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Célébrer la Parole

 

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7e dimanche ordinaire B - 19 février 2006
 

Une parole qui rassemble

Jésus guérit un paralysé Marc 2, 1-12
Autres lectures : Isaïe 43, 18-19.21-22.24c-25; Psaume 40(41); 2 Corinthiens 1, 18-22


Dans l’Évangile de Marc, après son baptême par Jean (1,9-11) et l’épisode des tentations (1,12-13), Jésus commence par appeler des hommes à le suivre (1,16-20), puis il descend à Capharnaüm accompagné de ses disciples (1,21-34). Là, il annonce la parole avec autorité dans la synagogue, exorcise un homme tourmenté par un esprit mauvais et guérit la belle-mère de Simon, le futur Pierre. Pressé par Pierre et les autres disciples, Jésus refuse de se limiter à Capharnaüm, préférant aller dans les villages voisins proclamer la Bonne Nouvelle.

   Aujourd’hui, nous voyons Jésus revenir à Capharnaüm. Ce retour nous apprend d’abord que Jésus semble bien avoir élu domicile dans cette ville : la nouvelle se répandit qu’il était à la maison. Le texte ne nous dit pas si Jésus a loué une chambre dans la maison de Pierre. Mais le fait que son nouveau lieu de résidence soit la ville où habitent ses quatre premiers disciples a quelque chose de rassurant. Quand Jésus nous appelle à le suivre, il plante sa tente chez nous. Encore aujourd’hui, dans le mystère de l’Eucharistie, Jésus établira sa demeure dans le cœur de chacune et de chacun. J’y vois déjà une Bonne Nouvelle.

    J’y vois aussi une invitation à imiter les gens de Capharnaüm. Ayant su que Jésus était de retour à la maison, tant de monde s’y rassembla qu’il n’y avait plus de place, même devant la porte (2,2). Comme cela avait été le cas après la guérison du lépreux, Jésus est de nouveau victime de son succès : il n’était plus possible à Jésus d’entrer dans un ville… de partout on venait à lui (1,45). Nous ne risquons pas, en nous rendant à l’église ce dimanche, d’y rencontrer une telle foule. Mais, comme les gens de Capharnaüm ce jour-là, nous pouvons nous aussi nous rassembler autour de Jésus pour qu’il nous annonce, à notre tour, la Parole, pour qu’il plante à nouveau sa tente chez nous.

Une démarche de foi profonde
    Au cœur de cette foule avide d’écouter la Parole, arrivent des gens : quatre hommes portant un paralysé sur un brancard, mais aussi d’autres gens qui veulent créer une proximité entre Jésus et cet homme. Cependant, ils ne peuvent l’approcher à cause de la foule. Encore une fois, je ne peux m’empêcher de faire un lien avec notre situation contemporaine. Combien d’hommes et de femmes de chez nous ont faim et soif de cette Parole, désirent profondément s’approcher du Christ, mais en sont empêchés à cause de la foule ? La foule que nous sommes, nous qui fréquentons régulièrement la table de la Parole et de l’Eucharistie. Notre vie quotidienne n’est pas toujours à la hauteur de l’Évangile que nous proclamons chaque semaine. Mais aussi la foule de nos contemporains qui n’hésitent pas à marginaliser, voire à ridiculiser celles et ceux qui « croient encore en ça » !

    Mais ces gens venus présenter leur ami paralysé à Jésus ne sont pas de ceux que les obstacles arrêtent. Dans un geste audacieux, même périlleux, ils découvrent le toit au-dessus de Jésus, font une ouverture, et descendent le brancard sur lequel était couché le paralysé (2,4). Et Jésus répond favorablement. Au-delà du geste spectaculaire, il voit leur foi. Et il adresse une parole au paralysé. Ce faisant, il endosse leur démarche, il dit « oui » à leur foi. Ce « oui » fait écho à ce que dit saint Paul dans la deuxième lecture : Le Fils de Dieu, le Christ Jésus […] n’a pas été à la fois « oui » et « non »; il n’a jamais été que « oui » (2 Co 1,19). L’accueil que Jésus réserve au paralytique et à ceux qui veulent le conduire à lui nous encourage, nous aussi, à ne pas nous laisser arrêter par les foules et à aller jusqu’au bout de notre désir de nous approcher du Christ.

