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Vingt-septième dimanche ordinaire A - 2 octobre 2005
 

Attentes divines et réponses humaines

Parabole des vignerons meurtriers (Matthieu 21, 33-43)
Autres lectures : Isaïe 5, 1-7; Ps 79(80); Philippiens 4, 6-9

La parabole dite « des vignerons homicides » raconte la triste histoire d'un propriétaire terrien qui confie sa vigne à des vignerons salariés, mais qui ne reçoit en retour que les mauvais traitements infligés à ses émissaires. Le propriétaire est en droit de s'attendre aux fruits de la vigne, mais il ne récolte que le mépris et le refus de ses employés. En dernier, les vignerons osent tuer le fils du propriétaire, espérant follement hériter de la vigne, alors que le propriétaire, même absent, est toujours vivant. Il ne tardera pas à chasser les vignerons homicides de son domaine, pour confier sa vigne ensuite à de plus fidèles intendants de son bien.

Allégorie de l'histoire du salut
   La parabole se veut en fait une allégorie détaillée de l'histoire du salut. Dieu (le propriétaire) a confié la direction de son peuple, Israël (la vigne) aux prêtres et aux docteurs de la Loi (les vignerons), mais ces derniers refusent la parole des prophètes (les serviteurs) qui leur sont envoyés par Dieu pour exiger les fruits de l'Alliance. Dans un geste de miséricorde, Dieu leur envoie son propre Fils, Jésus de Nazareth (le fils héritier), pour qu'ils se convertissent et qu'ils donnent le fruit escompté. Les chefs religieux d'Israël non seulement ne reconnaissent pas l'autorité du Fils de Dieu, mais ils le mettent à mort, dans l'espoir de garder une fois pour toutes le contrôle sur le peuple de Dieu. Leur démarche aveugle s'avère futile, cependant, parce que Dieu va leur enlever toute autorité et la confier à de nouveaux guides, les apôtres, pour former un nouveau peuple de Dieu, l'Église, qui sache répondre aux attentes de Dieu.

Bienveillance et miséricorde divines
    La parabole des vignerons homicides ne met pas en scène la vengeance de Dieu, mais bel et bien sa miséricorde, efficace et bienveillante. Dieu pourvoie généreusement aux besoins spirituels de son peuple, en suscitant des prêtres, destinés à guider Israël sur le chemin de la sainteté. Quand ces prêtres, trop humains, manquent à leur devoir ou se méprennent sur les intentions de Dieu, égarant par le fait même les fidèles qui leur sont confiés, Dieu prend les mesures nécessaires pour les en avertir et les ramener tous sur le droit chemin. C'est le rôle des prophètes. Malheureusement, les prêtres s'entêtent à toujours avoir raison et ils n'écoutent pas les prophètes. Pris de pitié pour son peuple à la dérive, pour ses prophètes malmenés et pour ses prêtres égarés, Dieu leur envoie son propre Fils que, espère-t-il, ils écouteront. Or, Jésus est crucifié par les Romains, sur accusation des prêtres Juifs.

Peuple recherché
    L'histoire aurait pu alors se terminer par le massacre de tous par un Dieu vengeur. Ce n'est pourtant pas cela qui se produit. Bien au contraire, Dieu cherche de nouveaux guides pour tous ceux et celles qui le cherchent avec passion, qu'ils soient Juifs ou pas. Parce que le peuple choisi se montre récalcitrant au projet divin, Dieu trouve efficacement une issue inattendue à l'impasse. Le Royaume de Dieu dépassera les frontières d'Israël, qui n'en aura plus l'exclusivité. Ainsi, pour que son plan se réalise, Dieu se tournera vers d'autres gens et leur confiera l'héritage d'Israël. Une Église universelle naîtra du refus persistant du peuple choisi. La miséricorde de Dieu ne connaît donc pas de limites, surtout pas celles de nos infidélités.

Une mise en garde
    L'humain étant ce qu'il est, souvent orgueilleux, faible et aveugle sur son propre sort, il serait vain de nous sentir à l'abri de l'erreur au sein de notre Sainte Église Catholique Romaine. À notre tour donc d'écouter la Parole du Christ dans l'Évangile et de prendre garde à ne pas nous égarer de la route qu'il nous propose. Nous n'enfermerons jamais dans une religion, quelle qu'elle soit, le Dieu Vivant. Si nous ne portons pas le fruit escompté, si nous lapidons les prophètes qui nous sont envoyés, si nous défigurons le visage du Christ, Dieu n'hésitera pas à vider nos Églises et à confier l'héritage chrétien à d'autres gens qui sachent mieux le faire fructifier. Parole d'évangile!

Les fruits de la vigne : le droit et la justice
...Pouvais-je faire pour ma vigne plus que ne n'ai fait? J'attendais de beaux raisins, pourquoi en a-t-elle donné de mauvais?... (Isaïe 5, 1-7).
    La parabole des vignerons homicides de l'Évangile est une « version corrigée et augmentée » de celle qui se trouve dans la première lecture, tirée du livre du prophète Isaïe (Isaïe 5,1-7). Avant Jésus, Isaïe comparait déjà Israël à une vigne qui devait porter le fruit que Dieu attendait d'elle après autant de bons soins. La version d'Isaïe a le grand mérite de spécifier de façon explicite que le fruit escompté par Dieu n'est autre chose que « le droit », « la justice » (5,7). Voilà ce que Dieu attend de nous! Par contre, Isaïe termine sa parabole par la dévastation de la vigne en guise de punition, ce qu'évite la version évangélique. De plus, en introduisant le personnage des vignerons, l'Évangile concentre l'attention sur les chefs religieux, qui sont responsables devant Dieu des fruits du peuple qui leur est confié. Les serviteurs envoyés aux vendanges, symbolisant les prophètes comme Isaïe, et le fils héritier, représentant Jésus le Christ, ajoutent à la nouveauté de l'Évangile. Néanmoins, ce qui constitue l'originalité la plus importante de l'Évangile, c'est que, au lieu de détruire la vigne pour sa stérilité, Dieu confie le soin de la vigne à des étrangers. Pour l'Évangile, Dieu ne manque jamais de recours quand il s'agit de mener son projet de salut à bien. Quitte à nous surprendre et à bouleverser ce qu'on croyait acquis et inébranlable pour toujours...

La paix de Dieu
... Ce que vous avez appris et reçu de moi, mettez-le en pratique... (Philippiens 4, 6-9)
    L'agir inattendu et puissant de Dieu dans la première lecture et dans l'Évangile pourrait nous laisser craintifs, nous qui savons très bien que nous sommes souvent infidèles à Dieu, nous qui sommes confrontés fréquemment à notre propre stérilité. Les mots de réconfort de Paul aux Philippiens tombent fort à propos : ne soyez inquiets de rien, mais en toute circonstance, dans l'action de grâce priez et suppliez... (4,6). Dieu sait que nous nous égarons. C'est pourquoi il nous envoie constamment des prophètes. Dieu ne veut pas nous condamner, mais bien nous sauver. À nous d'écouter, d'où que cela vienne. À nous de mettre en pratique tout ce qui est vrai et noble, tout ce qui est juste et pur, tout ce qui est digne d'être aimé et honoré, tout ce qui s'appelle vertu et qui mérite des éloges (4,8). Plus nous porterons du fruit, malgré nos chutes, plus nous ressentirons la paix de Dieu nous envahir.

Rodolfo Felices Luna, bibliste
Iles-de-la-Madeleine

Source: Le Feuillet biblique, no 2025. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

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