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Dimanche du St-Sacrement C - 6 juin 2010

 

 

Un don d'amour

Multiplication des pains Luc 9, 11b-17
Autres lectures : Genèse 14, 18-20; Psaume 109(110); 1 Corinthiens 11, 23-26

 

Aujourd’hui l’Église catholique romaine célèbre une richesse spirituelle qui a été déclarée récemment par le pape Benoit XVI comme le sommet du catholicisme : le sacrement de l’Eucharistie. Dans ce sacrement, les catholiques croient que le Christ devient mystérieusement présent dans le pain béni par le prêtre lors de la messe. Sour la forme du pain eucharistique, Jésus devient encore aujourd’hui accessible à nos sens. Les croyants et les croyantes peuvent le voir, le goûter et, depuis le concile Vatican II, le toucher. Ce mystère, une réalité que la raison humaine n’a jamais fini d’approfondir, montre bien à quel point Dieu nous aime. Après l’ascension de son Fils, Dieu aurait pu laisser ses enfants démunis, sans aucune réalité concrète pour nous lier à lui. Il n’a pas fait ce choix. Au contraire il a offert à l’humanité plusieurs cadeaux : sa Parole que plusieurs membres du Corps du Christ considèrent contenue totalement dans la Bible, les sacrements comme l’Eucharistie, ses témoins, etc.

Un don contesté

     Certains théologiens ont trouvé simpliste la formule des trois blancheurs pour énoncer ce qui caractérise la famille catholique parmi les autres familles chrétiennes (orthodoxes, protestants, anglicans) : la papauté, la Vierge Marie et  l’Eucharistie. Les différentes branches de l’arbre enraciné dans le Christ n’ont donc pas la même conception de l’Eucharistie. Plusieurs affirment que la majesté du Christ, le Fils du Père, ne peut pas se réduire à une forme aussi indigne que du pain. Cette différence doctrinale est devenue, au fil des siècles, un facteur majeur qui a semé la division parmi les enfants de Dieu. Le don d’amour de la Trinité a été transformé en élément de discorde et, parfois, en élément de haine.

Au-delà de la discorde

     Au-delà des divergences sur la présence du Christ dans le pain eucharistique, tous les fidèles sont d’accord sur le sens profond du geste institué par le Seigneur lors de la Cène : une nouvelle alliance a été inaugurée entre Dieu et l’humanité grâce au Christ qui est mort sur la croix et qui est par la suite ressuscité. Lors du miracle de la multiplication des pains, relaté dans l’Évangile de cette célébration, Jésus pose des gestes semblables à ceux qu’il fera lors du dernier repas pris avec ses apôtres. Ces actes illustrent la profondeur de l’union qui existe désormais entre la Trinité et sa création.

     D’abord, comme dans la dernière Cène, le pain est présenté par des hommes, les disciples. Ce pain symbolise l’univers matériel de la création et l’action humaine qui le transforme. En effet, le blé, le levain et l’eau, éléments de la nature, deviennent du pain à cause du travail du boulanger. Après un geste fait par l’être humain qui signifie aussi son libre choix de s’unir à Dieu, Jésus prend le relais en bénissant le pain.

     Cette action du Christ signifie en premier lieu sa propre acceptation de s’unir au monde humain car, en bénissant le pain, le Sauveur l’introduit dans son domaine : le Royaume des cieux. Mais le Seigneur n’en reste pas là. Il veut bien faire comprendre que le salut chrétien ne doit pas rester enfermé dans l’intériorité de chaque personne. Il doit être diffusé, partagé. Jésus brise donc le pain. Il met donc la nourriture dans un état pour qu’elle soit partagée. Par la suite, Jésus ordonne la répartition du pain rompu. Il faut remarquer que la distribution du pain se fait sous l’initiative du Seigneur. Sans lui, le salut ne se produirait pas. La Nouvelle Alliance n’aurait simplement pas débuté.

     Après avoir initié le partage du pain, les disciples exécutent la volonté du Seigneur. Ils passent à travers la foule et offrent le pain, aliment essentiel à la vie. En effet, une personne qui ne mange pas meurt. Le pain, symbole de la Nouvelle Alliance, exprime bien que le salut du Christ est orienté vers la vie, la vie éternelle. En plus, en confiant la distribution du pain aux disciples, le Sauveur dévoile son intention de mettre à contribution ses sœurs et frères humains dans la construction de l’Église, son Corps sur terre. Le lien entre la Trinité et l’humanité se continue donc dans l’action. La transformation du cœur humain devient ainsi une transformation du monde extérieur.

     Après cette distribution, le processus sacré se termine avec le repas. Tous les actes précédents ne serviraient à rien si les individus ne s’unissaient pas au Sauveur en mangeant le pain béni et rompu par Lui. Un refus des personnes rendrait le processus antécédent stérile, sans conséquence. Luc signale dans la narration du miracle que la foule a été rassasiée. Ce détail n’est pas anodin car l’évangéliste veut dire ici que le salut chrétien va assouvir tous les appétits humains : amour, bonheur, etc. En acceptant de devenir membre du Corps du Christ, l’être humain connaîtra le bonheur parfait et sentira l’amour de la Trinité que rien ne peut surpasser ou détruire.

Une illustration séculaire

     Souvent les croyantes et les croyants font des liens dans l’Écriture. Ici le peuple élu, Israël, a vu dans la rencontre entre Abraham, le père des croyants, et Melkisédek, un païen, l’hommage que la nation sainte rendrait à Yahvé à Jérusalem. En effet, Melkisédek est roi de Salem ou, selon les érudits de l’Ancienne Alliance, de Jérusalem. Les premières communautés chrétiennes ont plutôt perçu dans le pain apporté par le roi une annonce de l’Eucharistie. En effet, Melkisédek est aussi grand-prêtre, qui fait office de médiateur entre la divinité et l’humanité. Dans notre épisode, il bénit le pain et le vin comme l’ultime grand-prêtre, Jésus, lors de la dernière Cène. Les premiers amis de Jésus ont donc vu dans ce texte de l’Ancienne Alliance une préfiguration de ce qui se produirait dans la Nouvelle.

Un témoignage important

     Aujourd’hui la plupart des scientifiques qui étudient la Bible admettent que les Évangiles ont été écrits plusieurs décennies après la mort et la résurrection du Sauveur. Cet argument permet souvent aux détracteurs de la foi de remettre en question la véracité historique du contenu évangélique. L’être humain oublie. La vérité historique peut donc être modifiée surtout si celle-ci n’est pas immédiatement rapportée sur un support quelconque dans un délai très court après l’événement. Le témoignage de Paul contrecarre en partie les critiques qui voudraient remettre en question l’authenticité historique de l’Eucharistie. Dans l’extrait proclamé aujourd’hui, l’apôtre des Gentils raconte que les premières communautés chrétiennes célébraient l’Eucharistie selon un rituel qui aurait été fixé par le Sauveur lui-même. Quand Paul écrit, il rapporte ce qu’il a vu et entendu à son époque. Les historiens ont donc ici un document qui répond à des critères de vérité historique puisque Paul ne rapporte pas des événements qui auraient eu lieu dans un passé lointain. L’Église peut donc avec certitude célébrer un rite qui a été pratiqué par les premières communautés chrétiennes et qui a été attribué par elles au Seigneur lui-même.

 

Benoît Lambert

 

Source: Le Feuillet biblique, no 2233. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

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Dans l'intimité de Dieu