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Célébrer la Parole

 

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3e dimanche de Carême C - 7 mars 2010

 

 

Un problème toujours actuel

La conversion est urgente : Luc 13, 1-9
Autres lectures : Exode 3, 1-8a.10.13-15; Psaume 102(103); 1 Corinthiens 10, 1-6.10-12

 

Arrive-t-il un malheur dans une ville sans que Yahvé en soit l’auteur? (Amos 3,6b). Un avion tombe, entrainant dans la mort tous les passagers et les membres de l’équipage; une bombe éclate dans un marché frappant indistinctement tous les passants, civils ou militaires. L’actualité nous montre de tels événements si souvent que nous n’y prêtons plus qu’une attention distraite; ce sont des « faits divers ».

     Pourtant des questions se posent : pourquoi cela arrive-t-il? Pourquoi ces personnes sont-elles frappées plutôt que d’autres? La réponse simpliste serait de dire que les victimes devaient être coupables de quelque chose et qu’elles reçoivent un juste châtiment. Pourtant l’expérience montre bien que cette explication ne tient pas. Alors, le malheur frappe-t-il au hasard? En fin de compte, cela reviendrait à admettre que l’histoire n’a aucun sens et que la destinée des humains dépend uniquement du va et vient de forces contingentes. Pour le croyant cette position n’est pas acceptable. Le monde n’est pas un chaos mais un cosmos : Par ses paroles le Seigneur a fait ses œuvres et la création obéit à sa volonté (Sirac 42, 15b).

     On ne sait pas dans quelle intention les interlocuteurs de Jésus viennent lui rapporter l’incident concernant les Galiléens. Voulaient-ils exciter sa ferveur nationaliste et le décider à lancer un mouvement de révolte? Ou le mettre en garde contre un danger? Ou bien l’information contenait-elle une question implicite comme la réaction de Jésus semble le supposer? Luc laisse dans l’ombre cet aspect de même que la manière dont les propos de Jésus ont été reçus. Mais il est vraisemblable que la réaction de Jésus n’a pas été celle que souhaitaient les personnes venues l’informer.

Vous périrez tous comme eux (v. 3 cf. v. 5)

     Jésus ne veut pas faire porter la discussion sur le terrain politique. L’exemple qu’il apporte des victimes de la chute d’une tour – événement purement accidentel semble-t-il – le montre bien. Il ne veut pas non plus porter un jugement sur les personnes impliquées dans ces tragédies. Admettre qu’elles avaient mérité leur sort de quelque manière laisserait entendre que tous ceux qui ont été épargnés seraient irréprochables. Même si Jésus n’a jamais lu les épîtres de Paul, il aurait sûrement été d’accord avec cette affirmation : Tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu (Romains 3, 23).

     Pour Jésus, ces événements malheureux ne sont pas des châtiments personnels mais des appels à la conversion. Oui le mal et la souffrance existent, c’est vrai qu’ils sont la conséquence du péché. Mais Dieu ne veut pas la mort du pécheur mais sa conversion : Je ne prends pas plaisir à la mort de qui que ce soit, oracle du Seigneur Yahvé. Convertissez-vous et vivez (Ézéchiel 18, 32). Autrement dit, le malheur qui a frappé ces personnes aurait pu atteindre n’importe qui puisque personne n’est parfaitement juste devant Dieu. Ce qui est arrivé devrait amener les survivants à changer leur cœur; en effet : Tenez-vous prêts vous aussi car c’est à l’heure que vous ne pensez pas que le Fils de l’homme viendra (Luc 12, 40). Il ne s’agit pas d’une menace mais d’un avertissement.

Peut-être donnera-t-il du fruit à l’avenir (v. 9)

     Certains croient que Dieu est trop pressé de faire justice et qu’il frappe au hasard pour donner un exemple (cf. vv. 1-5). D’autres au contraire lui reprochent de trop tarder à manifester sa puissance et à juger les impies. À ceux-ci Jésus propose la parabole du figuier (vv. 7-9). La comparaison de l’arbre ou de la plante qui porte du fruit revient souvent dans les propos de Jésus (cf. Lc 8, 5-7.11-15; Jn 15, 16-17). Il illustre par là la fécondité de la Parole dans la vie des croyants. Mais quoi faire lorsque la semence ne pousse pas ou que la plante reste stérile? Doit-on l’éliminer (cf. Mt 21, 18-19)?

     Dans cette parabole le vigneron joue le rôle de Moïse intercédant pour le peuple infidèle : Mon Seigneur Yahvé, ne détruis pas ton peuple et ton héritage, lui que tu as délivré par ta grandeur et que tu as fait sortir d’Égypte à main forte (Dt 9, 26). Dans la Nouvelle Alliance le Christ est l’intercesseur auprès du Père : Si quelqu’un vient à pécher, nous avons un avocat auprès du Père, Jésus Christ, le juste (1 Jn 2, 1b; cf. Hé 7, 25).

     Il est certain que le retard de la Parousie a troublé les fidèles des premières générations chrétiennes. Puisque le Christ est ressuscité et que le monde nouveau est déjà commencé, comment se fait-il que le monde ancien se prolonge? La parabole du figuier explique ce délai par la miséricorde de Dieu, lui qui est un Dieu de tendresse et de miséricorde, lent à la colère, riche en grâce et en fidélité (Exode 34, 6). La Deuxième lettre de Pierre exprime en langage clair le message de la parabole : Le Seigneur ne retarde pas l’accomplissement de ce qu’il a promis, comme certains l’accusent de retard, mais il use de patience envers vous, voulant que personne ne périsse, mais que tous arrivent au repentir (2 Pierre 3,9).

     Les événements considérés du point de vue de la foi peuvent devenir des appels à mieux vivre de la Parole de Dieu. Le présent est le temps où se construit le Royaume; chacun doit être attentif à en discerner les signes (cf. Lc 12, 54-56).

Celui qui m’a envoyé … c’est Yahvé (Exode 3, 15)

     Avant Abraham les dieux sont associés à des endroits précis, souvent en lien avec un phénomène naturel ou avec un lieu comme une montagne. Le voyageur, au fur et à mesure de ses déplacements, doit se concilier les faveurs des divinités locales. À Abraham Dieu promet assistance tout au long de la route; la divinité n’est plus liée à un endroit mais à une personne. Ce sera le Dieu d’Abraham et, après lui, d’Isaac et de Jacob (cf. v. 15). Avec Moïse une nouvelle étape est franchie. Dieu se fait connaître en dévoilant son nom (il s’appelle Yahvé un mot dérivé de la racine du verbe être en hébreu) mais aussi en annonçant son projet de salut : J’ai vu, oui, j’ai vu la misère de mon peuple… je suis descendu pour le délivrer de la main des Égyptiens (v. 7).

Leur histoire devait servir d’exemple (1 Corinthiens 10,11)

     Paul continue l’histoire de l’exode. Il s’attarde à la marche au désert. Il y voit une anticipation du mystère pascal chrétien. Le mot traduit par exemple (vv. 6.11) désigne ce qu’on pourrait appeler un prototype ou un modèle. De cette lecture typologique Paul dégage deux applications. Dans l’ordre sacramentel, le passage de la mer annonce le baptême (v. 2), la manne et l’eau jaillie du rocher, l’eucharistie (vv. 3-4). Dans le domaine moral, les infidélités des Israélites servent de mise en garde aux générations de croyants qui doivent toutes renouveler leur engagement envers le Seigneur sous peine de voir se réaliser l’avertissement de Jésus : Si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de la même manière (Lc 13,5).

 

Jérôme Longtin, ptre

 

Source: Le Feuillet biblique, no 2220. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

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