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Dimanche de la Sainte-Famille C - 31 décembre 2006
 

Une vie se dessine

Premières paroles de Jésus au Temple : Luc 2, 41-52
Autres lectures : 1 Samuel 1, 20-22.24-28; Psaume 83(84); 1 Jean 3, 1-2.21-24

L’épisode de l’évangile d’aujourd’hui est bien connu. À douze ans, lors du pèlerinage annuel pour la Pâque juive, Jésus reste à Jérusalem pendant que ses parents retournent en caravane à Nazareth, le croyant en chemin avec d’autres parents ou amis. Constatant qu’il n’est pas de la caravane, Marie et Joseph rebroussent chemin à sa recherche. Au bout de trois jours, ils le retrouvent assis au Temple de Jérusalem, à l’écoute de l’enseignement des docteurs de la Loi, qui sont étonnés de l’intelligence de ses questions et de ses réponses. La frousse passée, la Sainte Famille retourne chez-elle, à Nazareth. Au cœur du récit, l’adolescent Jésus reproche à ses parents apeurés : Comment se fait-il que vous m’ayez cherché? Ne le saviez-vous pas? C’est chez mon Père que je dois être (2,49).

Les années cachées

   Entre les récits de la naissance de Jésus dans Matthieu (1-2) et Luc (1-2), et le récit de la mission de Jean-Baptiste, raconté par les quatre évangélistes (Matthieu 3; Marc 1; Luc 3; Jean 1), cet épisode de l’Évangile de Luc est le seul qui jette quelque lumière sur les années dites « cachées » de la vie de Jésus. On sait à peu près rien de cette période obscure de la vie du Messie. Le silence des évangiles canoniques a donné prétexte à la création de palpitantes aventures « cachées » de Jésus dans les évangiles dits apocryphes (mot qui veut dire « secrets » ou « cachés »). Ces écrits, postérieurs aux évangiles retenus comme Parole de Dieu par l’Église, profitent de la curiosité populaire pour meubler l’espace narratif laissé vide par leurs nobles prédécesseurs, avec des traditions inventées de toutes pièces. Se présentant comme la révélation des secrets de Jésus, les apocryphes ne sont pas des sources historiques fiables, et leur théologie est plus que douteuse. Ce n’est pas un caprice de l’Église de les avoir mis de côté : ils ne font tout simplement pas le poids devant Matthieu, Marc, Luc et Jean. L’épisode de Jésus retrouvé au Temple à douze ans est donc notre seul pont narratif et théologique entre la naissance du Messie et son baptême auprès de Jean-Baptiste.

    J’insiste sur ce point : il s’agit d’un pont narratif et théologique, servant à relier - chez Luc seulement - le récit de la naissance de Jésus à la prédication de Jean sur les rives du Jourdain. D’un point de vue strictement historique, rien n’est moins sûr que cette aventure cocasse de la Sainte Famille. Luc n’en savait pas plus que Marc, Matthieu ou Jean à propos de l’enfance de Jésus. Il a choisi d’honorer le silence de la tradition par un récit édifiant qui, à travers des symboles, des références à l’Ancien Testament et une théologie solide sur la vocation de Jésus, nous prépare à bien saisir le sens de sa mission.

L'âge de la majorité

   Luc choisit de situer l’épisode à l’âge de douze ans, car c’est l’âge de la majorité en Israël au temps de Jésus. À douze ans, les garçons sont tenus d’observer la Loi de Moïse et peuvent lire les Écritures à la synagogue. C’est donc un âge critique entre l’enfant que Jésus a été et l’homme qu’il deviendra. Luc dépeint Jésus comme un adolescent respectueux de ses parents et des traditions. Il monte à la fête avec eux et il leur est soumis au retour (2,51). L’escapade de Jésus au Temple n’est que le moyen de signaler son accès à la maturité et à sa responsabilité face à sa mission. Jésus reste au Temple comme le jeune prophète Samuel (1 Samuel 1,22.25.28), car les affaires de Dieu lui tiennent à cœur. C’est la vocation de sa vie qui se dessine ici à l’avance.

Chez lui au Temple

   Pour Luc, le Temple de Jérusalem revêt une grande importance en tant que maison de l’Alliance. Le salut y est annoncé en faveur d’Israël par la prophétie de l’ange Gabriel au prêtre Zacharie, père de Jean-Baptiste (Luc 1,5-25). C’est au Temple que le bébé Jésus est présenté par ses parents, pour que les promesses de salut envers Jérusalem s’accomplissent (2,22-38). Au Temple se rendent constamment les apôtres après la résurrection, pour y annoncer la bonne nouvelle (24,52-53). Le salut s’étendra d’Israël aux autres nations à partir du Temple de Jérusalem dans le livre des Actes des Apôtres, rédigé par Luc. La visite de l’adolescent Jésus au Temple contribue ainsi à souder les maillons de l’histoire du salut, qui part de Jérusalem dans l’œuvre de Luc.

L'intelligence des Écritures

   Luc nous montre Jésus apprenant les subtilités de la Loi auprès des docteurs. Il nous le présente comme un adolescent intelligent et perspicace, aux interventions remarquables. Cela introduit bien l’habile prédication qu’il fera plus tard aux foules et son questionnement critique de la Loi. Enfin, la perte de Jésus à Jérusalem pendant la Pâque, le trouble dans lequel il laisse ses êtres chers, suivis de la joie des retrouvailles au bout de trois jours (2,46) à la fois annoncent et résument les événements de la Passion et de la Résurrection. Au lecteur de méditer dans son cœur, comme Marie, le sens de ces mystérieux événements! Reste au cœur du récit la confession de foi en Jésus en tant que Fils de Dieu. À l’inquiétude de Marie, qui s’adresse à Jésus ainsi : Mon enfant, pourquoi nous as-tu fait cela? Vois comme nous avons souffert en te cherchant, ton père et moi! (2,48), Luc répond par la confiance de Jésus en son Père des Cieux, dont il a les affaires à cœur. Muni de cette même confiance filiale, Jésus dira du haut de la croix : Père, entre tes mains je remets mon esprit (23,46). Loin d’être une anecdote cocasse, le récit de Jésus retrouvé au Temple à douze ans est une catéchèse bien plus riche que toutes les péripéties secrètes racontées par les apocryphes.

Le jeune Samuel
1 Samuel 1, 20-22.24-28

     Le lecteur qui prendra la peine de lire les trois premiers chapitres du Premier livre de Samuel, dont la première lecture est un court extrait, découvrira à quel point Luc s’est inspiré de l’Ancien Testament pour raconter le sens de la vie de Jésus à même ses débuts. Au menu : stérilité de parents pieux, annonce d’une naissance spéciale, cantique semblable au Magnificat de Marie et consécration d’un enfant au Temple. Croyez-moi, cela vaut le détour!

Enfants de Dieu
Jean 3, 3,1-2.21-24

    La deuxième lecture nous rappelle que le privilège filial de Jésus nous a été offert avec le don de son Esprit. Nous voici enfants de Dieu! Avec ce privilège vient cependant la responsabilité de se montrer les dignes héritiers de la mission du Fils. Aurons-nous à cœur les affaires du Père?

Source: Le Feuillet biblique, no 2081. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

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