Une parole qui dérange
    La réponse positive de Jésus devant la foi de ces hommes a tout de même de quoi surprendre. Comme Jésus avait déjà guéri toutes sortes de malades lors de sa première visite à Capharnaüm et comme il avait déjà purifié le lépreux, on se serait attendu à ce que Jésus remette cet homme sur pied. Mais au lieu de cela, il lui déclare : Mon fils, tes péchés sont pardonnés. Le texte ne précise pas si le paralysé ou les hommes qui l’ont fait descendre par le toit sont contents ou déçus. Il attire plutôt notre attention sur la réaction des scribes. Ces spécialistes de l’Écriture s’insurgent parce qu’à leurs yeux, Jésus prend la place de Dieu qui seul peut pardonner les péchés. En fait, Jésus n’a pas dit : « Je te pardonne… » mais bien : tes péchés sont pardonnés. On peut voir dans cette forme passive une façon détournée de parler de l’action de Dieu. Jésus constate simplement que cet homme est pardonné par Dieu, que Dieu a pardonné au paralytique.

    Il reste que la réaction des scribes risque de ressembler à la nôtre. Si nous ne nous choquons pas de voir Jésus pardonner, nous avons peine à voir le lien qu’il y a entre la maladie et le péché. Dans notre esprit, cet homme n’est pas sur un grabat parce que lui ou ses parents ont péché. C’était pourtant la façon de penser au temps de Jésus. Mais un autre problème nous guette : l’idée que nous nous faisons de ce qu’est le péché. Trop souvent, nous sommes restés avec l’image de notre enfance : un péché est une action à ne pas faire, à proscrire. Nous péchons quand nous transgressons un interdit. Or, de nos jours, on entend souvent dire qu’il n’y a plus de péché ! Pourtant, quand on y pense, dans notre vie personnelle, notre vie d’Église et notre vie de société, bien des décisions, bien des gestes que nous posons mettent une distance entre nous et Dieu. Cette distance nous paralyse. Combien de blessures données ou subies viennent entraver nos rapports avec Dieu et avec nos frères et sœurs ? Quand on y regarde de près, nous nous retrouvons souvent devant le Christ dans la position du paralysé. Nous avons peine à nous tenir debout et nous sommes parfois incapables d’avancer sur la voie de l’Évangile.

Un pardon qui remet debout
    Heureusement pour nous, Jésus ne fait pas que réagir à la démarche des hommes qui portent le paralysé. Il réagit aussi aux raisonnements des scribes. Et voici que le pardon de Dieu, révélé par la parole du Christ, accomplit ce qu’il signifie. Non seulement cet homme est-il pardonné, mais grâce à ce pardon, l’homme se leva, prit son brancard, et sortit devant tout le monde (2,12a). Chose étonnante, le miraculé n’a pas de nom. C’est que chacun et chacune d’entre nous peut se reconnaître en cet homme. Portés par la prière de la communauté qui se rassemble autour du Christ, nous pouvons nous aussi recevoir le pardon de Dieu qui nous remet sur nos pieds. Comme le dit Dieu par la bouche d’Isaïe : Voici que je fais un monde nouveau : il germe déjà, ne le voyez vous pas ? […] oui, moi je pardonne […] à cause de moi-même (43,19a.25). Au moment où nous redisons la louange de Dieu, laissons-le nous rétablir dans son amour. Ainsi, nous pourrons dire à notre tour : Nous n’avons jamais rien vu de pareil (2,12b).

Yvan Mathieu, SM
Faculté de théologie, Université d'Ottawa.

 

Source: Le Feuillet biblique, no 2045. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

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