La dignité
retrouvée
Guérison
de l'aveugle Bartimée (Marc 10, 46b-52)
Autres lectures : Jérémie
31, 7-9; Ps 125 (126); Hébreux
5, 1-6
Un aveugle est au bord de la route. Son nom est Bar Timée.
Il s'agit de la seule personne guérie par Jésus dans
tout l'évangile dont le nom nous soit donné : un constat
qui doit nous inciter à nous arrêter sur l'étymologie.
Mot à mot, Bartimée signifie « Fils de Timée
» : le fils de Timée porte donc le nom qui le désigne
comme fils de son père! L'étymologie de ce nom est
l'araméen bar (« fils ») avec un nom d'origine
grecque sémitisé (time'ay). C'est « fils d'Honoré
» car Timê en grec signifie « honneur ». Cet
homme porte le nom d'un père ou d'un grand-père qui
a été célèbre et honoré. C'est
un patronyme lourd pour celui dont l'existence présente est
tout sauf honorable, en net contraste avec son illustre ancêtre.
Cet homme est exclu et marginalisé. Son handicap l'a rejeté
aux marges de la société, il l'a rendu passif et dépendant.
Son handicap a affecté toute sa vie sociale. Jésus
l'appelle. Bar Timée laisse alors tomber son manteau. Dans
la Bible, le vêtement est signe d'identité; ici, Marc
veut dire que, laissant son manteau, Bar Timée se dépouille
de ce qui fait son identité aux yeux de ceux qui le croisent
chaque jour sur le bord de la route. Il se met en quelque sorte
à nu et expose encore plus sa faiblesse, ses difficultés;
il se lève et se dirige seul vers Jésus en aveugle.
Que veux-tu que je fasse pour
toi? - Rabbouni, que je voie. Il veut retrouver l'honneur, la
dignité. Il veut devenir cet être de parole qui exprime
publiquement, et sans détour, ce qui le fait souffrir et
dont il veut être libéré.
La conclusion du récit atteste
la guérison. La guérison est doublement riche de sens.
Pour les témoins de la scène, elle est d'abord et
uniquement physique. Pour Bar Timée, elle est signe du salut.
Signe que cet homme est réconcilié avec lui-même
et avec les autres parce qu'il a rencontré le salut en la
personne de Jésus. Fini la condition d'aveugle! Désormais,
il est homme debout et parlant. Jésus lui a dit : Va!
mais il fait plus : Il suivait Jésus sur la route.
Il se sent assez courageux pour suivre Jésus, personnage
fameux mais contesté. Il l'accompagne à Jérusalem
où le prophète va entreprendre le combat de sa vie.
La communion à Jésus
par la foi et le sacrement nous rend capables à présent
d'affronter les drames de l'existence. La guérison que nous
pouvons apporter par des bons soins a valeur de signe: nous pouvons
accomplir dans le royaume de l'invisible de grandes choses pour
ceux qui nous sont liés dans l'Esprit.
Pierre Bougie, PSS
Professeur au Grand Séminaire de Montréal
Source: Le Feuillet biblique,
no 1942. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins
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