(photo © Ministère égyptien du tourisme et des antiquités)

Le pharaon Apriès, défenseur de Jérusalem

Sylvain CampeauSylvain Campeau | 30 mai 2022

Un paysan près d’Ismaïla, au nord-est du Caire, prépare son champ pour les cultures. Il y découvre par hasard une grosse pierre recouverte de hiéroglyphes et informe rapidement les autorités. Les spécialistes attribuent la stèle monumentale au pharaon Wah Ib Re mieux connu sous son nom grec Apriès.

Apriès est un pharaon de la XXVIe dynastie qui a régné vers 600-580 avant notre ère à une époque où l’Égypte et la Babylonie se disputent le contrôle des pays du Levant (Israël et la Syrie). L’histoire retient de lui qu’il aurait pris la ville de Gaza et aurait soutenu Tyr et Sidon dans leur résistance aux Babyloniens.

Au sommet de la stèle se trouve le bas-relief d’un disque solaire ailé (souvent associé au dieu Râ) avec un cartouche du pharaon Apriès. Le bloc mesure 230 centimètres de long, 103 cm de large et 45 cm d’épaisseur. Il est recouvert de quinze lignes de hiéroglyphes et se trouve dans un très bon état de conservation. Il s’agit probablement d’une stèle placée dans une zone frontalière ; la stèle vante les victoires militaires du pharaon dont l’objectif est d’assurer la stabilité du royaume.

La Bible connaît ce pharaon sous le nom d’Hofra (Jérémie 44,30) et raconte une offensive militaire qu’il préparait contre les troupes de Nabuchodonosor II (634-562 avant notre ère) : « L’armée du pharaon ayant quitté l’Égypte, les Chaldéens qui assiégeaient Jérusalem, informés de la chose, s’étaient éloignés de Jérusalem en levant le siège. » (Jr 37,5) Mais cette apparente victoire n’est en fait qu’un retrait temporaire puisque les Babyloniens sont revenus l’année suivante et, comme l’avait prophétisé Jérémie, Jérusalem est tombée sous l’assaut des troupes ennemies (Jr 37,6-10). Des siècles plus tard, l’historien juif Flavius Josèphe relate l’événement de la même manière en précisant que Sédécias, le dernier roi de Juda, a pu compter sur le soutien de son allié égyptien, retardant les plans du roi babylonien (Antiquités 10, 108-111).

La stèle n’est pas encore déchiffrée complètement mais certains prétendent qu’elle fait état de succès militaires du pharaon contre les Babyloniens pendant les campagnes qu’il mène dans les territoires du Levant. Dans l’énumération des victoires du souverain égyptien, la stèle parlerait d’une alliance militaire entre son armée et celle des Hébreux, dans la guerre qu’il dirige contre les Babyloniens. Mais l’enthousiasme doit céder la place à la prudence tant que la stèle ne sera pas déchiffrée complètement, traduite et publiée dans un périodique reconnu par la communauté scientifique [1].

Diplômé en études bibliques (Université de Montréal), Sylvain Campeau est responsable de la rédaction.

[1] Voilà près d’un an que la stèle a été présentée à la presse et, à notre connaissance, cette publication se fait toujours attendre.

Le furet biblique

Le furet biblique

Initiée en 2001 par Gérard Blais, du Centre biblique Ha’rel (Saint-Augustin), cette rubrique s’inspire souvent de l’actualité pour poser un regard sur le judaïsme, le christianisme ou l’univers culturel de la Bible.