INTERBIBLE
Au son de la cithare
célébrer la paroleintuitionspsaumespsaumespsaumes
off Nouveautés
off Cithare
off Source
off Découverte
off Écritures
off Carrefour
off Caravane
off Scriptorium
off Artisans

 

 
Célébrer la Parole

 

orant
Imprimer
4e dimanche de Pâques B -7 mai 2006
 

Un bon pasteur à imiter

Le pasteur véritable et le mercenaire Jean 10, 11-18
Autres lectures : Actes 4, 8-12; Ps 117(118); 1 Jean 3, 1-2


Les versets du quatrième évangile proclamés aujourd'hui sont extraits d'un long chapitre consacré à la métaphore du berger. On y décrit des comportements de Jésus qui le qualifient comme « beau berger », selon la fascinante tournure du grec.

Des idées bien martelées
   Ces lignes d'évangile sont assez redondantes. Le texte ramène sans cesse les mêmes idées. Ce procédé de rédaction nous lasse vite lorsque nous la rencontrons dans un texte en français. Par contre, dans la Bible, cette manière d'écrire est un procédé souvent utilisé pour attirer l'attention sur des idées fortes. En ce temps-là, on avait peu de techniques purement graphiques pour attirer l'attention. On ne pouvait pas jouer sur la taille des caractères d'imprimerie: tout était recopié à la main. On n'imaginait surtout pas qu'un jour, on effectuerait cette opération de mise en évidence devenue si banale pour nous : surligner avec une encre de couleur fluorescente!

     Avec les pauvres moyens littéraires des débuts de l'ère chrétienne, le texte de l'évangile nous propose en rafale quatre mentions de la connaissance et cinq mentions du don de la vie. Il est essentiel de tenir compte de cette saturation du vocabulaire, lorsque nous voulons interpréter le texte en le respectant.

Des idées bien ciselées
     Grâce à la répétition des termes, les lecteurs voient émerger la signification de la vie donnée de Jésus: son engagement envers nous est total... On insiste sur le fait que Jésus nous connaît de la même manière que Dieu connaît son Fils. Cette intimité qualifie fortement l'intensité de notre relation avec lui. Jésus ne nous traite pas comme de vagues rencontres passagères vite oubliées! Avec une pénétration parfaite, Jésus nous met en contact intime avec Celui qu'il connaît... divinement!

    Ainsi, l'image d'un Jésus présenté comme berger est plus qu'une coquetterie exotique. Cette référence à une activité vitale dans les pays méditerranéens affirme désormais la contribution indispensable de Jésus : c'est lui qui nous rassemble; par sa connaissance profonde, il transforme en fraternité notre dispersion.

     L'activité de Jésus, digne d'un Dieu, correspond pourtant à des besoins humains fondamentaux. Puisque le pasteur par excellence se préoccupe constamment de son troupeau, il témoigne d'une considération de tous les instants pour chaque membre du groupe. C'est le contraire du comportement mercenaire. Le mercenaire ne se sent pas impliqué dans une relation durable ou profonde. Il ne prend même pas la peine de connaître les personnes à qui il a affaire.

    Notre culture biblique se limite habituellement aux textes du Nouveau Testament. Cela peut nous faire oublier que Jésus se décrit ici en personne qui réalise pleinement la figure positive du grand discours prophétique d'Ézéchiel 34. Dans ce chapitre fort étoffé, le prophète transmet la colère de Dieu devant les mollesses et les négligences des responsables de son peuple. Mieux encore, Dieu annonce sa volonté de compenser ces lacunes déplorables en s'investissant personnellement dans le soin de son peuple. Le texte prophétique établit sur un ton mordant la nette différence entre les pasteurs authentiques et les profiteurs indésirables.

    Vu sa générosité, le comportement de Jésus l'associe à cette activité directe de Dieu en faveur de son peuple. Fort de son expérience constructive au bénéfice du peuple de Dieu, Jésus est en droit de disqualifier le travail du mercenaire.

Des idées à incarner dans nos familles
     Jésus donne sa vie, un peu à la manière d'une mère ou d'un père qui n'en fait jamais assez pour sa descendance. Le bon berger qui donne sa vie propose un nouveau standard de qualité : ce comportement digne de la générosité parentale dit quelque chose des attentions de Dieu pour chaque personne insérée dans une relation durable avec lui.

    Par un heureux hasard du calendrier, ce message biblique est proposé en plein dimanche de la Fête des mères. On a beau dénoncer le battage publicitaire, rouspéter contre le déferlement de « guimauve sentimentale », hurler à la commercialisation à outrance... il reste que le geste d'achat qui devance parfois la réflexion déclenche un processus de révélation du sens. En préparant un cadeau pour ma mère, je suis tôt ou tard renvoyé aux raisons profondes qui me poussent à participer à la célébration collective. Le sens de mon geste découle de ma réflexion quant à la valeur de ce que je célèbre en cette Fête des mères nord-américaine.

    Dans la grande majorité des cas, le comportement de nos mères est plus proche du comportement du bon berger que du travail du mercenaire! Belle piste de méditation pour reformuler le langage de l'évangile en fonction des préoccupations du calendrier civil...

    Mais il y a plus. La Fête des mères permet de rappeler que l'Église de Jésus ne s'édifie pas d'abord avec des religieux, des religieuses ou des prêtres. Le matériau de base de l'Église, le matériau normal et premier, c'est la famille surgie d'un couple de baptisés qui vivent un mariage chrétien. Telle est la vocation de la plupart des baptisés.

    Avant de parler de vocations consacrées, il faut admirer ce qui est le lot de la majorité des baptisés : la vocation à créer une « Église de maison », dans l'amour et dans la fécondité. C'est d'ailleurs dans le mariage chrétien et c'est dans la famille chrétienne qu'on apprend à vivre l'amitié quotidienne avec Jésus. C'est là aussi qu'on apprend à vivre avec d'autres, et qu'on ressent le besoin de faire communauté, à la fois pour prolonger ce qu'on vit en famille et pour compléter ce que la famille humaine limitée ne peut pas nous donner.

Des idées pour le jour de prière pour les vocations
    La proclamation de l'évangile du bon pasteur vient aussi étoffer le jour de prière pour les vocations consacrées. Prêtres, diacres, religieux et religieuses, membres des instituts de vie consacrée, ces personnes investissent toute leur vie dans des activités qui soutiennent le tonus quotidien de la communauté chrétienne. Un prêtre heureux, un diacre en service créatif, des religieux et religieuses qui témoignent de la valeur de la vie communautaire, des membres d'instituts de vie consacrée qui vivent l'évangile dans la profondeur du quotidien: voilà autant de mises en chair du comportement du bon pasteur de l'évangile.

Alain Faucher, ptre, bibliste
Université Laval, Québec

 

Source: Le Feuillet biblique, no 2056. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

Chronique précédente :
Les témoins du Christ crucifié et ressuscité