remontent à la période des Croisades, lorsque la structure fut remise à l’état fonctionnel.

Le côté est des murs d’enceinte du monastère de saint Euthyme, fouillé successivement par trois archéologues.

Le côté est des murs d’enceinte du monastère de saint Euthyme, fouillé successivement par trois archéologues.

     Une seconde chambre funéraire (2,4 m x 8,5 m) a été découverte par Y. Meimaris à l’est de la tombe d’Euthyme. Sur le côté nord, là où se trouve la porte d’entrée d’époque croisée, une haute partie du mur d’enceinte est restée debout, ainsi qu’une tour de guet. Les plus petites citernes sont situées près du monastère.

     Saint Euthyme a eu l’idée de prendre soin des tribus nomades qui vivaient dans le désert de Judée. Dans ce but, il créa « Les diocèses de tentes » ou perambolè. Cyrille de Scythopolis écrit que 40 Sarrasins dirigés par Aspebeto vinrent à lui après avoir fui la Perse à cause des persécutions. Le fils, Terebone, a été guéri par saint Euthyme, ce qui entraîna la conversion et le baptême de toute la famille. Aspebeto a changé son nom en Pierre. Il fut ordonné évêque et participa au Concile d’Ephèse en 431. Maris, beau-frère d’Aspebeto, fut l’abbé successeur d’Euthyme au monastère de Khan al-Ahmar. Les monastères auxquels se référaient les bédouins chrétiens furent ceux de Fara, Khirbet Murassas, Khirbet al-Mird, la région de Jéricho, Deir Dosi et Saint-Saba.

Source : La Terre Sainte 631 (2014) 6-11 (reproduit avec autorisation).

Pietro Kaswalder

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Excursion dans la Shéphélah

 

 

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